Donald Trump ne changera pas, il «dirigera comme il est»


Édition du 14 Janvier 2017

Donald Trump ne changera pas, il «dirigera comme il est»


Édition du 14 Janvier 2017

[Photo : Shutterstock]

Ceux qui ont cru naïvement que Donald Trump allait oublier sa rhétorique outrancière une fois élu président doivent comprendre qu'ils se sont trompés.

Ce personnage hors norme ne changera pas. Il restera tel qu'il s'est révélé au cours de l'étonnante campagne électorale qui l'a propulsé à la tête du plus important pays du monde.

Trump est un leader-né, avec des qualités exceptionnelles et des défauts qui le sont tout autant. Il est visionnaire, ambitieux, travailleur et charismatique. Il a une confiance illimitée en ses moyens et il est doté d'une énergie exceptionnelle. Il est indépendant d'esprit et il ne doit sa fortune à personne. Idem pour son élection à la présidence des États-Unis, pour laquelle il s'est servi adroitement du Parti républicain.

Par contre, il a un très lourd passif. Le futur commandant en chef du pays le plus puissant est un vrai narcissique. Il se croit supérieur à tout le monde, il ment comme il respire, il n'en fait qu'à sa tête, il insulte et accuse sans ménagement et il ne respecte pas les conventions. Son manque de jugement le rend imprévisible, ce qui présente un danger certain sur le plan des relations internationales. Peu attiré par l'éthique et la déontologie, il ne craint pas les conflits d'intérêts et il ne se gêne pas pour contourner les lois. Il est guidé par trois impératifs : satisfaire son ego, exercer du pouvoir et faire de l'argent.

Donald Trump dirigera les États-Unis comme il est. Sa présidence ne sera pas ennuyante. Bien au contraire, elle va surprendre, inquiéter, créer des bouleversements sur le plan intérieur et changer les rapports de force entre les grandes puissances.

Voyons quelques indications de la façon dont il exercera ses pouvoirs et des conséquences qui pourraient en découler.

Nombreuses controverses à prévoir

Il faut prévoir des accrochages avec le Congrès. Les républicains sont majoritaires dans les deux chambres (52-48 et 241-194), mais Trump a peu de respect pour certains d'entre eux, qui n'en voulaient pas comme président. Sans gêne aucune, Trump a récemment utilisé un tweet pour renverser un vote de la Chambre des représentants qui aurait limité les pouvoirs du Bureau d'éthique parlementaire.

L'irresponsable «repeal and delay» de la loi sur l'assurance maladie, appelée communément l'Obamacare, que Trump a dénoncée avec vigueur et contre laquelle les républicains se sont battus avec acharnement, sera un nid de guêpes. C'est bien beau de vouloir abroger cette loi, mais il faudrait savoir par quoi la remplacer, ce qui est loin d'être évident, puisqu'aucun politicien responsable n'osera priver de protection les 20 millions d'assurés qui en bénéficient depuis son entrée en vigueur, le 1er janvier 2014. La très grande complexité de cette loi en fait un salmigondis dont il sera très difficile d'enlever un article sans répercussion sur les citoyens et sur le coût du régime. Maintenant qu'ils sont au pouvoir, les républicains réaliseront que la future «Trumpcare» sera la leur et qu'ils seront jugés par l'électorat pour ce qu'ils auront détérioré ou amélioré.

Les milliardaires (ils pèseraient 17 milliards de dollars), militaires et idéologues conservateurs que Trump a recrutés pour former son cabinet pourraient développer des relations difficiles avec le Congrès et la population. On y trouve un raciste notoire, un anti-syndical reconnu, des opposants au développement durable et à la réglementation financière, des financiers retors et un magnat du pétrole ami de Poutine. Autant de personnages sans expérience politique susceptibles de créer des remous et des crises.

La présidence de Trump n'échappera pas aux conflits d'intérêts. Il contrôlerait 500 entreprises et il a beaucoup d'investissements à l'étranger. La participation aux affaires de l'État de sa fille Ivanka et de son mari milliardaire Jared Kushner, qui a des liens avec des financiers étrangers, sera aussi une source de controverses.

Les déclarations controversées de Trump sur la Russie (éloge de Poutine), Israël (déménagement de l'ambassade américaine de Tel-Aviv à Jérusalem), Taïwan, la Chine et la Corée du Nord, entre autres, indiquent que le futur président n'a aucun complexe. Et comme il ne se fie pas aux services de renseignements de son pays, il est susceptible de se mettre les pieds dans les plats, de déstabiliser l'ordre mondial et de créer des crises qui pourraient avoir de graves conséquences.

Pour le moment, le Canada ne semble pas être sur son radar protectionniste. C'est toutefois un enjeu à ne pas négliger.

J'aime

Le projet de loi 130 déposé par le ministre Gaétan Barrette en décembre dernier vise à donner aux directions d'hôpitaux le pouvoir d'affecter des médecins. Si ce projet devient loi, la pénurie de chirugiens qu'a subie l'hôpital de Matane pendant la période des fêtes ne devrait pas se reproduire. Grâce à leur statut autonome, les médecins ne travaillent pas sous l'autorité de l'hôpital où ils exercent leur profession.

Je n'aime pas

Alors que la rémunération moyenne des 100 PDG les mieux payés parmi les sociétés inscrites à la Bourse de Toronto était déjà excessive, elle a atteint 9,6 M$ en 2015, une hausse de 6,8% par rapport à 2014. Elle représente 193 fois le salaire annuel moyen des Canadiens. Composée surtout d'actions (45%) et d'options (16%), qui donnent droit à un traitement fiscal plus avantageux que le salaire, cette rémunération a, de ce fait, un impact négatif sur les recettes fiscales de l'État.

À propos de ce blogue

Tour à tour rédacteur en chef et éditeur du journal Les Affaires pendant quelque 25 ans, Jean-Paul Gagné en est l’éditeur émérite depuis 2007. En plus de publier un commentaire hebdomadaire dans le journal et de tenir un blogue dans LesAffaires.com, il participe à l’organisation d’événements et représente le journal dans les milieux d’affaires. Il est aussi appelé à commenter l’actualité dans d’autres médias et à prononcer des conférences. Jean-Paul Gagné a consacré sa vie professionnelle au journalisme économique. Avant son entrée aux journal Les Affaires, qu’il a contribué à relancer pour en faire la principale publication économique du Québec, il a passé une douzaine d’années au quotidien Le Soleil, où il était journaliste économique et cadre à la rédaction. Jean-Paul Gagné est diplômé en économie et en administration. Il a reçu de nombreuses marques de reconnaissance, dont les prix Hermès et Gloire de l’Escolle de l’Université Laval, le prix Carrière en journalisme économique de la Caisse de dépôt et placement et Merrill Lynch et le Prix du livre d’affaires remis par Coop HEC Montréal et PricewaterhouseCoopers. Il siège au conseil d’administration d’organismes sans but lucratif.

Jean-Paul Gagné

Blogues similaires

Apprendre à tourner la page

Édition du 20 Janvier 2021 | Olivier Schmouker

CHRONIQUE. J’ ai une grande nouvelle que j’ai annoncée déjà il y a quelques jours sur notre site web.