La vente de Rona est «une catastrophe économique»

Publié le 03/02/2016 à 16:49

La vente de Rona est «une catastrophe économique»

Publié le 03/02/2016 à 16:49

Par Matthieu Charest

L’annonce de l’achat de Rona par l’américaine Lowe’s a suscité de vives réactions dans tout le réseau qui gravite autour de l’entreprise. Si certains fournisseurs sont catastrophés, d’autres affichent un certain optimisme.

Trois fournisseurs, trois opinions

Afin de prendre le pouls des fournisseurs québécois de Rona et d’obtenir des commentaires sans filtres, Les Affaires a promis l’anonymat à trois dirigeants d’entreprises. S’ils partagent le même client, leurs réactions varient du tout au tout.

«C’est une catastrophe économique ce qui vient de se passer, lance le premier. Nous allons perdre le tiers de nos ventes et le Québec va perdre beaucoup d’emplois dans le secteur manufacturier. La Caisse de dépôt et placement devrait agir et les Libéraux à Québec aussi. Mais ils ne le feront pas», ajoute-t-il, furieux.

Le deuxième fournisseur important que nous avons contacté s’est aussi avoué inquiet. «C’est un peu dommage pour le Québec [de perdre un fleuron]. Et je n’ai aucune idée de ce que la transaction va causer comme conséquences. En ce moment, nous sommes surpris, un peu sous le choc. Mais bon, il fallait s’y attendre, ce n’est pas la première fois que Lowe’s tente d’acheter Rona».

Le troisième s’est montré beaucoup plus optimiste, «je ne suis pas inquiet du tout, nous sommes déjà en relation avec les deux bannières et les deux étaient déjà de bons clients. De toute façon, ce n’est pas parce que nous sommes québécois que Rona nous faisait la charité. Rappelez-vous quand Home Depot a débarqué, on a entendu toute sorte d’histoires… Et de toute façon, je ne crois pas du tout que Lowe’s a mis beaucoup, beaucoup d’argent pour acheter Rona simplement pour démanteler l’entreprise».

L’incertitude plane pour les «petits» magasins

«Nous ne sommes pas inquiets à court terme, affirme Richard Darveau, président et chef de la direction de l'Association québécoise de la quincaillerie et des matériaux de construction (AQMAT). Mais à terme, oui, il y a de l’incertitude. Les dirigeants de Lowe’s laissent entendre qu’il n’y aura pas de changements, qu’ils vont incorporer le «modèle Rona» [avec des magasins affiliés, notamment] qui est différent du leur, à leur structure. Mais ce n’est pas naturel pour eux. Ça n’existe pas dans leur modèle d’affaires.»

Le côté positif de cette transaction, poursuit-il, «c’est que c’est une superbe occasion pour les fournisseurs d’ici de s’étendre sur les marchés américains et mexicains. La vraie incertitude, c’est ce qui va se produire avec les petits marchands, les petits commerces affiliés».

Les magasins affiliés

«Si nous ne faisons pas partie des plans de Lowe’s, l’entreprise ferait une grosse erreur, croit Éric Paquet, propriétaire de la Quincaillerie Corriveau à Québec, qui est affiliée à Rona. Je pense qu’ils ont besoin de nous. Mais advenant le contraire, s’ils ne veulent pas de petits magasins comme nous, nous avons d’autres possibilités, comme nous affilier à Home Hardware ou à Castle. C’est sûr qu’on ne sait pas ce qu’ils [Lowe’s] ont en tête. Mais je pense qu’avec eux, nous pourrions être plus grands, plus forts».

Pour un autre magasin affilié qui a préféré rester anonyme, la nouvelle de la transaction «est arrivée comme une bombe ce matin. Je ne sais pas si nous sommes dans leurs plans, nous n’avons aucune idée de comment ils vont vouloir nous gérer. La nouvelle nous préoccupe dans le sens où l’on veut savoir ce qui va se passer».

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