Immobilier : Georges Marciano navigue en eaux troubles

Publié le 23/11/2009 à 08:31

Immobilier : Georges Marciano navigue en eaux troubles

Publié le 23/11/2009 à 08:31

Fondateur de Guess Jeans et candidat indépendant au poste de gouverneur de la Californie pour 2010, Georges Marciano aime les beaux tableaux, les bijoux et les voitures de luxe. Depuis 2006, il collectionne même les immeubles de prestige dans le Vieux-Montréal. L'homme d'affaires en a acheté pour un peu plus de 80 millions de dollars.

Mais l'ancien magnat du jean délavé a de graves ennuis avec la justice américaine. Un jury californien l'a condamné l'été dernier à verser 260 millions de dollars américains à d'anciens employés pour diffamation et souffrances morales. Certains d'entre eux ont demandé sa mise en faillite en octobre. Portrait d'un nouveau venu de l'immobilier montréalais... qui risque de tout perdre.

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Au 507, Place-d'Armes, des échantillons de moquette traînent sur le sol du neuvième étage. Georges Marciano a acheté le vénérable gratte-ciel du Vieux-Montréal en septembre 2008 pour 22 millions de dollars, et il met le décor au goût du jour. Des tableaux posés par terre attendent d'être accrochés.

" Il n'y a que moi qui puisse donner une âme à ce building avec ma passion ", nous a dit le Marseillais d'origine, dans un bon français émaillé d'anglais, lorsque nous l'avons rencontré le 29 octobre dernier. " Il est aussi beau que l'Empire State Building; je ferai tout pour qu'il soit aussi connu ! "

Construit entre 1929 et 1931, l'édifice art déco de 23 étages est la pièce maîtresse du portefeuille immobilier de Georges Marciano. Dix-huit immeubles, tous situés dans le secteur protégé de l'arrondissement historique de Montréal, entre le fleuve Saint-Laurent et les rues McGill, Saint-Antoine et Berri.

Fondateur de Guess Jeans en 1981, M. Marciano a vendu sa participation restante de l'entreprise à ses frères en 1993. Il s'est tourné vers la métropole québécoise en 2008 après avoir vendu ses immeubles de Beverly Hills, empochant de considérables profits. " Je cherchais un peu partout un marché où il n'y avait pas eu de surinflation, dit l'amateur de beaux immeubles. J'ai alors vu une annonce pour le 281, rue Saint-Paul Ouest. "

L'homme d'affaires l'a acheté sans hésiter et est tombé sous le charme de l'Old Montreal.

D'anciens employés demandent sa faillite

L'homme d'affaires se dit toujours intéressé à réaliser des acquisitions à Montréal, où il se trouve depuis plus de deux mois. Mais le 320, rue Notre-Dame Est, acquis en juin, pourrait être sa dernière. Le 27 octobre, trois de ses anciens employés ont demandé à la justice fédérale américaine de forcer la faillite de M. Marciano, ce qui aurait pour conséquence de le rendre insolvable.

Un jury de la cour supérieure de Californie l'a condamné l'été dernier à verser 260 millions de dollars américains en dommages-intérêts à six anciens employés et des proches de l'un d'entre eux pour diffamation et graves souffrances morales (severe emotional distress). Le procès défraie la manchette des pages mondaines à Los Angeles.

L'homme d'affaires a fait témoigner son comptable au procès. Ce dernier assure que son patron n'est pas en mesure de payer une telle somme. " J'estime la fortune personnelle de M. Marciano à environ 175 millions de dollars ", dit la déclaration.

Chose certaine, l'homme d'affaires refuse de se conformer au jugement. " Ils n'auront pas un sou ", dit M. Marciano, qui appelle de sa condamnation. Il refuse de signer une obligation qui l'engagerait à payer s'il perd de nouveau. Du coup, trois des anciens employés ayant obtenu des jugements contre lui demandent sa mise en faillite forcée. M. Marciano leur doit 95,3 millions au total, mais si les procédures vont de l'avant, le tribunal des faillites devra tenter de contenter les huit personnes qui ont obtenu gain de cause contre lui, pour un montant total d'au moins 260 millions.

