L'industrie attend sa politique bioalimentaire


Édition du 06 Mai 2017

L'industrie attend sa politique bioalimentaire


Édition du 06 Mai 2017

Par Claudine Hébert

Le gouvernement libéral promet que le Québec aura sa politique bioalimentaire en 2018. Verra-t-elle pour autant le jour ?

Depuis l'automne dernier, le gouvernement québécois et les principaux acteurs des secteurs du milieu agricole, des pêches, de la transformation alimentaire, de la distribution et de la restauration participent à des consultations publiques pour élaborer une politique bioalimentaire québécoise.

L'industrie réclame une politique qui englobera les préoccupations en matière d'achats locaux, d'étiquetage, de santé et de qualité de la part des consommateurs. L'industrie souhaite également que cette politique vienne soutenir ses acteurs en matière d'investissements. Les consultations actuelles culmineront vers un sommet de l'alimentation prévu cet automne. Cela donnera lieu à la rédaction d'une politique, qui sera présentée au printemps 2018. Juste avant les prochaines élections provinciales.

«On espère que cette fois-ci ce sera la bonne», soulève Marcel Groleau, président général de l'Union des producteurs agricoles (UPA). En effet, depuis quinze ans, l'industrie a l'impression de figurer dans un scénario du «jour de la marmotte». Ses divers intervenants ont participé à plus d'une dizaine de consultations publiques. Trois projets d'une politique bioalimentaire ont même été rédigés. Dévoilés à quelques mois d'une élection, ils ont cependant tous été rejetés par le nouveau gouvernement élu.

«Ça ne fait pas sérieux. Québec doit adopter une politique bioalimentaire. C'est une priorité», maintient Sylvie Cloutier, présidente et directrice générale du Conseil de la transformation alimentaire du Québec (CTAQ).

Mme Cloutier tient à rappeler que la transformation alimentaire est le secteur manufacturier numéro un au Québec en ce qui a trait aux revenus (plus de 25 milliards de dollars [G$]) et au nombre d'emplois (près de 63 000 directs et 100 000 indirects). Pourtant, les dépenses en recherche et développement des entreprises agricoles et de transformation alimentaire québécoises ont diminué de 30 % entre 2008 et 2015. Elles sont passées de 199 millions de dollars (M$) à 139 M$ pour la transformation alimentaire et de 105 M$ à 73 M$ pour la production agricole, signale-t-elle.

Selon Statistique Canada, les dépenses en immobilisations dans le secteur agricole québécois sont passées de 496 M$ à 609 M$ entre 2006 et 2015. Une hausse de 23 %. Ce n'est pas suffisant, fait remarquer Marcel Groleau. Pendant la même période, en Ontario, elles sont passées de 722 M$ à 1,4 G$. Presque le double, indique-t-il.

«Sans le soutien de l'État, le secteur agricole peut difficilement composer avec la gestion du risque, qui représente le principal défi des producteurs», souligne le représentant de l'UPA. Aucune compagnie d'assurance privée, dit-il, ne veut assurer un producteur. Et ça prend le soutien de l'État pour aider les entrepreneurs agricoles à obtenir des prêts auprès des institutions financières, ce que permettra une politique bioalimentaire, estime-t-il.

L'État n'intervient-il pas déjà assez au sein du secteur agricole ? Marcel Groleau réplique rapidement. Il soulève que 100 M$ d'investissements au sein du secteur agricole génèrent plus de 1 040 emplois, soit trois fois plus que le secteur public pour le même montant investi. Il souligne que les secteurs de la production et de la transformation agroalimentaires au Québec rapportent chaque année plus de 4,6 G$ de revenus au gouvernement. «Si on déduit de ces revenus l'appui gouvernemental de 1 G$ dont nos secteurs bénéficient, notre contribution nette aux coffres publics représente 3,6 G$», indique Marcel Groleau. Très peu de secteurs rapportent autant au gouvernement pour chaque dollar investi, mentionne-t-il.

L'Association des détaillants en alimentation du Québec (ADA) souhaite elle aussi la mise en place d'une politique bioalimentaire. «On réserve des fonds de tiroirs à Aliments du Québec. En 2016, nos voisins ontariens ont investi 21 M$ dans des projets pour la promotion des produits alimentaires locaux. Ce n'est pas à nous, les détaillants, d'éduquer les consommateurs sur les bons choix alimentaires. C'est au gouvernement que revient ce rôle», soulève Florent Gravel, président de l'ADA.

Remarquez, le bilan économique bioalimentaire du Québec se porte relativement bien. Les exportations alimentaires ont franchi le cap des 8,3 G$ en 2016. Le double d'il y a dix ans. «On réussit à bien tirer notre épingle du jeu parce que le Canada a une bonne réputation internationale en matière d'alimentation. Nos règles de production et de transformation sont parmi les plus strictes du monde, et le pays affiche une agriculture beaucoup plus saine qu'ailleurs. Cependant, la concurrence s'installe. Rien n'est acquis dans notre secteur. Notre gouvernement a donc tout intérêt à profiter du momentum», soutient Sylvie Cloutier.

Et momentum il y a. Particulièrement sur la scène fédérale. Selon le président du conseil consultatif de la croissance économique pour le gouvernement Trudeau, Dominic Barton, de la firme de consultants McKinsey, l'agroalimentaire figure parmi les secteurs les plus porteurs du pays. «C'est assez rare que notre industrie bénéficie d'un tel appui. Un signal qui devrait pousser le gouvernement québécois à emboîter le pas», conclut la tête dirigeante du CTAQ.

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