Libre-échange avec l'Europe: le Québec a laissé tomber ses artistes

Publié le 22/11/2013 à 05:50

Libre-échange avec l'Europe: le Québec a laissé tomber ses artistes

Publié le 22/11/2013 à 05:50

Le 18 octobre dernier, le gouvernement canadien et la Commission européenne ont conjointement annoncé une entente de principe sur l’Accord économique et commercial global (AÉCG). Or, pour Alexandre L. Maltais, chargé de projet, détenteur d’un baccalauréat en relations internationales et en droit international de l’UQAM et d’un Master en droit international de l’Institut de Hautes Études Internationales et du Développement de Genève, en donnant son appui à cet accord le Québec a non seulement laissé tomber ses producteurs de fromages, ses artistes aussi.

 M. Maltais est catégorique: le Québec paie cher son accès au marché européen.

 «Cet accord de libre-échange a été négocié dans des conditions très défavorables pour le Canada, encore plus pour le Québec. Le Canada s’est lancé dans ce processus de négociations dans une position de demandeur, mais aussi de joueur 10 fois plus petit que l’UE», explique M. Maltais, un consultant en commerce et affaires internationales qui s’intéresse aux aspects juridiques du commerce et de l’investissement étranger, à l'impact des accords commerciaux sur le patrimoine culturel et au développement.

 Selon lui, cette position de faiblesse s’est accentuée lorsque les négociations ont cessé d’avancer entre 2012 et 2013 et que l’UE s’est tournée vers les États-Unis pour lancer des pourparlers.

 L’Union européenne a par conséquent réussi à atteindre tous ses objectifs, estime M. Maltais: accès aux marchés publics, ouverture du marché canadien aux produits agricoles, etc.

 «Il est regrettable que tous les grands partis politiques québécois aient approuvé l’accord sans même avoir lu les textes finaux, affirme M. Maltais. Le Parti Québécois, à l’époque où il occupait les bancs de l’Opposition, avait une position beaucoup plus critique.»

 Dans son analyse, publiée dans le bulletin de l’Institut de recherche en économie contemporaine, M. Maltais aborde trois thèmes au coeur des négociations : l’ouverture des marchés publics, la culture et l’agriculture.

 Libéralisation des marchés publics

 Après avoir résisté aux demandes des Européens, le Québec a finalement accepté de laisser le champ libre à la concurrence étrangère dans l’octroi des contrats publics de tous les ministères et organismes gouvernementaux, des municipalités et des réseaux de l’éducation, de la santé et des services sociaux, des entreprises gouvernementales telles que la SAQ et Loto-Québec et surtout, d’Hydro-Québec.

 Pourtant, la libéralisation des marchés publics réduira la flexibilité des règles d’octroi des contrats publics, empêchera les autorités publiques de mener à bien des objectifs économiques, sociaux et environnementaux, nuira au développement régional et limitera la souveraineté économique du gouvernement du Québec, affirme l'expert.

 L’AÉCG est le premier accord international qui force l’ouverture des contrats octroyés par Hydro-Québec. Lors de la conclusion de l’Accord Canada-États-Unis sur les marchés publics, le Québec avait refusé d’ouvrir les contrats publics d’Hydro-Québec à la concurrence étrangère puisqu’ils constituent un puissant levier de développement économique et social.

 Protection de la culture

 Tout au long des négociations, le gouvernement du Québec a dit maintenir une position ferme sur la question culturelle: la culture ne devait pas faire l’objet de tractations et, conformément à la Convention sur la diversité culturelle de l’UNESCO, elle devait être protégée.

 «Le Canada et l’UE ont accepté de mentionner la Convention sur la diversité culturelle dans le préambule de l’AÉCG, mais cette seule mention est inefficace pour protéger la culture, estime M. Maltais, sauf si elle s’inscrit dans une stratégie globale comprenant une clause d’exception générale.»

 Mais l’UE et le Canada ont décidé de ne pas privilégier la voie de l’exemption générale pour faire vivre l’exception culturelle, malgré les recommandations formulées notamment par les coalitions européennes pour la diversité culturelle.

 «Selon le négociateur en chef pour le Québec, l’ancien premier ministre Pierre-Marc Johnson, le Belle Province a surestimé le soutien à la protection de la culture du côté européen, raconte M. Maltais. Dans une entrevue, il avoue – candidement – que l’ensemble des pays européens ''ne tenait pas particulièrement, en dépit du fait qu’ils aient ratifié la Convention de l’UNESCO, à ce que l’exemption soit formulée en termes généraux''.»

«L’aboutissement des négociations pour l’AÉCG ne respecte absolument pas l’esprit de la Convention de la diversité culturelle de l’UNESCO, qui était de retirer la culture de la table de négociations, estime le spécialiste. Cet accord est une défaite pour le milieu culturel.»

Agriculture et fromage

L’Union européenne et le Canada ont fait le choix de négocier dans un secteur très sensible des produits agricoles. Le résultat des négociations de l’AÉCG est impressionnant en matière de libéralisation. L’Union européenne supprimera les droits de douane sur 93,6% des produits agricoles canadiens, notamment sur le sirop d’érable, les pommes fraîches, les bleuets congelés et les canneberges séchées.

 En contrepartie, le Canada accepte d’abroger les droits de douane sur 92 % des produits agricoles européens, mais surtout il ouvrira son marché à 16 800 tonnes de fromage supplémentaires. «Ces concessions de la part du Canada auront un impact important sur l’industrie du fromage québécoise», croit M. Maltais.

 Les cinq plus importants exportateurs de fromage, qui représentent à eux seuls 56 % des exportations mondiales de fromage, sont membres de l’Union européenne. Il est évident que le Canada est dans la mire de la Commission européenne pour y distribuer ses excédents de fromages.

 

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