Libre-échange avec la Chine : les gains surpasseront-ils les pertes ?


Édition du 01 Octobre 2016

Libre-échange avec la Chine : les gains surpasseront-ils les pertes ?


Édition du 01 Octobre 2016

Par François Normand

Le Canada et la Chine ont lancé le 22 septembre des pourparlers de libre-échange. S'ils débouchent sur une entente, celle-ci aura un impact majeur sur notre économie. Cette entente ouvrira de nouveaux marchés aux exportateurs canadiens, mais elle fera également mal aux entreprises qui ne sont pas assez concurrentielles, affirment les spécialistes.

La suppression des barrières tarifaires et non tarifaires avec la Chine constituera un avantage énorme pour les entreprises canadiennes qui exportent des ressources, des biens et des services en Chine, affirme Éric Tétrault, président des Manufacturiers et exportateurs du Québec (MEQ). «On voit notamment beaucoup de potentiel pour l'agroalimentaire et les technologies propres, car les besoins sont immenses en Chine dans ces deux secteurs», dit-il.

Le Canada a beaucoup à gagner d'un accès préférentiel au marché chinois, croit aussi Ari Van Assche, spécialiste de la Chine à HEC Montréal. «Malgré le ralentissement récent de son essor, la Chine reste le plus grand contributeur à la croissance économique mondiale. Tout indique que cette tendance se poursuivra.»

Martine Hébert, vice-présidente principale et porte-parole pour le Canada à la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, affirme que les deux économies sont complémentaires. «À l'exception des matières premières, le Québec exporte essentiellement des produits à haute valeur ajoutée en Chine, tandis que nous importons surtout des produits à faible valeur ajoutée de ce pays, hormis les ordinateurs et les téléphones cellulaires.»

Les services - qui représentaient 50,5 % du PIB chinois en 2015 - offrent aussi des perspectives intéressantes aux entreprises canadiennes, affirme Zhan Su, spécialiste de la Chine à l'Université Laval : «Les entreprises chinoises sont cependant loin d'être en mesure de satisfaire les désirs de plus en plus diversifiés des consommateurs, alors que le gouvernement chinois prévoit un taux de croissance annuelle de 6,5 % durant le plan quinquennal 2016-2020».

Les secteurs vulnérables

Une fois en vigueur, l'accord de libre-échange abolira les tarifs douaniers pour importer des produits chinois au Canada. Par conséquent, les entreprises chinoises pourront réduire leurs prix pour vendre leurs biens au pays, ce qui créera une pression accrue sur les industries à faible valeur ajoutée au pays.

«Il y a un risque que le chômage structurel des travailleurs non qualifiés s'intensifie», affirme Jie He, spécialiste de la Chine à l'Université de Sherbrooke. Par ailleurs, l'arrivée de nouveaux capitaux chinois au Canada pourrait aussi créer une pression à la hausse sur les prix, notamment dans le secteur immobilier, dit-elle.

Ari Van Assche estime qu'Ottawa devra s'assurer «que nos gains économiques dépassent nos pertes» et que les Canadiens en sont convaincus. Pour sa part, Martine Hébert considère que les gouvernements devront donner une compensation financière aux industries qui pâtiront.

Cela dit, elle reste optimiste à l'égard des retombées d'un futur accord avec la Chine. «Lors des négociations de libre-échange avec les États-Unis dans les années 1980, certains nous avaient prédit un effondrement économique. Or, cette entente a été une excellente chose pour notre économie.»

Des négociations qui seront longues

Les pourparlers avec la Chine seront ardus et devraient durer des années, d'après les experts.

D'une part, parce que le Canada et la Chine ont des méthodes différentes au sujet des enjeux cruciaux tels que la gouvernance, les normes environnementales et la protection sociale des travailleurs, selon Zhan Su. D'autre part, parce que le Canada a des «faiblesses relatives» dans plusieurs secteurs manufacturiers par rapport à la Chine. Les MEQ sont par exemple d'avis que les secteurs de la fabrication de métal et de celle d'équipements lourds seront sous pression au Québec.

Enfin, Ottawa devra tenir compte de l'enjeu des droits de la personne, précise Zhan Su.

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