Les audiences devraient commencer d'ici " deux à quatre mois ", dit Bradley Brook, avocat des trois anciens employés ayant présenté la requête au tribunal des faillites.

Rex Parris, un autre avocat des anciens employés de M. Marciano que nous avons contacté, ignorait que celui-ci possédait des actifs à Montréal. " Nous allons certainement tenter de saisir ces immeubles ", a-t-il avancé.

Si le tribunal américain prononce la faillite de l'homme d'affaires et vise ses beaux édifices montréalais, " le jugement pourrait être reconnu sans trop de difficultés au Canada ", dit Bernard Boucher, directeur du groupe de restructuration et d'insolvabilité du cabinet Blakes, à Montréal. En principe, rien n'empêcherait alors les anciens employés de M. Marciano de faire liquider son portefeuille d'immeubles, payé 80 millions de dollars canadiens, selon Me Boucher.

Une capacité d'emprunt compromise

Nous avons téléphoné à cinq avocats qui représentent M. Marciano. Ceux qui nous ont rappelé ont refusé de commenter la cause.

" Je refuse de faire faillite ", dit cependant le principal intéressé, âgé de 62 ans. Selon lui, ses ennemis tentent de faire dérailler sa campagne pour le poste de gouverneur de la Californie. " Vous êtes obligé de vous retirer si vous êtes en faillite, dit-il. Parmi ceux qui me poursuivent, il y en a énormément qui font de la politique... Ça va un peu trop loin ! "

Quoi qu'il en soit, M. Marciano pourra difficilement emprunter de nouveau, comme il le souhaite, afin de rénover ses immeubles montréalais, selon Robert St-Pierre, vice-président adjoint pour le Québec à la Financière First National. " Pour moi, il serait hors de question de lui accorder un financement, et je ne verrais pas une institution lui accorder un prêt. "

En mai, M. Marciano a d'ailleurs contracté deux hypothèques commerciales d'une valeur totale de 11,5 millions auprès de la Banque Royale. " Pas de commentaire ", dit la banquière responsable du prêt.

Un premier contact cordial

Le 29 octobre, Georges Marciano nous a invités dans ses bureaux du 507, Place-d'Armes pour une entrevue. Les discussions, cordiales, ont duré plus d'une heure. M. Marciano s'est même prêté à une séance de photos. L'entrevue a porté sur ses achats à Montréal et sur ses mésaventures judiciaires aux États-Unis.

Les Affaires a ensuite appelé ses avocats pour en savoir plus sur ses problèmes avec la justice. Sans succès : deux n'ont pas rendu nos appels; deux autres ont répondu qu'ils devaient d'abord consulter leur client.

Le 3 novembre, M. Marciano appelle, promet une rencontre avec ses avocats le jour suivant. Mais le lendemain, le journal reçoit plutôt une mise en demeure d'un cinquième avocat, Marc Rubin, du cabinet De Grandpré Chait, de Montréal. Après avoir accordé une entrevue en personne, M. Marciano somme le journaliste et l'hebdomadaire de ne rien publier à son sujet.

Puis, le même jour, son courtier Michel Bensmihen rappelle pour dire qu'il n'y aura pas de rencontre avec les avocats. " M. Marciano est occupé par tellement d'affaires qu'il ne peut pas. On vous a donné le numéro d'un avocat en entrevue, contentez-vous de celui-là. "

Quelques heures plus tard, une relationniste de Burson-Marsteller, une des plus grandes firmes de relations publiques au monde, joint le journal. La relationniste veut s'assurer que Les Affaires a toutes les informations nécessaires, dit-elle. " La position a toujours été qu'il n'a rien à cacher ", assure Julie Vallese. Elle ignorait que son client contestait notre droit de publication. Depuis, plus rien.

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