De l'expérience, ils en demandent!


Édition de Octobre 2017

De l'expérience, ils en demandent!


Édition de Octobre 2017

Par Claudine Hébert

Oui, de plus en plus d'employeurs préfèrent des candidats d'expérience. Voici sept bons filons pour vous sentir désiré.

Des milliers de start-up et de jeunes entreprises sont en voie de vous courtiser

Pendant les deux premières années de démarrage de son entreprise, Julie Hubert s'est obstinée à vouloir embaucher de jeunes loups pour combler son équipe de développement des affaires. «J'ai vu défiler dans mes bureaux au moins une quinzaine de candidats sans obtenir ce que je voulais», indique la fondatrice de la start-up montréalaise Workland, une agence de recrutement sur le Web créée en 2011.

Il y a trois ans, l'entrepreneure, alors âgée de 36 ans, a tenté l'expérience. Elle a commencé à embaucher du personnel de 45 ans et plus. «Ce que j'aurais dû faire bien avant. J'ai instantanément trouvé des perles. Aujourd'hui, mes quatre développeurs des affaires, dont trois sont quinquagénaires, sont en mesure de convaincre des clients dont les transactions s'avèrent très complexes.» Une initiative, dit-elle, qui lui a permis de franchir le cap du million de dollars en chiffre d'affaires.

Faire valoir son expérience, ses compétences et son réseau de contacts demeure toutefois un grand défi pour un travailleur plus âgé. L'univers des start-up, principalement celui des hautes technologies, constitue un environnement de travail où plus de 60 % des fondateurs ont entre 25 et 34 ans. Et l'âge moyen du personnel ne dépasse pas 33 ans chez les hommes et 29 ans chez les femmes, rapporte le Portrait de l'écosystème startup montréalais 2016, publié en novembre dernier.

«Ça prend une grande ouverture de culture et une saine période d'adaptation entre l'employeur et l'employé. Mais le jeu en vaut la chandelle, surtout en période de collecte de fonds, en phase de commercialisation et de croissance», maintient Christian Bélair, président de Credo, une firme-conseil en impact social, qui a réalisé l'étude sur les start-up.

Ce maillage intergénérationnel profite également à d'autres jeunes entrepreneurs. C'est le cas d'Alexandre Lacoste, président de Solutions financières Groupe Lacoste. Depuis dix ans, le dirigeant de la firme de planification financière de Laval a embauché à trois reprises des candidats de plus de 60 ans. En fait, un des cinq membres de l'équipe de conseillers a récemment soufflé ses 68 bougies. «Ce sont des planificateurs financiers autonomes qui recherchaient un rythme de travail moins stressant de trois jours par semaine. Ma doyenne, par exemple, s'occupe principalement du maintien de la clientèle», explique le planificateur financier de 39 ans. Cette stratégie, dit-il, a contribué à faire croître d'au moins 35 % le volume d'affaires de l'entreprise. «En plus d'apporter leurs clients, ces travailleurs d'expérience se trouvent en fin de carrière. Les dangers de les voir partir avec la clientèle de la firme sont quasi nuls», avoue le jeune financier.

Transformez votre expérience en service-conseil

Si la tendance se maintient, l'année 2017 s'ajoutera au tableau des meilleurs rendements annuels qu'a enregistrés Claude Séguin depuis qu'il a décidé d'embrasser une carrière de consultant en gestion. C'était il y a 15 ans, à l'âge de 50 ans. «Une solide expérience, assortie de certifications et d'accréditations (qui rehaussent la crédibilité du professionnel), permet à divers consultants de gagner entre 150 $ et 250 $ l'heure selon les mandats», relève cet ex-vice-président marketing chez Imperial Tobacco, qui ne regrette pas d'avoir quitté le secteur privé pour se lancer à son compte.

La consultation est d'ailleurs le chemin qu'empruntent plus de 5 % des salariés de 50 ans et plus en quête d'une seconde carrière, signale Claude Séguin, qui préside également le conseil d'administration de Midi-Quarante. Cet organisme vient en aide aux gens de 45 ans et plus qui cherchent à se retrouver du travail.

Et ces nouveaux consultants sont souvent témoins de situations ironiques, observe Julie Hubert, de l'agence de recrutement Workland. «Chaque année, je vois des dizaines de candidats bilingues ayant de l'expérience et pourvus d'un CV blindé, être boudés par les employeurs en raison de leur date de naissance. Pourtant, dès qu'ils deviennent consultants, ces gens se voient confier des mandats par les mêmes entreprises qui avaient refusé de les embaucher.»

