60 secondes avec Jacques Roy, de HEC Montréal: «Il faut reprendre le contrôle d'Aéroports de Montréal»


Édition du 26 Avril 2014

60 secondes avec Jacques Roy, de HEC Montréal: «Il faut reprendre le contrôle d'Aéroports de Montréal»


Édition du 26 Avril 2014

«Il faut reprendre le contrôle d'Aéroports de Montréal» - Jacques Roy, de HEC Montréal

Jacques Roy est directeur du Département de gestion des opérations et de logistique, HEC Montréal
Il est l’un des experts les plus respectés en aviation civile au Canada. Pour le compte de l’Institut sur la gouvernance d’organisations privées et publiques (IGOPP), il vient de cosigner, avec Michel Nadeau, « La gouvernance des aéroports au Canada : enjeux et recommandations ».

Plus tôt cette année, vous avez coécrit une étude portant sur la gestion des grands aéroports canadiens, dont ceux de Montréal et de Mirabel. Quels sont les aspects les plus méconnus et surprenants de leur gestion ?

Les aéroports, comme ceux de Montréal et de Mirabel, sont des biens publics qui ont été payés par les contribuables, mais dont la gestion a été confiée à des sociétés privées en 1992. Ces sociétés, comme Aéroports de Montréal (ADM) au Québec, ne sont tenues de rendre des comptes à personne, ni aux usagers, ni à leurs représentants élus de quelque palier gouvernemental que ce soit. Ottawa demeure le seul propriétaire de ces équipements stratégiques, mais, à l'exception des baux avec Transports Canada, leur gestion n'est soumise à aucun examen ou mécanisme d'approbation extérieur. Résultat : les gouvernements n'ont étrangement aucune emprise sur les orientations de ces organismes, lesquels échappent en plus à la Loi sur l'accès à l'information.

Concrètement, quelles sont les conséquences ?

Elles se font sentir de diverses manières. La plus évidente concerne la hausse des frais d'améliorations aéroportuaires (FAA). Entre 1997 et 2010, ils sont passés de 10 à 25 $ par passager, des hausses de 150 %, imposées sans consultation aucune. Mais il y a bien plus grave : même les orientations et les choix d'investissements importants échappent aux gouvernements. Par exemple, la navette entre le centre-ville et l'aéroport, une idée dont ADM fait la promotion depuis des années ; il suffit pourtant de 15 minutes pour constater que ce qu'on nous présente comme incontournable n'a ni queue ni tête. Et qu'en est-il des milliards investis à Dorval ? Ou de ce nouveau projet de détruire l'aérogare de l'aéroport de Mirabel ? Une autre décision prise sans débat public, malgré son importance capitale pour l'économie du Québec. Après ce qu'il nous a coûté, on ne démolirait jamais le stade olympique sans discussion. Pourquoi serait-ce différent pour l'aérogare de Mirabel ?

Comment corriger le tir ?

Ottawa pourrait profiter d'une baisse des loyers souhaitée par les aéroports, pour exiger en échange un plus grand droit de regard sur tout projet, disons, de plus de 20 M$ ou une hausse des frais. Comme le fait la Régie de l'énergie avec Hydro- Québec, les décisions des aéroports seraient soumises au regard d'un organisme indépendant qui pourrait poser des questions, exiger des réponses et, au besoin, les renvoyer à leurs devoirs.

Et si le fédéral ne voulait plus se mêler de la gestion des aéroports ?

On pourrait lui offrir de les céder aux villes, Montréal ou la Communauté métropolitaine, par exemple, comme il l'a fait avec les aéroports des plus petites agglomérations. Une ville-région pourrait ainsi acquérir son aéroport en le payant, comme le loyer d'ADM, à même les revenus qu'elle tirerait de ses activités. À terme, Montréal deviendrait propriétaire d'un actif majeur pour son développement. Et si elle jugeait important de profiter de vols directs vers l'Asie, elle pourrait subventionner la venue d'un transporteur asiatique, chose qu'ADM ne semble pas envisager.

C'est faisable, tout ça ?

Absolument. Avec un maire comme Denis Coderre, déjà critique à l'endroit de la gestion d'ADM et décidé à redonner à Montréal les moyens de son développement, tous les espoirs sont permis.

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14 G$ - Somme investie dans des améliorations aéroportuaires au Canada depuis 1992.
Source: IGOPP, « La gouvernance des aéroports au Canada : enjeux et recommandations », 2014

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