Contamination au pétrole: le lourd bilan du CN

Offert par Les Affaires


Édition du 01 Février 2014

Contamination au pétrole: le lourd bilan du CN

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Édition du 01 Février 2014

Du pétrole et des BPC prélevés au-dessus de la nappe phréatique du Technoparc de Pointe-Saint-Charles. Le CN contribue à la pollution du site, selon ses propres analyses. Photo: Hugo Joncas.

Tourbière non décontaminée, 10 ans après un déraillement et une fuite majeure de diesel, écoulements toxiques dans le fleuve Saint-Laurent, éviction d’inspecteurs environnementaux… Le Canadien National affiche un lourd bilan en matière de terrains contaminés, et Québec multiplie les procédures. Dans plusieurs dossiers, le CN collabore à reculons avec le ministère du Développement durable, de l’Environnement, de la Faune et des Parcs (MDDEFP). Nous avons enquêté sur certains des différends les plus sérieux entre la plus grande compagnie ferroviaire du pays et les autorités.

Consultez notre carte interactive et notre enquête sur les terrains contaminés.

Inspecteurs persona non grata à la gare de triage Garneau

En octobre, le CN a chassé des inspecteurs environnementaux de sa gare de triage Garneau, au nord de Shawinigan. «Le MDDEFP évalue actuellement les différents recours à sa disposition», écrit dans un courriel Geneviève Tardy, conseillère politique du ministre Yves-François Blanchet.

Québec enquêtait sur une décharge sauvage de traverses de chemin de fer traitées aux hydrocarbures quand est survenu l’accrochage. En entrevue dans ses bureaux du siège social du CN, le vice-président, services corporatifs et chef de la direction des affaires juridiques, affirme que les inspecteurs ont été reconduits hors du site parce qu’ils n’étaient pas convenablement accompagnés et équipés. «Ça prend un casque, des lunettes, des bottes… Je ne suis pas allé voir ce qu’ils avaient, mais ma compréhension, c’est qu’ils n’étaient pas accompagnés », dit Sean Finn.

Au MDDEFP, la porte-parole Stéphanie Lemieux assure au contraire que les inspecteurs portaient les équipements de sécurité nécessaires et étaient «accompagnés de représentants de la compagnie, comme il se doit».

Après cet événement, le Ministère a émis un avis de non-conformité contre le CN pour avoir entravé le travail de fonctionnaires. Une telle infraction est passible d’une amende pouvant atteindre 1,5 M$.

Sean Finn assure que les traverses de chemin de fer sont gérées dans le respect de l’environnement, mais le MDDEFP dit avoir trouvé des hydrocarbures aromatiques polycycliques, des composés chlorés et du fluoranthène dans le sol et l’eau autour de ces déchets.

Pétrole et métaux lourds dans le Saint-Laurent

Sous la gare de triage du CN à Pointe-Saint-Charles, à Montréal, les eaux souterraines infestées de pétrole se faufilent jusqu’au fleuve Saint-Laurent, sous le tristement célèbre site dit « Technoparc ». Le Ministère tente depuis 1997 de connaître l’état des eaux sous le vieux site ferroviaire datant du 19e siècle, toujours utilisé.

Jusqu’en 2013, l’entreprise refusait de livrer au MDDEFP la caractérisation des eaux souterraines de la gare de triage, connue sous le nom d’« antenne Butler ». Le CN prétendait que ces informations sont confidentielles.

En janvier 2012, l’ancien ministre Pierre Arcand envoyait une ordonnance au chemin de fer pour le forcer à dévoiler ses analyses des eaux souterraines de l’antenne Butler.

Dans le document, le cabinet du ministre précisait que l’entreprise a pompé de la nappe phréatique pas moins de 660 000 litres d’hydrocarbures entre 1997 et 2012 sous l’antenne Butler, soit plus de 4000 barils !

En réaction aux procédures du gouvernement, le CN a finalement envoyé au MDDEFP les résultats d’une première campagne d’échantillonnage, en juillet 2013. « Mais la réponse n’était pas satisfaisante, dit Hélène Proteau, directrice régionale à l’analyse et l’expertise au Ministère. On a fait d’autres demandes. » Le 5 décembre, le CN a fait parvenir d’autres détails au gouvernement. Les analyses démontrent que de l’azote ammoniacal et du baryum coulent vers les terrains de la Ville de Montréal situé en aval des eaux souterraines, puis vers le fleuve. Elles indiquent aussi qu’une couche d’hydrocarbures flotte à la surface de la nappe phréatique et se répand jusqu’aux lots municipaux.

«On travaille à remédier la situation», assure Sean Finn. Il fait remarquer que ce terrain a été utilisé comme dépotoir pendant un siècle. «Le CN reconnaît être responsable des contaminants provenant de ses activités.» Le vice-président ajoute que le chemin de fer «ne sait même pas» si le terrain lui appartient, puisque Québec revendique la propriété du site, construit au fil des décennies par-dessus le fleuve, sur des remblais de déchets.

Il n’a pas expliqué pourquoi le CN jugeait confidentielles les données sur ses eaux souterraines, en contradiction avec la Loi sur la qualité de l’environnement.

À quand la décontamination de la Grande-Plée bleue ?

Le CN cause aussi des maux de tête aux inspecteurs environnementaux à Lévis. En 2004, un «ultratrain» de diesel en provenance de la raffinerie Ultramar a déraillé dans le secteur de Beaumont. L’équivalent de plus de 1 760 barils se sont répandus dans une tourbière appelée «Grande-Plée bleue», un «écosystème exceptionnel» selon le MDDEFP, qui veut en faire une réserve écologique.

Le CN a récupéré les trois quarts du carburant déversé, mais Québec a exigé une décontamination complète. Le chemin de fer a fait parvenir un plan de réhabilitation en 2007, mais le Ministère l’a jugé incomplet et l’a rejeté.

En 2010, le MDDEFP a rejeté un nouveau plan de réhabilitation du CN. Le chemin de fer affirmait qu’une décontamination naturelle était en cours dans la tourbière. Mieux vaut laisser aller ce processus plutôt que de faire une intervention risquant d’abîmer davantage ce milieu fragile, selon les avis de spécialistes produits pour le CN et obtenus en vertu de la loi sur l’accès à l’information. «Il y a de la végétation qui a repoussé à cet endroit, justifie Sean Finn. Les experts nous disent : “N’allez pas là avec de la machinerie lourde pour déplacer de la tourbe et tuer les plants !” Le débat va se faire entre les experts.»

En attendant, près de 10 ans après le déversement, la tourbière de la Grande-Plée bleue n’est toujours pas nettoyée.

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