Les entreprises québécoises doivent devenir plus grandes et plus productives

Offert par Les Affaires


Édition du 04 Juin 2016

Les entreprises québécoises doivent devenir plus grandes et plus productives

Offert par Les Affaires


Édition du 04 Juin 2016

Par François Normand

« Il faut que les petites entreprises soient capables d’aller à l’international », insiste la ministre de l’Économie, de la Science et de l’Innovation, Dominique Anglade.

Afin de réussir au Canada et à l'étranger, les entreprises québécoises doivent devenir plus grandes, plus innovantes et plus productives pour décrocher des contrats, au premier chef dans l'aérospatiale, affirme la ministre de l'Économie, de la Science et de l'Innovation, Dominique Anglade.

En entretien avec Les Affaires avant le dévoilement, le 30 mai, de la stratégie gouvernementale de l'aérospatiale (Québec injecte 250 millions de dollars sur cinq ans), la ministre a donné l'exemple de Sinters America et du Groupe DCM, deux fournisseurs québécois du secteur de l'aérospatiale, qui ont annoncé leur fusion le 6 mai. «On a fusionné deux entreprises pour être en mesure de faire face au marché international. C'est exactement ce qu'il faut faire dans l'aérospatiale», souligne Mme Anglade.

Forte de cette acquisition, Sinters America, qui fournit des services de conception et de production pour plusieurs fabricants d'équipements d'origine, a maintenant un carnet de commandes (notamment grâce à l'achat de DCM) qui compte des donneurs d'ordres comme Bombardier, Boeing et Airbus.

La stratégie de l'aérospatiale vise aussi à attirer d'autres équipementiers, aux côtés de Bombardier, Bell Helicopter, CAE et Pratt & Whitney, les quatre piliers de l'industrie québécoise.

Interrogée à savoir si Québec pourrait investir davantage pour soutenir directement Bombardier, la ministre Anglade souligne que son gouvernement a déjà largement participé en investissant 1,3 milliard de dollars dans la société en commandite du CSeries.

«Nous n'avons pas de plan pour investir davantage. Est-ce que cela veut dire qu'on pourrait trouver d'autres partenaires ? Peut-être», dit-elle, en insistant sur le fait qu'Ottawa doit lui aussi investir pour soutenir Bombardier.

Stimuler encore les exportations

Le gouvernement du Québec planche aussi sur une nouvelle stratégie sur les exportations, prévue cet automne.

Le contexte est plutôt favorable. En 2015, les exportations de marchandises du Québec ont atteint 82 G$, en hausse de 8,3 % par rapport à l'année précédente. C'est un record depuis 2006, selon l'Institut de la statistique du Québec.

La hausse la plus spectaculaire touche les États-Unis, où nos expéditions ont bondi de 12,3 %, à 59,4 G$. Par contre, elles traînent la patte dans l'Union européenne par rapport aux niveaux de 2008, et elles ont légèrement reculé en Chine en 2015. «Nous sommes contents, évidemment, mais on ne peut pas se satisfaire de ces résultats. Il faut pousser davantage la machine», affirme Dominique Anglade.

L'un des axes de cette stratégie sera d'aider les petites entreprises à atteindre une taille suffisante pour pouvoir exporter. «Il faut que les petites entreprises soient capables d'aller à l'international», dit-elle.

Les véhicules aériens, l'aluminium et les minerais sont les principaux produits exportés par le Québec. Ces trois secteurs bénéficient maintenant d'une stratégie propre, soit la stratégie de l'aérospatiale, la stratégie de l'aluminium et le Plan Nord. Selon la ministre, la future stratégie sur les exportations et la stratégie maritime (publiée il y a un an) créeront un environnement favorable pour aider les entreprises à exporter dans ces secteurs.

Combler les lacunes en commercialisation

Pour percer à l'étranger, les entreprises devront être plus innovantes. Et, selon Dominique Anglade, cela ne nécessite pas nécessairement davantage de R-D, mais plutôt de meilleurs processus pour appliquer les bonnes idées des laboratoires en usine. «C'est certainement la commercialisation, le problème. C'est là que le bât blesse», dit Dominique Anglade.

Selon elle, le Québec a tout intérêt à s'inspirer du modèle allemand, où les entreprises et les universités collaborent étroitement pour innover, notamment dans le secteur automobile.

L'institut Fraunhofer, un leader mondial de la recherche appliquée, est aussi une source d'inspiration pour la ministre. Le Fraunhofer réalise des mandats de recherche pour les gouvernements et les entreprises, tant allemandes qu'étrangères. Il été fondé en 1949 par les pouvoirs publics, le milieu universitaire et l'industrie. Ils voulaient en faire un outil pour relancer l'économie allemande en reconstruction au lendemain de la Deuxième Guerre mondiale.

Accroître la productivité

L'autre défi majeur sera d'accroître la productivité des entreprises qui veulent percer à l'international. Et pour Dominique Anglade, cela passe par une meilleure formation de la main-d'oeuvre et de meilleures technologies. Or, la barre est haute, car le Québec - et, du reste, le Canada - fait pâle figure en matière de productivité.

En 2014, la productivité du travail au Québec correspondait à 56,20 $ l'heure, selon le bilan 2015 du Centre sur la productivité et la prospérité de HEC Montréal. Par contre, elle s'élevait à 75,33 $ aux États-Unis, à 80,62 $ en Irlande et à 84,74 $ en Belgique.

La productivité québécoise n'augmente pas rapidement. De 1981 à 2014, elle a progressé en moyenne de 1,02 % annuellement. À titre de comparaison, celle de l'Irlande a bondi en moyenne de 3,43 % par an pendant ce temps.

Pourquoi le gouvernement Couillard réussirait-il là où les précédents gouvernements québécois ont échoué? Parce que Québec pose des gestes concrets, selon Dominique Anglade. Depuis trois ans, le gouvernement a investi 1,4 G$ dans le secteur manufacturier, dont 200 M$ pour le manufacturier dit «innovant». En avril, Québec a porté ce montant à 700 M$. «Il faut aussi mettre les moyens en place» pour stimuler la productivité, affirme la ministre.

Par contre, Mme Anglade admet que la faiblesse du dollar canadien - il a perdu 25 % de sa valeur par rapport au dollar américain depuis cinq ans - ne favorise pas l'achat de technologies à l'étranger, au premier chef aux États-Unis.

«On a raté un peu la période où le taux de change était à parité. Aujourd'hui, ce que je souhaite, c'est qu'on soit capable de se donner les moyens de faire des investissements, même si le huard n'est pas à parité.»

 

> Québec investira 250 millions de dollars sur cinq ans dans une stratégie de l’aérospatiale, notamment pour attirer de nouveaux maîtres d’œuvre et des fournisseurs. Source : Gouvernement du Québec

 

> Les exportations québécoises de marchandises ont totalisé 82 milliards de dollars en 2015, un record absolu. Source : Institut de la statistique du Québec

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