La finance islamique peut-elle sauver le capitalisme?

Publié le 11/11/2013 à 09:28, mis à jour le 11/11/2013 à 12:48

La finance islamique peut-elle sauver le capitalisme?

Publié le 11/11/2013 à 09:28, mis à jour le 11/11/2013 à 12:48

La finance islamique est-elle l’avenir du capitalisme ? C’est un peu la question que l’on se pose à la lecture du blogue (www.gestionsuisse.com) de l’économiste franco-suisse Michel Santi, auteur de L'Europe, chronique d'un fiasco politique et économique, Capitalism without conscience et de Splendeurs et misères du liberalism. Avec sa permission, nous vous présentons un résumé de son blogue sur la finance islamique, encore peu connue chez nous.

«C’est bien-sûr pour des motifs politiques et pécuniaires que le gouvernement britannique vient de prendre la décision d’émettre une sukuk, une obligation islamique. Sa volonté étant d’imposer la place financière de Londres comme « premier centre émetteur d’obligations islamiques hors du monde musulman», de l’aveu même du ministre des Finances, George Osborne.

La grande spécificité d’une sukuk est qu’elle doit impérativement être corrélée à un actif sous-jacent générateur de revenu. On comprend mieux dès lors pourquoi les obligations islamiques sont essentielles à la stabilité financière. En présence de telles règles, il est en effet impossible de contracter des dettes qui ne sont pas liées, amorties ou au moins partiellement équilibrées par des revenus à venir.

Le respect de ce seul principe n’aurait-il pas évité l’hyper endettement de nombre de nos nations occidentales? En outre, la morale n’aurait-elle pas été sauve avec des produits comme les musharakah ou les mudarabah, qui autorisent l’encaissement de bénéfices tout en contraignant tous les participants à partager les pertes éventuelles?

Nous pensons aux banques et à leur actionnariat ayant été secourus par l’argent du contribuable sans devoir en subir la moindre conséquence adverse. Nous pensons aussi à l’Espagne et l’Irlande qui, pour avoir dépensé sans compter afin de sauver leurs établissements financiers, font subir aujourd’hui à leurs jeunes un taux de chômage dépassant les 50% à la faveur d’une austérité imposée par ces mêmes marchés financiers. Nous pensons enfin à des pays comme la Grèce ayant dû brader ses actifs stratégiques pour avoir cédé aux sirènes de prédateurs comme Goldman Sachs ayant savamment manipulé ses comptes publics.

Comme l’argent n’a pas de valeur sacrée dans ce monde de la finance islamique, comme l’argent est simplement considéré pour ce qu’il est vraiment, c’est-à-dire un simple moyen de paiement, le degré de risque que sont prêts à assumer les investisseurs s’en trouve considérablement amoindri. Les actifs et les marchandises qui n’existent pas au moment de la signature du contrat ne peuvent tout simplement pas être vendus par anticipation. L’argent est toujours lié à l’économie réelle. En conséquence, ce principe simple décourage la spéculation et exclut tout produit dérivé, dont l’essence même est de traiter des actifs fantômes.

C’est la crise des subprimes comme la crise de la dette souveraine en Europe qui auraient pu nous êtres épargnées et c’est la volatilité exacerbée des marchés financiers, des matières premières et des denrées alimentaires qui auraient été nettement amoindrie si notre Occident s’était inspiré de l’esprit de la finance islamique.

Si la finance islamique ne compte aujourd’hui que pour 1% des actifs traités globalement, elle se développe à une cadence 50% plus accélérée que les autres produits bancaires traditionnels. Ernst & Young indique en effet que les instruments Sharia-compatibles atteignent actuellement 1,8 trillions de dollars et commencent même à attirer des investisseurs non musulmans séduits par la sécurité et par la faible volatilité de ces placements. Les investisseurs non musulmans sont même détenteurs de 80% des obligations islamiques dans un pays comme la Malaisie.

Des produits dont la compréhension est à la portée de tous, voilà ce que la finance islamique peut apporter à une finance occidentalisée décadente et imbue de ses prérogatives.»

 

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