Cannabis : les producteurs doivent travailler de concert

Offert par Les Affaires


Édition du 16 Juin 2018

Cannabis : les producteurs doivent travailler de concert

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Édition du 16 Juin 2018

Obtenir du financement est un défi majeur pour les petits et moyens producteurs de cannabis. [Photo: Agri-Médic ASP]

Licences, financement, expertise : la production de cannabis en vue de la légalisation n'a rien de simple. Quels sont les plus importants enjeux et défis qui inquiètent les petits et moyens producteurs québécois de cannabis, et comment pensent-ils pouvoir franchir ces obstacles ?

Pour Stéphane Papineau, propriétaire d'Agri-Médic ASP, un des plus grands défis a été d'obtenir le permis. La quatrième entreprise québécoise à avoir obtenu une licence de production de cannabis de Santé Canada, a mis quatre ans à y arriver. En effet, un producteur doit non seulement montrer à Santé Canada qu'il est capable de produire un cannabis sécuritaire et de qualité, mais il doit aussi démontrer que son site de production respecte les exigences de sécurité. « Il faut installer des systèmes de sécurité assez monstrueux, dit M. Papineau. Nous avons fait affaire avec une entreprise de sécurité qui compte 30 ans d'expérience, et notre projet faisait partie de leurs cinq plus grands projets jamais réalisés. »

Les caméras de sécurité qui surveillent le site de production, par exemple, doivent enregistrer en permanence. Tout ce qui est filmé doit aussi être conservé durant au moins deux ans. « Ça donne une quantité de données faramineuse, relate M. Papineau. On parle de 5 000 $ par mois en disques durs juste pour archiver tout ça. »

Depuis qu'il a obtenu son permis, à l'automne dernier, M. Papineau note que Santé Canada a certes assoupli ses exigences en matière de sécurité, mais, selon lui, celles-ci demeurent strictes et difficiles à respecter pour un petit ou un moyen producteur.

L'expertise en perspective

Monter un dossier de demande de licence pour Santé Canada demande beaucoup de connaissances. Idem pour la conception et la configuration des installations de production. « De la pousse à l'emballage en passant par les salles de culture, nous faisons tout et nous devons assurer l'hygiène et prévoir des méthodes de travail qui préviennent la contamination », explique M. Papineau. Les usines doivent notamment respecter les normes BPF (bonnes pratiques de fabrication), très rigoureuses, qui s'appliquent à la fabrication de médicaments. « C'est clair que c'est plus facile à faire pour une grande entreprise, dit M. Papineau. Quand vous disposez de 50 millions de dollars, c'est plus facile de payer des experts pour vous accompagner. »

C'est sans compter que les experts employables dans le domaine de la production de cannabis ne courent de toute façon pas les rues. « Si on exclut le recrutement de travailleurs issus du marché noir - on ne veut pas de ces gens-là en entreprise -, très peu de monde a de l'expérience dans la production de cannabis », dit M. Papineau.

Pour le moment, Agri-Médic ASP fait donc beaucoup de formation interne, mais son propriétaire estime que les écoles devront bientôt s'impliquer dans le marché en mettant sur pied des programmes pour soutenir les besoins de l'industrie.

Un financement difficile

Obtenir du financement est un autre défi majeur pour les petits et moyens producteurs, explique Marc St-Arnaud, le copropriétaire et chef de la direction de Green Joy, un autre producteur autorisé de cannabis. Il sera conférencier le 10 octobre à l'événement Marché du cannabis, organisé par le Groupe Les Affaires. « Règle générale, à moins d'avoir une licence de production et de vente, les institutions financières n'embarquent pas, qu'il s'agisse d'accorder du financement pour le fonds de roulement, pour les équipements ou pour le bâtiment. Et encore, avoir une licence ne garantit rien », dit M. St-Arnaud. Les banques attendent, selon lui, la légalisation. De même pour de nombreux investisseurs privés, qui patientent dans l'ombre.

Quelle solution voit-il aux défis des producteurs ? Selon lui, les petits et les moyens producteurs québécois devraient se regrouper. Il s'agirait, à son avis, de la meilleure façon de faciliter l'accès aux capitaux, de minimiser les délais d'obtention de licence de production et de vente, et de faire de l'industrie québécoise du cannabis médicinal un joueur important sur la scène mondiale.

Une personne qui veut devenir producteur et qui dispose d'une certaine quantité d'équité, par exemple, mais qui n'a pas de licence, pourrait ainsi travailler avec Green Joy, explique M. St-Arnaud.« Cette personne-là pourrait venir nous voir et investir avec nous. En échange, nous demanderions une seconde licence et pourrions ensuite ouvrir un deuxième site de production là où elle voulait au départ s'installer. »

M. Papineau, d'Agri-Médic ASP, estime lui aussi qu'une plus grande collaboration entre les petits et moyens producteurs québécois pourrait se révéler une solution gagnante pour tous. Il dit être actuellement en pourparlers avec d'autres entrepreneurs qui seraient intéressés à se regrouper, et pourrait dans le cadre d'une telle association fournir de l'expertise non seulement sur l'obtention de licences, mais aussi sur la culture et la phase de lancement d'entreprise. « Il faut faire quelque chose, dit-il. J'essaie de trouver des solutions parce que vraiment, en ce moment, au Québec, on est en train de perdre le marché au détriment de l'Ontario et de la Colombie-Britannique. Si on se rassemble, on peut s'entraider. »

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