Un budget modeste, prudent et rassurant pour les contribuables


Édition du 15 Février 2014

Un budget modeste, prudent et rassurant pour les contribuables


Édition du 15 Février 2014

Comme prévu, le ministre fédéral des Finances, Jim Flaherty, a présenté un plan budgétaire qui prépare celui de l'an prochain, au moment où nous serons dans une année électorale. En effet, les élections fédérales, qui sont à date fixe, devraient avoir lieu le 19 octobre 2015.

Le gouvernement aura alors à sa disposition un surplus estimé à 6,4 milliards de dollars pour l'exercice 2015-2016 et un autre de 8,1 G$ pour 2016-2017, ce qui lui permettra d'offrir aux Canadiens des baisses d'impôt et de nouveaux avantages, comme le fractionnement du revenu pour les familles ayant des enfants, promis l'an dernier.

Le ministre a inscrit un déficit de seulement 2,9 G$ pour l'exercice 2014-2015, mais c'est après avoir planifié une provision pour dépenses imprévues de 3 G$. Dans les faits, cela signifie que le budget est équilibré. Ce résultat est étonnant, car le déficit de l'exercice qui se terminera le 31 mars prochain est évalué à 16,6 G$. C'est toute une prouesse d'avoir réussi à ramener le budget à l'équilibre, puisque le déficit avait atteint 55,6 G$ en 2009-2010, lors de la récession qui a suivi la crise de 2008.

Un budget qui s'inscrit dans la continuité

C'est un budget frugal qui s'inscrit dans la continuité de ceux des années précédentes. On réduit les dépenses de fonctionnement des ministères de 4,5 G$, ou de 6 %, on diminue de 1 G$ l'ensemble des dépenses allouées aux programmes et on reporte certains achats d'équipements militaires. On demande aux retraités du gouvernement de contribuer davantage au financement de leur programme d'assurance santé. Leur cotisation passera ainsi de 25 % à 50 % du coût du programme. C'est grâce à ces compressions que le gouvernement peut continuer d'accroître ses transferts aux aînés et aux provinces.

Ottawa n'annonce aucun grand programme, mais on trouve dans le budget de nouvelles mesures d'aide à la formation de la main-d'oeuvre, qui coûteront 51 millions de dollars. Au total, c'est presque 2 G$ que le fédéral entend consacrer cette année à ses programmes d'aide à la main-d'oeuvre, mais le programme d'aide au développement des compétences en entreprise annoncé l'an dernier n'a toujours pas fait l'objet d'une entente avec les provinces. Puisque la formation de la main-d'oeuvre est de compétence provinciale, Ottawa aurait tort de ne pas transférer aux provinces qui le désirent l'administration de ce programme ou des crédits qui y sont associés.

De nouveaux programmes seront destinés aux handicapés et aux personnes atteintes de troubles de développement et d'autisme. De plus, des prêts seront offerts aux travailleurs qui feront l'apprentissage d'un métier, et on financera des stages pour les diplômés d'établissements postsecondaires dans des domaines dont la demande est forte.

Au total, les nouvelles dépenses du gouvernement ne seront que de 730 M$, ce qui est très faible historiquement. Certaines initiatives sont clairement alignées sur les budgets précédents. Ainsi, on consacrera 1,3 G$ sur deux ans à de nouvelles dépenses en infrastructures, notamment pour entretenir des ponts et pour financer les travaux préparatoires à la construction des nouveaux ponts Champlain et Windsor-Detroit.

Le ministre Flaherty a aussi dégagé une somme de 500 M$ destinée à la modernisation de l'industrie automobile. On peut penser que ce montant servira à appuyer la société Fiat qui envisage la construction à Windsor d'une nouvelle usine pour sa filiale Chrysler. Le gouvernement créera aussi un nouveau fonds (Apogée Canada) qui bénéficiera de crédits de 1,5 G$ sur dix ans pour promouvoir l'excellence en recherche dans les établissements d'enseignement postsecondaire.

Une des dettes les moins élevées parmi les pays du G7

Pour financer ses nouvelles dépenses sans nuire à l'équilibre budgétaire, le gouvernement a porté de 16 $ à 20,03 $ la taxe d'accise sur une cartouche de 200 cigarettes, ce qui lui rapportera 685 M$. Ottawa vendra aussi des actifs. Le gouvernement continuera de lutter contre l'évasion et l'évitement fiscaux, ce qui lui rapportera des revenus de 1,8 G$, de 2013-2014 à 2018-2019.

Grâce au faible niveau des taux d'intérêt, la dette du gouvernement atteindra 616 G$ le 31 mars 2014, en légère baisse sur ce qui avait été prévu, mais en légère hausse par rapport à l'année précédente. Si on additionne la dette fédérale nette et celles des autres gouvernements du pays, l'endettement net du secteur public canadien s'élève à 36 % du PIB, ce qui est de loin le plus faible niveau parmi les pays du G7, devant les dettes nettes de l'Allemagne (56 %), du Royaume-Uni (85 %), des États-Unis (87 %), de la France (87 %), de l'Italie (110 %) et du Japon (140 %).

Plusieurs critiqueront le manque de générosité du ministre. Il est toutefois rassurant de voir un gouvernement qui s'applique à gérer prudemment l'argent qu'il prend aux contribuables.

À propos de ce blogue

Tour à tour rédacteur en chef et éditeur du journal Les Affaires pendant quelque 25 ans, Jean-Paul Gagné en est l’éditeur émérite depuis 2007. En plus de publier un commentaire hebdomadaire dans le journal et de tenir un blogue dans LesAffaires.com, il participe à l’organisation d’événements et représente le journal dans les milieux d’affaires. Il est aussi appelé à commenter l’actualité dans d’autres médias et à prononcer des conférences. Jean-Paul Gagné a consacré sa vie professionnelle au journalisme économique. Avant son entrée aux journal Les Affaires, qu’il a contribué à relancer pour en faire la principale publication économique du Québec, il a passé une douzaine d’années au quotidien Le Soleil, où il était journaliste économique et cadre à la rédaction. Jean-Paul Gagné est diplômé en économie et en administration. Il a reçu de nombreuses marques de reconnaissance, dont les prix Hermès et Gloire de l’Escolle de l’Université Laval, le prix Carrière en journalisme économique de la Caisse de dépôt et placement et Merrill Lynch et le Prix du livre d’affaires remis par Coop HEC Montréal et PricewaterhouseCoopers. Il siège au conseil d’administration d’organismes sans but lucratif.

Jean-Paul Gagné

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