Réduire son empreinte d'eau, un avantage concurrentiel


Édition du 22 Mars 2014

Réduire son empreinte d'eau, un avantage concurrentiel


Édition du 22 Mars 2014

Pierre-Olivier Charlebois, associé en droit de l'environnement et des changements climatiques chez Fasken Martineau.

Les rapports de responsabilité sociale des entreprises coises insistent sur les efforts entrepris pour réduire la consommation d'énergie et les émissions de gaz à effet de serre. L'utilisation responsable de l'eau, toutefois, est plus rarement abordée. Mais les choses pourraient bientôt changer.

C'est que l'eau, une ressource stratégique pour bien des entreprises, se fera de plus en plus rare. Cela s'explique par la croissance de la population mondiale et l'urbanisation, qui entraînent une demande accrue en eau. Les changements climatiques contribuent eux aussi à réduire la quantité d'eau disponible. On n'a qu'à penser aux sécheresses dans certains États américains, qui causent d'importantes pertes économiques aux entreprises, notamment aux producteurs agricoles.

Bien sûr, au Québec, l'eau ne manque pas. «L'abondance de l'eau et son faible coût font en sorte que les entreprises d'ici démontrent peu d'intérêt à réduire leur consommation», remarque Bastien Guérard, président de la firme Aqua-Climax, une firme spécialisée dans l'empreinte d'eau.

Il croit cependant que les entreprises devront évoluer sur cet aspect. D'une part, celles qui s'approvisionnent ou qui font des affaires dans des endroits de la planète où l'eau est rationnée ou en pénurie devront mieux gérer ce risque. D'autre part, la prise de conscience collective de la rareté de l'eau aura comme conséquence que les entreprises devront davantage montrer patte blanche en la matière.

«Les entreprises qui ont une faible empreinte sur l'eau pourraient avoir un avantage concurrentiel», estime Bastien Guérard. Signe de cette évolution : l'Organisation internationale de normalisation prévoit publier cette année la norme ISO 14046.2 sur l'empreinte d'eau.

L'eau plus réglementée

On remarque aussi une tendance à resserrer la législation sur l'eau. «Depuis quatre ans au Québec, plusieurs changements à la réglementation ont touché les entreprises», signale Pierre-Olivier Charlebois, associé en droit de l'environnement et des changements climatiques chez Fasken Martineau.

La Loi affirmant le caractère collectif des ressources en eau et visant à renforcer leur protection, adoptée en 2009, et les règlements qui y sont liés obligent ainsi les entreprises à déclarer tout prélèvement de 75 000 litres et plus par jour et à payer une redevance. Cette redevance, exigible depuis 2011, comporte deux taux distincts : 70 $ par million de litres pour les industries qui intègrent l'essentiel de l'eau à leurs produits (eaux embouteillées, jus et boissons, pesticides, produits chimiques, extraction de pétrole et de gaz, etc.) et 2,50 $ pour celles qui s'en servent dans leurs procédés et la retournent dans l'écosystème. «C'est le principe de l'utilisateur-payeur», dit M. Charlebois.

Cette loi prévoit aussi la possibilité de poursuivre quiconque cause des dommages aux ressources hydriques. «Même si c'était déjà possible en vertu de la Loi sur la qualité de l'environnement, on crée ici un recours spécifique à l'eau», poursuit l'avocat.

Les municipalités tendent également à se donner plus de mordant pour protéger l'eau. Par exemple, le règlement sur l'assainissement des eaux de la Communauté métropolitaine de Montréal, qui s'applique depuis 2009 dans 82 municipalités, est l'un des plus sévères de la province quant aux normes de rejet d'eaux usées.

Autre exemple : la tentative de la ville de Gaspé de bloquer certains forages sur son territoire par l'adoption en 2012 d'un règlement déterminant des distances séparatrices pour protéger l'eau potable. Elle a toutefois été déboutée en février dernier par la Cour supérieure qui a donné raison à Pétrolia, selon laquelle Gaspé n'avait pas juridiction sur les activités de forage. Dans les jours suivants, une dizaine de municipalités ont créé le Fonds intermunicipal de défense de l'eau en vue de se battre contre les grandes sociétés pétrolières et gazières.

Quant au gouvernement du Québec, il a déposé il y a déjà un an un projet de règlement qui interdit notamment tout forage à moins de 300 mètres d'un prélèvement d'eau et qui exige une étude hydrogéologique pour chacun. Les élections du 7 avril pourraient toutefois en retarder l'adoption.

«L'encadrement juridique pour protéger l'eau se renforce, constate M. Charlebois. Le problème, c'est que les gouvernements manquent des ressources humaines et financières nécessaires pour faire appliquer et respecter les lois.»

L'Organisation internationale de normalisation prévoit publier cette année la norme ISO 14046.2 sur l'empreinte d'eau.

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