Même si le deuxième budget du ministre Nicolas Marceau est mort-né en raison d'un rendez-vous électoral immiment, il s'avère instructif sur le plan budgétaire.
Oublions les petits engagements, qui ne survivront peut-être pas au budget que présentera le prochain gouvernement, et regardons les enjeux financiers de l'État et les stratégies présentées pour les respecter.
Premier constat, le gouvernement n'a pas de marge de manoeuvre réelle. Malheureusement, cette situation n'a pas empêché le gouvernement Marois d'annoncer en 44 jours des engagements de 2,1 milliards de dollars, selon une compilation de La Presse. Un geste irresponsable ? Certainement en partie, puisque des subventions sont destinées à acheter des votes, alors que d'autres appuient des projets discutables (comme la cimenterie).
Le gouvernement contrôle plutôt bien la croissance de ses dépenses, malgré la hausse annuelle prévue de 2 % des dépenses liées aux programmes pendant trois ans ; mais il y a une limite à ce qui peut être ajouté. Dans l'ensemble canadien, le Québec est de loin le plus généreux à l'égard de ses citoyens : droits de scolarité les plus bas, programme de garderie à 7 $/jour, assurance-médicaments universelle, congés parentaux universels d'un an, etc. Même les provinces les plus prospères ne se considèrent pas assez riches pour en offrir autant à leurs citoyens.
Le panier de programmes sociaux du Québec serait peut-être finançable si la croissance de son économie était forte. Or, celle-ci est anémique, ce qui nuit aux rentrées fiscales.
Une solution simpliste serait de vouloir accroître encore les impôts, comme a tenté de le faire le ministre Nicolas Marceau en octobre 2012. Il a dû reculerquant à son projet de hausser fortement et rétroactivement le taux marginal de l'impôt sur le revenu et des impôts sur les dividendes et les gains en capital. Après un débat musclé avec les milieux d'affaires, il a abandonné la rétroactivité, a fait passer de 24 % à 25,75 % le taux marginal maximum d'impôt sur le revenu et a porté de 200 $ à 1 000 $ la contribution santé pour les plus fortunés. Puisque les Québécois sont déjà de loin les plus taxés du Canada, ce serait encourager l'exode des plus riches que d'accroître les impôts payés par les particuliers.
Il n'y a pas davantage de marge du côté des entreprises, puisque celles-ci investissent déjà trop peu pour accroître leur productivité. Il faudrait au contraire réduire leur fardeau fiscal si on veut qu'elles agissent sur ce plan.
Peut-on attirer davantage d'investisseurs de l'extérieur ? Nous avons des ressources, une main-d'oeuvre instruite, des systèmes d'éducation et de santé de bonne qualité. Nous sommes créatifs, démocratiques et pacifiques.
Malheureusement, nous ne sommes pas assez accueillants. Les lois de la ministre Martine Ouellet sur l'activité et la fiscalité minières ont créé de l'incertitude et envoyé à l'industrie des messages inhospitaliers. Quand un investisseur norvégien nous dit qu'il préfère investir en Afrique («ils veulent exploiter leurs ressources, eux») plutôt qu'au Québec, cela en dit long sur l'image qu'on projette. Les projets de loi inutiles sur la langue (mis de côté pour le moment) et le port de signes religieux sont des irritants non négligeables pour des dizaines de milliers de personnes. L'indépendance du Québec, que propose toujours le Parti québécois malgré deux échecs référendaires, est une d'épée de Damoclès pour un fort pourcentage de la population.
Même si on reconnaît que la concurrence internationale en matière d'investissements est très vive, on se refuse à admettre que le capital est très frileux et très mobile. Pourtant, ce dernier a besoin de stabilité et d'un climat prévisible.
La position du gouvernement sur le pétrole sera interprétée favorablement. La hausse des tarifs des garderies à 9 $ en deux ans et leur indexation par la suite sont aussi de bons signaux.