Carrière politique

La politique est l'un des secteurs qui sourient le plus aux salariés de plus de 50 ans... pourvu qu'ils réussissent à se faire élire. Que ce soit à l'Assemblée nationale, à Québec, ou sur la colline du Parlement, à Ottawa, plus de 50 % des députés ont la cinquantaine bien entamée. Une statistique encore plus élevée chez les maires des quelque 1 110 municipalités du Québec, dont plus de 65 %, élus aux dernières élections en 2013, sont nés avant les années 1960. Et ça tombe bien pour les candidats qui veulent tenter leur chance. Le 5 novembre prochain, le Québec tout entier sera en élections municipales. La période d'inscription se tiendra du 22 septembre au 6 octobre, signale Patrick Lemieux, directeur des communications à l'Union des municipalités du Québec. Au total, plus de 8 000 postes de maires et de conseillers seront à combler. Un élu municipal gagne en moyenne 20 000 $ par année. La plupart des maires travaillent à temps plein. Les conseillers, eux, travaillent à temps partiel. Remarquez, il suffit qu'un incident survienne, tels une inondation, une tempête de verglas ou un incendie majeur, pour que les élus aient à s'acquitter de leur rôle 24 heures sur 24.

Laissez vos passions vous guider

Préoccupé par l'évolution de la courbe démographique, le secteur du tourisme a été l'un des premiers secteurs, il y a dix ans, à procéder à des études pour analyser et encourager le recrutement de salariés de 50 ans et plus au sein de son industrie. «Bien que les étudiants comptent encore pour un emploi sur deux (56 %), les baby-boomers sont en voie de devenir notre principal bassin de recrutement», affirme Isabelle Girard, directrice générale du Conseil québécois des ressources humaines en tourisme (CQRHT).

Les conditions salariales du secteur touristique, généralement guidées par le salaire minimum, ne figurent toutefois pas parmi les plus alléchantes du marché du travail. «Les 50 ans et plus qui postulent au sein de notre industrie le font principalement pour rencontrer des gens et assouvir une passion qu'ils ont pour un sport, une activité culturelle, un loisir», accorde Isabelle Girard.

Prenons les pourvoiries de pêche au saumon en Gaspésie, où les guides passent en moyenne douze heures sur les rivières en compagnie des clients. Ce sont pour la plupart d'anciens professeurs, des représentants commerciaux, des gardes-forestiers, la cinquantaine dépassée, qui travaillent pour moins de 15 $ l'heure. Au Camp Bonaventure, un des guides est même un ex-sergent de l'Armée canadienne, indique le copropriétaire de la pourvoirie, Glenn LeGrand.

Au Village québécois d'antan, à Drummondville, les employés de 50 ans et plus sont essentiels pour assurer la crédibilité du produit. Ceux-ci représentent plus de 40 % de la main-d'œuvre des 130 travailleurs responsables de l'animation de l'attraction qui retrace les années 1810 à 1930 au Québec. Le nombre d'heures travaillées pour ces postes saisonniers varie de 24 à 40 par semaine. Des postes pour lesquels personne ne gagne au-delà du salaire minimum. Pourtant, tous les postes sont pourvus, affirme Danielle Chayer, directrice adjointe du VQA. «Ce sont, dit-elle, d'ex-employés de manufacture, d'ex-producteurs agricoles, ainsi que des professeurs de tous les niveaux scolaires qui aiment transmettre l'histoire et leurs connaissances de métiers artisanaux en voie de disparition.» Remarquez, le VQA songe à revoir ses conditions salariales dans un proche avenir.

Devenez professeur

«Emmenez-en des CV de candidats d'expérience», lance d'emblée Mathieu Vigneault, président et directeur général de Réseau Trans-tech, qui regroupe les centres collégiaux de transfert de technologie (CCTT) du Québec. Cette association, qui compte plus de 49 centres et 1 300 experts dans des domaines aussi variés que l'aérospatiale, les mines, l'optique ou encore la plasturgie, embauche régulièrement des travailleurs d'expérience pour des mandats ponctuels. «Nos centres sont très friands de ces candidatures provenant du secteur privé. Ils recherchent, pour la plupart, des experts en recherche scientifique et en développement des affaires qui apportent leur soutien et leurs connaissances aux étudiants et aux entreprises qui requièrent notre collaboration pour innover», explique Mathieu Vigneault. Ces mandats de deux à six mois varient d'une à trois journées par semaine. Des mandats qui se traduisent généralement par un salaire de 40 $ à 60 $ l'heure.

À HEC Montréal, la quarantaine de maîtres d'enseignement - 46 pour être exact - vient principalement du marché du travail. Ces maîtres, qui représentent plus de 15 % du corps professoral, tirent avantage d'une solide carrière en finance, en gestion, en marketing, en vente et autres domaines du monde des affaires, fait savoir Claude Laurin, directeur des affaires professorales. Ces derniers, précise-t-il, ne chôment pas. Ils donnent au moins huit cours par année, en plus de participer à la programmation pédagogique. Leur salaire : de 70 000 $ à 100 000 $ par année.

