L'économie sociale, un acteur de 2 milliards

Publié le 28/02/2009 à 00:00

L'économie sociale, un acteur de 2 milliards

Publié le 28/02/2009 à 00:00

Par Pierre Théroux

Le matin, vous quittez votre coopérative d'habitation et laissez vos enfants au CPE du quartier. Arrivé au bureau, café équitable à la main, vous vous installez devant l'ordinateur d'occasion acheté dans une entreprise d'insertion du parc Angus. Vous allez ensuite dîner avec des collègues au resto Robin des Bois. En fin de journée, vous profitez du service de partage de voiture Communauto pour faire vos courses à la coop, avant d'aller voir un film au cinéma Beaubien.

"On ne s'en rend pas toujours compte, mais l'économie sociale fait partie de notre vie de tous les jours", dit Édith Cyr, présidente du Comité d'économie sociale de l'Île de Montréal.

Jugée marginale, l'économie sociale est pourtant devenue un acteur important de l'économie montréalaise. Ce secteur d'activité y génère annuellement des revenus de 2 mil- liards de dollars et emploie plus de 60 000 personnes. Sans compter les milliers de bénévoles qui permettent aussi à l'économie sociale d'occuper une place croissante dans la métropole. "L'économie sociale est un secteur vital qui contribue de façon significative au développement de Montréal", affirme Mme Cyr.

Longévité des entreprises

Le premier Portrait statistique de l'économie sociale de Montréal, publié en octobre 2008, témoigne de l'ampleur de l'économie sociale dans la région.

L'étude, réalisée par la Chaire de recherche du Canada en économie sociale de l'UQAM pour le compte de la Conférence régionale des élus (CRE) de Montréal, répertorie quelque 2 360 employeurs qui fournissent 61 500 emplois dans plusieurs domaines.

Le secteur Santé et services sociaux est le plus important générateur de revenus, représentant plus du tiers des 2 milliards de dollars de revenus totaux. Viennent ensuite les secteurs Arts, culture et communications (13 %) et Loisirs, tourisme et hébergement (13 %). "Ce portrait nous permet de mieux connaître les différents secteurs de l'économie sociale, tout en ayant la possibilité de mieux orienter nos actions futures", commente Édith Cyr.

L'étude révèle aussi "la remarquable longévité de ses établissements, d'un âge moyen de 19 ans", souligne Marie J. Bouchard, titulaire de la Chaire de recherche et professeure au Département d'organisation et ressources humaines de l'ESG UQAM.

Plus du tiers des entreprises déclarent avoir connu une croissance de leurs revenus au cours des trois dernières années, tandis que près de la moitié affichent une stabilité.

Par ailleurs, près de la moitié des établissements ont une mission sociale différente de leur activité économique. Par exemple, un fabricant de meubles s'intéresse principalement à la réinsertion de jeunes ayant décroché du marché du travail.

Opération sauvetage

La crise pourrait recéler différentes occasions d'affaires. "L'économie sociale évolue en identifiant des besoins, en se mettant notamment au service des personnes ou des communautés", dit Mme Cyr.

Les questions environnementales et de développement durable ont justement donné naissance ces dernières années à plusieurs projets d'entreprise sociale, souligne-t-elle.

Le cinéma Beaubien est un exemple d'entreprise d'économie sociale mise sur pied pour servir la communauté. Menacé de fermeture par la multinationale Cineplex qui exploitait cet établissement établi depuis 1937, ce cinéma aujourd'hui indépendant continue toujours d'animer le quartier grâce à la mobilisation d'un groupe de résidents et de commerçants qui sont venus à sa rescousse.

On peut dire mission accomplie : l'organisme sans but lucratif créé en 2002 a maintenu, et même créé, des emplois tout en réussissant à accroître son achalandage et en assurant des retombées pour les commerçants environnants.

En janvier, le cinéma inaugurait deux nouvelles salles, concluant ainsi d'importants travaux de construction et de rénovation ayant nécessité des investissements d'environ 1,8 million de dollars.

Mêmes défis

L'économie sociale prend plusieurs formes : coopératives, organismes sans but lucratif, entreprises privées, incorporées ou non. Des entreprises pour qui les retombées sociales et les valeurs passent avant les résultats financiers.

"C'est une manière d'entreprendre autrement qui a aussi les mêmes défis de financement, de création d'emplois, de développement de marché", note Édith Cyr, elle-même directrice de Bâtir son quartier, un groupe de ressources techniques voué au développement de l'habitation communautaire à Montréal.

Fondé il y a 30 ans, l'organisme regroupe une trentaine de personnes et compte à son actif plus de 8 000 logements communautaires, coopératifs ou sans but lucratif, réalisés sur l'ensemble du territoire de l'île de Montréal.

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