Normand Laprise, un "toqué" de qualité

Publié le 04/04/2009 à 00:00

Normand Laprise, un "toqué" de qualité

Publié le 04/04/2009 à 00:00

Par Suzanne Dansereau

Journal Les Affaires - Quand avez-vous su que vous vouliez être chef cuisinier ?

Normand Laprise - Adolescent, j'ai décroché un emploi de plongeur dans le restaurant d'un club de golf. J'ai réalisé que je m'étais toujours senti bien dans une cuisine. J'ai été élevé sur une ferme, où on apprend à respecter la terre, à reconnaître la fraîcheur des aliments et à travailler dur, sept jours sur sept. Le plaisir de cuisiner, je l'ai trouvé là. Enfant, j'aimais aider à mettre les tomates dans les pots Mason et descendre chercher les oignons dans la cave...

JLA - Quelles sont les influences qui vous ont marqué ?

N.L. - M. Abraham, mon patron du Café de la Paix à Québec. C'était un Parisien, un dur de dur ! Il m'a appris à être méthodique, à toujours ranger les choses au même endroit. J'ai compris que si on veut arriver à quelque chose, cela nécessite de l'organisation. Sinon, on peut y arriver parfois, mais pas toujours. En travaillant avec Jacques LePluart, du restaurant Marie-Clarisse, à Québec, j'ai appris à cuisiner avec un panier, c'est-à-dire en fonction des disponibilités de saison. On va au marché, on voit ce qu'il y a, et ensuite, on fait un menu. Lors de mon premier voyage en France, à Dijon, j'ai aussi compris l'importance de la solidarité entre les restaurateurs et les cultivateurs, qui n'existait pas au Québec et que j'ai voulu instaurer à mon retour. Là-bas, les restaurateurs s'assoient avec les producteurs, ils prennent un verre de vin, apprennent à se connaître, à se faire confiance, et c'est comme ça qu'ils font des affaires.

JLA - Vous vous distinguez justement dans votre approche des relations avec vos fournisseurs. Vous avez été le premier à mettre leur nom sur vos menus. On connaît votre ardeur au combat pour la traçabilité des aliments. C'est de là que cela vous vient ?

N.L. - Oui. Et c'est comme à la ferme : on sait d'où vient ce qu'on mange. Le cerf est celui de M. Boileau, etc. Avec le temps, je me suis bâti un réseau de fournisseurs fondé sur le sincérité, le respect et la confiance. Je ne dis pas moi, je veux ceci, mais d'abord qu'est-ce que tu as ? Si ce qu'ils font est de qualité, je leur garantis que je vais acheter auprès d'eux et, forts de cette garantie, ils ne me laissent pas tomber. S'ils me trompent une fois, c'est fini. Une fois la relation bâtie, on peut construire, travailler ensemble sur les produits. Mon premier critère est la qualité. Je ne travaille qu'avec des produits de qualité, souvent bio. Là-dessus, je suis intraitable. J'ai déjà dit que la seule raison pour laquelle j'ai voulu être propriétaire de mon restaurant, c'était pour ne pas avoir à me battre avec un comptable qui essaierait de m'empêcher d'acheter un produit à cause du prix... Si ce qu'on mange chez Toqué est bon, c'est parce que les produits avec lesquels je cuisine sont bons. Et ma façon de récompenser cette qualité, c'est de donner de la visibilité aux éleveurs et aux maraîchers. Plusieurs restaurateurs m'ont imité et j'en suis fier. Quand mes clients me remercient, je leur réponds c'est le producteur qu'il faut remercier ! Dites Merci à Diane Duquette, à Diane Viau, à Pierre-André Daignault... C'est dans ma philosophie de toujours les soutenir.

JLA - Quel genre de patron êtes-vous ?

N.L. - Une cuisine, c'est comme une armée. Ce n'est pas pour rien qu'on parle de brigade. Il faut une hiérarchie dans les communications. Il faut structure et discipline. Mais au plan personnel, la hiérarchie m'importe peu. Je demeure accessible. Quand c'est le moment de travailler, on travaille dur, dans l'ordre, l'organisation et la hiérarchie. Ensuite, quand c'est le moment de s'amuser, on s'amuse fort. Je suis exigeant. Je demande aux gens de commencer en bas de l'échelle - avant de cuire les viandes, ils doivent faire de la boucherie. Je les engage pour un minimum de deux ans, le temps nécessaire pour baigner dans la culture.

JLA - Depuis vos débuts, il y a plus de 15 ans, vous avez formé plusieurs chefs. Quel avenir voyez-vous pour eux ?

N.L. - Je veux les aider à se construire, à devenir eux-mêmes avec ce que je leur ai transmis. Le chef Martin Picard [maintenant propriétaire du restaurant Au pied de cochon, à Montréal] a appris de moi la rigueur, mais ce qu'il fait est différent de ce que vous trouverez chez Toqué. Je veux aussi permettre à mes apprentis de voyager dans de grandes cuisines du monde en se servant de ma réputation, comme Joël Robuchon l'avait permis. Et à 50 ans, le chef français a pris sa retraite, il n'a plus touché aux fours, mais il a ouvert quatre restaurants avec des jeunes qu'il avait formés.

JLA - Qu'est-ce qui, dans ce que vous avez accompli, vous rend le plus fier ?

N.L. - Que le Québec ait atteint une nouvelle étape de son évolution culinaire. Je suis aussi fier d'avoir bâti un réseau de fournisseurs et de restaurateurs qui privilégient la qualité et la fraîcheur des aliments d'ici. Bref, ce qui me réjouit, c'est d'avoir construit quelque chose qui vient d'ici et de le faire rayonner.

suzanne.dansereau@transcontinental.ca

À la une

Bourse: nouveaux records pour le Dow Jones et le S&P 500 Ă  Wall Street

Mis à jour le 28/03/2024 | lesaffaires.com, AFP et Presse canadienne

REVUE DES MARCHÉS. La Bourse de Toronto est en hausse et les marchés américains sont mitigés.

Ă€ surveiller: Microsoft, Apple et Dollarama

28/03/2024 | lesaffaires.com

Que faire avec les titres de Microsoft, Apple et Dollarama? Voici quelques recommandations d’analystes.

Bourse: les gagnants et les perdants du 28 mars

Mis à jour le 28/03/2024 | LesAffaires.com et La Presse Canadienne

Voici les titres d'entreprises qui ont le plus marqué l'indice S&P/TSX aujourd'hui.