Système d'éclairage et de ventilation naturels, géothermie, dalles radiantes, eau de pluie récupérée, toit végétal : le projet du 740 Bel-Air, ce nouvel édifice de Montréal qui accueillera plusieurs centaine d'employés de cinq ministères ou organismes du gouvernement fédéral, intègre plusieurs innovations en matière de développement durable et d'éco-ingénierie. Pour Travaux publics et Services gouvernementaux Canada (TPSGC), instigateur du projet, cet immeuble constitue un prototype de bâtiment durable qui fera école. Les travaux de construction ont été amorcés en septembre 2004 et devraient être achevés en décembre 2005. "Le concept de développement durable doit maintenant être intégré dans tous nos projets importants de construction et de rénovation d'édifices", dit Georges Mezzetta, gestionnaire régional, développement durable et environnement, de TPSGC. Érigé sur le site d'une ancienne fonderie dans le quadrilatère formé par les rues Bel-Air, Saint-Antoine, Rose-de-Lima et Saint-Jacques, dans le quartier montréalais de Saint-Henri, l'immeuble d'une superficie de 15 700 m2 est construit au coût de 40 M$. Plus de 2 M $ sont attribuables aux composantes de développement durable, ce qui représente environ 5 % de l'investissement total. Toutefois,"en considérant la réduction des coûts d'exploitation, notamment par la réduction de la consommation d'énergie, on estime que l'investissement sera rentabilisé dans environ huit ans", souligne M. Mezzetta. Une économie d'énergie de 30 à 40 % Selon Marc Sabourin, gestionnaire de projets à TPSGC,"l'ensemble des solutions proposées permettra de réduire la consommation d'énergie d'environ 30 à 40 %", par rapport aux normes de référence en vigueur pour un bâtiment de même type. Pour ce faire, l'édifice utilisera la géothermie comme source principale de chauffage et de climatisation. Ce système, qui consiste à utiliser la température du sol pour chauffer et climatiser, compte aussi un bassin d'énergie. Cette sorte de banque d'énergie solide permet d'accumuler de l'énergie durant les périodes d'inoccupation."Le bâtiment dégagera moins de CO2 dans l'atmosphère", souligne M. Sabourin, ce qui contribuera à la réduction des gaz à effet de serre. L'installation d'un système de lames pare-soleil devant les fenêtres vise à optimiser les rayons solaires en hiver et à les réduire l'été, permettant ainsi de diminuer les besoins de chauffage et de climatisation. Autre nouveauté : les employés auront la possibilité d'ouvrir les fenêtres et pourront profiter d'une oasis de verdure avec un toit recouvert d'un sol végétal où sera notamment aménagée une terrasse. Les toits verts ont aussi l'avantage d'atténuer les effets de la chaleur et ainsi de réduire la climatisation. Les systèmes de ventilation, de chauffage et de climatisation sont composés de dalles radiantes,"grâce auxquelles il est possible d'accumuler de l'énergie dans la masse du béton et de planchers surélevés", explique Jacques De Grâce, associé principal de la société d'experts-conseils en bâtiment Pageau Morel et Associés, participant au projet. Parmi les autres particularités de l'immeuble, on note la présence d'une citerne souterraine pour la récupération des eaux de pluie qui serviront pour les toilettes et l'arrosage saisonnier. Cette réalisation est l'oeuvre d'un consortium d'architectes formé des firmes ABCP, Beauchamp et Bourbeau architectes et Busby Perkins + Will. L'équipe de design, outre Pageau Morel et Associés, comprend aussi la firme d'ingénieurs Saïa Deslauriers Kadanoff Leconte Brisebois Blais, de même que les architectes paysagistes du Groupe Rousseau-Lefebvre. Faire du neuf avec du vieux"La déconstruction de l'ancien édifice a aussi permis de recycler des matériaux qui seront réutilisés pour la construction du nouveau bâtiment", souligne M. Mezzetta, précisant que cela permet aussi la réduction des quantités de déchets à l'enfouissement. Par exemple, toutes les dalles de béton ainsi qu'une partie de l'armature, de l'acier structural et des métaux ont été récupérés, de même que 92 % des briques et 82 % du bois. Des matériaux récupérés de l'ancienne usine de General Motors à Boisbriand pourraient même servir à la construction du 740 Bel-Air. Pendant la période de la construction, qui amène aussi son lot de déchets de bois, carton, plastique, métal ou encore de béton,"nous avons installé des contenants de récupération", dit M. Sabourin. L'édifice accueillera la Gendarmerie Royale du Canada, la Défense nationale, Développement social Canada, l'Agence des services frontaliers du Canada et l'Agence du revenu du Canada. QU'EST-CE QUE LA CERTIFICATION LEED ? Le 740 Bel-Air sera l'un des premiers immeubles à recevoir la certification LEED Or au Québec. Ce cadre de référence pour l'évaluation de la performance écologique des bâtiments, appelé Leadership in Energy and Environmental Design (LEED), a été élaboré par l'organisme américain US Green Building Council. LEED définit le bâtiment vert selon un système de pointage et de crédits relatifs à six domaines : aménagement écologique des sites, gestion efficace de l'eau, énergie et atmosphère, matériaux et ressources, qualité des environnements intérieurs, innovation et processus de design. Dans le domaine matériaux et ressources, par exemple, la réutilisation des bâtiments, la conservation de murs, planchers et toits existants ou encore d'éléments intérieurs non structuraux donnent droit à des points ou crédits. L'évaluation conduit à une possibilité de quatre niveaux de certification : de base, argent, or et platine, selon le pointage obtenu. La certification LEED est maintenant exigée pour tous les nouveaux bâtiments appartenant à Travaux publics et Services gouvernementaux Canada, ainsi que par un nombre croissant de provinces et de municipalités. En avril 2003, la Société immobilière du Québec a adhéré au Conseil du bâtiment durable du Canada, qui administre au pays le système d'évaluation LEED depuis sa formation, en 2003. La création du Conseil du bâtiment durable vise à accélérer la conception et la construction de bâtiments écologiques au Canada."