Bien que l'institution ne soit pas actuellement en recrutement, elle étudie régulièrement les candidatures pour des postes de professeurs invités et de chargés de cours. Des postes qui relèvent de tâches à temps partiel.

Commerce de détail : des emplois aux horaires flexibles

Il y a dix ans, la haute direction de Rona craignait une pénurie de main-d'œuvre. Surprise ! Les baby-boomers sont venus à la rescousse. «Aujourd'hui, plus du tiers des employés de la chaîne de quincaillerie sont âgés de 50 ans et plus», signale Normand McKenzie, directeur national ressources humaines chez Rona. Des employés qui occupent pour la grande partie des postes de commis et de vendeurs, dont les salaires varient de 12 $ à 18 $ l'heure.

Le vaste secteur économique du commerce de détail, qui regroupe plus de 425 000 emplois, ne se limite toutefois pas à des postes de caissières, de commis et de vendeurs. «Il y a aussi plusieurs postes de gestion», souligne Patricia Lapierre, directrice générale de Détail Québec.

Et le secteur du commerce de détail, précise-t-elle, en est un où les chances de grimper rapidement les échelons sont grandes. Le délai pour accéder à un poste de gestion est de 3,8 ans, note-t-elle. Des emplois dont les salaires atteignent plus de 20 $ l'heure. «Un gérant de district peut gagner de 40 $ à 60 $ l'heure», insiste Patricia Lapierre.

Pourtant, ce n'est pas systématiquement le type de responsabilité que recherchent les gens qui viennent postuler chez nous, observe Normand McKenzie. Certains souhaitent obtenir un horaire à temps plein. «Mais la majorité, dit-il, veulent travailler à temps partiel, de 20 à 30 heures par semaine. Plusieurs employés, notamment les snowbirds, vont travailler principalement au printemps, à l'été et à l'automne afin de prendre congé de janvier à mars. Ce qui, en soi, tombe bien pour l'entreprise. Pendant cette période de l'année, nos magasins sont moins achalandés.»

Travaillez pour aider les autres

Responsable de près de 285 000 emplois au Québec répartis sous 200 métiers et professions, le secteur de l'économie sociale et de l'action communautaire est en quête de salariés aux tempes grises. Ce secteur recrute des experts en administration, en travail social, en communication, en gestion financière, en ressources humaines ainsi qu'en psychologie et en éducation spécialisée. La moyenne d'âge des ressources humaines est d'ailleurs passée de 36 ans en 2012, à 39 ans en 2015. «Et ça va continuer d'augmenter», croit Odette Trépanier, directrice générale du Comité sectoriel de la main-d'œuvre de l'économie sociale et de l'action communautaire (CSMO-ÉSAC).

Selon un sondage mené au sein de cette industrie, plus d'une entreprise ou organisation sur quatre (29 %) souhaite recruter des baby-boomers. C'est ce qu'a fait le Regroupement des organismes spécialisés pour l'emploi des personnes handicapées (ROSEPH) en 2013. L'organisme devait trouver un successeur à son jeune directeur général. Pour la première fois, le conseil d'administration a décidé d'embaucher un candidat d'expérience. «On cherchait une personne capable de faire avancer nos dossiers et nos mémoires auprès des représentations et commissions gouvernementales. On cherchait quelqu'un qui parlait le langage politique. Nous l'avons trouvé en recrutant une retraitée de la fonction publique. Mission accomplie. Aujourd'hui, notre directrice siège à la direction du comité consultatif gouvernemental pour les personnes handicapées», souligne fièrement Joseph Giulione, président du conseil d'administration du ROSEPH.

Notez que cette retraitée a dû accepter une baisse de salaire importante. Comme bien d'autres candidats d'ailleurs. «Bien que notre secteur puisse compter sur une main-d'œuvre fortement scolarisée - la plupart des employés détiennent un diplôme postsecondaire -, plusieurs salariés vont accepter une baisse de rémunération d'au moins 25 % de ce qu'ils auraient gagné ailleurs», concède Odette Trépanier. Le critère d'attraction numéro un des entreprises de son secteur auprès du capital humain consiste en une volonté des gens de travailler pour leur communauté et d'aider les autres. «Ces gens viennent chez nous parce qu'ils veulent accomplir une mission sociale», poursuit-elle.

Notez que le taux horaire moyen actuel se situe sous les 30 $ l'heure (27,24 $) pour les postes de direction. Le point positif : il s'agit tout de même d'une hausse de 20 % depuis 2012.

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