Mitsubishi s'attaque au marché des jets régionaux avec confiance

Publié le 02/04/2011 à 00:00, mis à jour le 25/06/2019 à 12:24

Mitsubishi s'attaque au marché des jets régionaux avec confiance

Publié le 02/04/2011 à 00:00, mis à jour le 25/06/2019 à 12:24

Hideo Egawa, président de Mitsubishi Aircraft Corp. Photo: Bloomberg

Sur le quai de la gare de Nagoya, à quelque 260 km de Tokyo, un large panneau d'affichage célèbre la venue du Mitsubishi Regional Jet (MRJ), en voie de devenir la prochaine fierté industrielle d'un Japon encore ravagé par le séisme du 11 mars.

L'avion de Mitsubishi semble le plus sérieux des nouveaux concurrents auxquels Bombardier devra faire face au cours des prochaines années dans le créneau des avions régionaux de 70 et 90 places. D'ici la fin de la décennie, au moins cinq entreprises attaqueront ce marché que se partagent actuellement Bombardier et la brésilienne Embraer.

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" Qu'à cela ne tienne. Tandis que les Russes (Sukhoi) tenteront de vendre leurs avions aux Russes et les Chinois (COMAC) aux Chinois, avec Embraer et Bombardier, nous nous partagerons le reste de la planète ", a répondu Hideo Egawa, président de Mitsubishi Aircraft Corporation. Nous l'avons rencontré au Japon avant le séisme, et il nous confirmait ses propos par courriel quelques jours après la catastrophe. Un discours qui en dit long sur la confiance des Japonais.

À l'entrée de la salle d'exposition du siège social de Mitsubishi Aircraft Corp, à Nagoya, devant des répliques grandeur nature du MRJ, un tableau expose les principales caractéristiques de l'appareil, comparées à celles des avions d'Embraer et à celles du Canadair Regional Jet (CRJ) de Bombardier.

Un couloir central plus large, plus d'espace pour les jambes, des compartiments pour les valises à la fois plus spacieux et moins encombrants pour la tête, des sièges plus larges... La comparaison n'est pas à l'avantage des deux rivaux de Mitsubishi Aircraft.

Des partenaires de taille

Fort de l'appui de ses partenaires financiers, dont Toyota (10 %), Mitsubishi (10 %), Sumitomo Corporation (5 %) et Mitsui & Co. (5 %), Mitsubishi Aircraft s'est trouvé des alliés technologiques de taille : Rockwell Collins pour les systèmes d'avionique, Parker Aerospace pour les systèmes hydrauliques, Hamilton Sundstrand pour les systèmes électriques, Nabtesco (contrôle de vol), et Sumitomo (trains d'atterrissage).

L'entreprise se vante aussi de pouvoir compter sur les services de la canadienne CAE, qui vient de signer un contrat de formation de dix ans avec Mitsubishi ; sur l'aide de Boeing, dans le service après-vente ; et aussi sur Pratt & Whitney, qui fournira au MRJ un moteur de la même famille que celui qui équipera les futurs avions CSeries de Bombardier. Moins bruyants, ces moteurs se veulent également moins énergivores et moins polluants que leurs vis-à-vis.

Enfin, Mitsubishi Heavy Industries, la maison mère, se chargera de la fabrication du fuselage, des ailes, de l'empennage et de l'assemblage final de l'appareil, des tâches qu'elle remplit depuis des années pour nombre d'avionneurs, dont Boeing, Embraer et... Bombardier.

Des retards possibles

Bombardier ne s'empêche pas d'ordinaire de soulever les points faibles des avions de ses concurrents. Elle refuse néanmoins de qualifier ce nouvel appareil de quelque manière que ce soit, si ce n'est pour dire, par la voix de sa porte-parole Haley Dunne, que le MRJ pourrait devenir un concurrent important de sa gamme CRJ si, et seulement si, ce nouveau venu pouvait finir par voler... Une référence à peine voilée aux difficultés que pourrait avoir l'entreprise à respecter son échéancier.

De plus, Mitsubishi est revenue sur son intention d'équiper son appareil d'ailes en matériaux composites ; le genre de changement qui laisse présager des problèmes plus profonds, soutient un analyste de l'industrie, sous le couvert de l'anonymat.

Pour l'heure, le premier vol du MRJ est prévu pour le deuxième trimestre de 2012, et sa première livraison, pour le premier trimestre de 2014. Un échéancier inchangé malgré le tremblement de terre qui a frappé tout le nord-est du Japon. Minimisant l'importance de nouveaux délais dans la livraison de l'appareil, le spécialiste de l'industrie, Keith Meredith, d'Aeroinsight, rappelle que si Mitsubishi devait repousser à nouveau la date de livraison des premiers avions, il ne serait certainement pas le premier constructeur à le faire. " Ils le font tous ", dit-il.

Ce qui importe probablement le plus pour Mitsubishi Aircraft est d'accroître son carnet de commandes. À ce jour, l'entreprise ne compte que sur une première commande ferme de 15 appareils du transporteur All Nippon Airways (ANA), assortie de 10 autres appareils en option, et d'une deuxième commande de 100 appareils, dont 50 en option, de l'américaine Trans State Holdings.

M. Egawa s'attend à vendre un millier de ces appareils d'ici 30 ans, et ainsi s'emparer d'environ 20 % des ventes mondiales d'avions régionaux. Car après les avions de 70 et 90 places, Mitsubishi ne s'arrêtera pas là. Selon son président, " ce n'est qu'une première étape " avant de s'aventurer dans le marché des avions de 100 places et plus. Un autre marché cher à Bombardier.

Ce reportage a été réalisé grâce à la Bourse Québec-Japon, décernée à Martin Jolicoeur par la Fédération professionnelle des journalistes du Québec, le Foreign Press Center of Japan et le ministère des Relations internationales du Québec.

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