ISO 37 001, une certification anticorruption


Édition du 12 Août 2017

ISO 37 001, une certification anticorruption


Édition du 12 Août 2017

Par Robert Dutton

[Photo : 123RF]

Qu'ont en commun les municipalités québécoises de Brossard, Granby, Repentigny, Saint-Calixte, Saint-Colomban, Saint-Jérôme, Sainte-Julienne ? Elles ont toutes commencé à implanter la nouvelle norme ISO 37 001 pour obtenir une certification dans quelques mois, quelques années tout au plus. Cette norme, publiée en octobre 2016, offre des Systèmes de management anticorruption.

La Banque mondiale estime que plus de 1 000 milliards de dollars sont versés chaque année en pots-de-vin. C'est 3 % du PIB mondial. Au Québec, la commission Charbonneau a ouvert les yeux de tous ceux qui se réfugiaient derrière la confortable conviction que la corruption ne concernait que «ces pays-là». La corruption systémique existait (existe toujours ?) ici également.

Oui, je sais, j'aime citer Albert Camus qui a écrit : «L'intégrité n'a pas besoin de règles.» Je le crois profondément, lorsqu'il s'agit d'individus. Toutefois, lorsqu'il s'agit d'organismes, l'intégrité a besoin de politiques, de rôles et de responsabilités claires à tous les paliers de l'organisation, de planification systématique, d'informations documentées, de sensibilisation, de formation, de beaucoup de communication, d'évaluation et de contrôles ; et, surtout, pour que tout cela fonctionne, d'un leadership fort, déterminé et engagé.

Les meilleures pratiques du monde

Élaborée par des experts de 37 pays qui ont planché sur le sujet pendant trois ans, la norme 37 001 représente une synthèse des meilleures pratiques qui existent pour prévenir la corruption. Elle propose des systèmes et des mécanismes pour agir en amont et empêcher la corruption de se produire. Elle se fonde sur les recommandations d'organismes tels que la Chambre de commerce internationale, l'OCDE et Transparency International.

L'Organisation internationale de normalisation, responsable d'élaborer les normes ISO et de superviser la délivrance des certifications associées, énonce des exigences qui concernent les aspects suivants :

> Adoption d'une politique et de procédures de lutte contre la corruption

> Démonstration par la direction de son leadership et de son engagement

> Désignation d'une personne ou d'une fonction responsable de superviser la conformité à cette politique

> Formation anticorruption

> Devoir de vigilance et évaluation des risques de corruption relatifs à certains projets ou partenaires commerciaux

> Mise en oeuvre de moyens de contrôle financiers, commerciaux et contractuels, ainsi qu'en matière d'achats

> Engagement de procédures de signalement, de suivi, d'enquêtes et d'audits

> Actions correctives et amélioration continue

Au début de cet article, j'ai mentionné des municipalités québécoises, mais la nor-me 37 001 ne se limite pas à celles-ci ni même au secteur public. Elle s'applique à tout organisme public ou privé, aussi bien une entreprise, grande ou petite, qu'un ministère, une société d'État ou un organisme non gouvernemental. Tout organisme est susceptible d'être corrupteur (directement ou par l'intermédiaire d'un de ses représentants) ou corrompu - coupable ou victime de corruption. La norme 37 001 fournit des outils pour prévenir, corriger, voire éliminer les deux volets du problème.

La multinationale française Alstom a récemment obtenu sa certification pour ses établissements européens. Walmart et Microsoft ont annoncé leur intention de l'obtenir à l'échelle mondiale. Le président péruvien Pedro Pablo Kuczynski, élu en 2016 et mis en présence d'une corruption endémique et profondément enracinée, compte faire du Pérou le premier pays d'Amérique latine à implanter la norme 37 001. À l'autre extrémité du spectre, le gouvernement de Singapour, que Transparency International place deux positions devant le Canada dans son classement 2016 des pays du monde en matière de corruption, a annoncé en avril qu'il commençait à implanter la norme dans son administration.

Irréversible

On le voit, moins d'un an après sa publication, la norme 37 001 intéresse des organismes de toute nature et de toute taille, depuis la municipalité de Saint-Calixte (6 000 habitants) jusqu'à Walmart (2,3 millions d'employés dans 28 pays). Pour des raisons qui m'apparaissent évidentes.

D'une part, les organismes préoccupés par leur propre intégrité et celle de leurs partenaires peuvent implanter un système de management rigoureux sans avoir à réinventer la roue - les meilleures pratiques ont déjà été recensées et synthétisées dans un document accessible.

D'autre part, un organisme qui adopte la norme 37 001 et obtient la certification par une tierce partie autorisée envoie un message fort à ses employés, à ses clients, à ses partenaires et à ses fournisseurs : «Vous pouvez nous faire confiance, mais faire affaire avec nous requiert de l'intégrité.»

À quand ?

La généralisation de la nouvelle norme est irréversible. Dans le sillage des adopteurs précoces, un nombre croissant d'organismes publics et privés sentiront la pression de l'implanter. On peut même s'attendre à ce que la certification devienne un prérequis, ou au moins un facilitateur, pour faire affaire avec un grand client public ou privé. Imaginez que Walmart donne sa préférence à des fournisseurs certifiés 37 001. Ou que notre AMF en fasse une condition d'éligibilité à l'obtention de contrats publics. L'effet domino serait impressionnant.

Pour un organisme d'une certaine envergure, je crois que la question n'est déjà plus de savoir s'il faut obtenir la certification 37 001, mais plutôt de savoir quand il faudra s'y mettre.

Biographie
Pendant plus de 20 ans, il a été président et chef de la direction de Rona. Sous sa gouverne, l'entreprise a connu une croissance soutenue et est devenue le plus important distributeur et détaillant de produits de quincaillerie, de rénovation et de jardinage du Canada. Après avoir accompagné un groupe d'entrepreneurs à l'École d'entrepreneurship de Beauce, Robert Dutton a décidé de se joindre à l'École des dirigeants de HEC Montréal à titre de professeur associé.

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