Un nouvel obstacle entre nos entreprises et l'État de New York

Publié le 16/03/2017 à 13:27

Un nouvel obstacle entre nos entreprises et l'État de New York

Publié le 16/03/2017 à 13:27

Par François Normand

L'État de New York veut se doter de sa propre clause dite du Buy American. Vendre à son gouvernement pourrait alors devenir plus difficile pour des centaines d'entreprises québécoises.

Depuis quelques mois, les trois corps politiques (le Sénat, la Chambre des représentants et le gouverneur) travaillent chacun sur trois dispositions budgétaires afin que l'État de New York se dote d'une politique d'achat local pour les contrats supérieurs à 100 000$US.

Cela viserait toutes les entreprises étrangères, incluant celles du Canada et du Québec.

Actuellement, des sociétés étrangères sont parfois soumises à des clauses du Buy American dans l'État de New York. Par contre, il s'agit de celles du gouvernement fédéral (quand Washington finance des projets), notamment dans le secteur de la construction.

La clause du Buy America du gouvernement américain (qui s'applique uniquement dans le transport public) est aussi parfois appliquée dans les projets de transport en commun.

Si elle est adoptée, l'initiative proposée pour le Buy American par le Sénat, la Chambre des représentants et le gouverneur démocrate Andrew M. Cuomo s'ajouterait donc à la législation fédérale déjà en vigueur.

Les manufacturiers canadiens sont inquiets

«C'est quelque chose qui nous inquiète», confie au bout du fil Martin Lavoie, directeur des politiques manufacturières chez les Manufacturiers et exportateurs du Canada (MEC).

Généralement, une politique d'achat local incite des entreprises étrangères à s'établir dans un pays ou à y transférer une partie de leur production -et des emplois.

Selon Martin Lavoie, ce type de politique peut aussi limiter les possibilités de croissance de PME canadiennes. «Cela devient problématique si ton marché est saturé au Québec et au Canada, et que tu peux difficilement exporter sur le marché américain. C'est bien beau la Chine, mais notre principal marché, ce sont les États-Unis!», dit-il.

L'enjeu est de taille pour le Québec, car l'État de New York est de loin notre premier marché d'exportation aux États-Unis.

En 2016, nos expéditions de marchandises se sont élevées à 6,6 milliards de dollars canadiens, selon l'Institut de la statistique du Québec (ISQ). Pour mettre les choses en perspective, c'est deux fois la valeur des exportations totales du Québec en Chine (3 G$CA).

Dans un communiqué publié en janvier, le gouverneur Cuomo a indiqué que sa proposition mettrait en place «la plus ambitieuse politique d'achat de produits fabriqués aux États-Unis élaborée par un État américain».

Chaque année, l'État de New York dépense des milliards de dollars pour acheter des biens et des services. Or, selon le gouverneur Cuomo, les retombées économiques aux États-Unis et dans son État sont insuffisantes.

«Les réglementations existantes accordent peu d'importance à ce que ce pouvoir de dépenser soit utilisé afin de soutenir les entreprises manufacturières américaines, dont beaucoup sont situées ici même, dans l'État de New York.»

La diplomatie québécoise est au front

Joint par Les Affaires, le délégué général du Québec à New York, Jean-Claude Lauzon, a indiqué que son équipe et lui mettaient les bouchées doubles afin de tenter de convaincre le Sénat, la Chambre des représentants et le gouverneur Cuomo de renoncer à cette proposition.

«De tous mes dossiers, c'est celui qui est le plus prioritaire», insiste le délégué général, qui s'est rendu à plusieurs reprises dans la capitale Albany afin d'y rencontrer des élus.

«On essaie de leur faire prendre conscience que les économies du Québec et de l'État de New York sont très imbriquées», dit-il, en précisant qu'il leur donne souvent l'exemple de Bombardier Transport.

Ainsi, des équipements sont assemblés à Plattsburgh (dans l'État de New York), des pièces et le design sont faits à La Pocatière (au Québec) et des systèmes sont élaborés à Pittsburgh (en Pennsylvanie, limitrophe de l'État de New York).

Jean-Claude Lauzon demeure optimiste malgré tout. Il croit qu'il est toujours possible de convaincre le Sénat, la Chambre des représentants ou le gouverneur Cuomo de faire marche arrière. Et ce ne serait pas une première fois.

En 2016, le New Jersey a voulu lui aussi inclure une proposition d'achat local dans son budget. La Délégation générale du Québec à New York a toutefois fait des représentations soutenues auprès de l'État, et l'a finalement convaincu de faire marche arrière. Le gouvernement canadien avait aussi fait des représentations.

Les MEC s'inquiètent aussi de la tendance qui semble s'installer aux États-Unis depuis l'élection de Donald Trump. Que l'État de New York veuille se doter d'un Buy American est une chose.

Mais si une vingtaine d'États américains se dotent un jour de leur propre politique d'achat local, les exportations canadiennes et québécoises seront vraiment à risque aux États-Unis, où le Canada achemine 76% de ses exportations ( 71% dans le cas du Québec).

 

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