Un bon investisseur doit toujours être prêt à vivre une crise: voici comment faire

Offert par Les Affaires


Édition du 13 Mai 2020

Un bon investisseur doit toujours être prêt à vivre une crise: voici comment faire

Offert par Les Affaires


Édition du 13 Mai 2020

Par Yannick Clérouin

(Photo: 123RF)

L'ART D'INVESTIR. «Cette entreprise survivra-t- elle à une récession si un ralentissement économique survenait demain matin ?» Voilà une des questions qui revient constamment lorsque le comité d'investissement de Medici effectue le suivi d'un titre en portefeuille ou l'évaluation initiale d'un candidat.

La chute abrupte des marchés occasionnée par l'éclosion de la COVID-19, au premier trimestre de 2020, montre avec éloquence qu'un bon investisseur ne doit pas attendre une crise pour évaluer les risques liés à ses titres, mais doit toujours être prêt à en vivre une.

Cela implique d'écarter d'entrée de jeu un grand nombre d'entreprises : celles qui n'affichent pas de rentabilité durable, ne possèdent pas de réels avantages concurrentiels, sont de nature spéculative, dépendent des prix d'une ressource qu'elles ne contrôlent pas et, enfin, celles grevées par une lourde dette.

Une attention plus grande au bilan

Si la qualité du bilan constitue depuis toujours un critère clé dans l'analyse de nos titres, la fermeture forcée de nombreuses entreprises nous a amenés à faire appel à de nouvelles normes d'évaluation.

Par exemple, celle de comparer les liquidités disponibles avec les coûts d'exploitation fixes, afin de déterminer le nombre de mois qu'une entreprise peut survivre en l'absence totale ou presque totale de revenus. Nous avons notamment fait l'exercice avec les détaillants dont les produits ne figuraient pas sur la liste des biens essentiels.

Pour y parvenir, il suffit d'additionner toutes les sources de liquidités dont dispose l'entreprise (encaisse, marges de crédit, emprunts, etc.) et en soustraire les dépenses impossibles à éliminer tels les loyers, les salaires incompressibles et le dividende s'il est maintenu.

Une attention particulière a également été portée à l'échéance des dettes. Objectif : s'assurer que les entreprises réussissent à rembourser ou à refinancer celles qui arrivaient à terme dans les mois à venir.

Au-delà de la capacité des entreprises à survivre à une période sans revenu à court terme, il est crucial de réévaluer la solidité de leur bilan dans une perspective à plus long terme. La crise affaiblit de nombreuses sociétés, mais elle crée aussi des occasions pour celles qui disposent d'abondantes réserves leur permettant de passer à l'offensive.

Les gestionnaires de capitaux habiles ont d'ailleurs réagi rapidement au contexte non seulement pour rendre leur entreprise plus résistante aux chocs à venir, mais pour accumuler des munitions qui serviront à acheter des rivales en détresse.

Ajuster les évaluations à un contexte normal

Quand la panique s'empare des marchés, les évaluations accordées aux entreprises ne reposent plus sur aucun paramètre rationnel.

La plupart des entreprises subiront les effets de la crise pendant plusieurs trimestres, mais il est insensé de conclure qu'elles seront toutes affectées de façon identique.

Il importe donc de passer en revue chacun de ses titres afin de tenir compte des effets négatifs à court terme engendrés par la crise, tout en gardant à l'esprit leur réel potentiel à long terme.

L'évaluation d'une entreprise ne repose pas sur les seuls résultats de la prochaine année, mais sur tous ses bénéfices futurs. Si la croissance ralentit à l'an 1, elle pourrait augmenter plus fortement qu'initialement prévu dans les années suivantes.

En se projetant dans un contexte économique plus normal, on peut évaluer la capacité bénéficiaire à long terme réelle d'une entreprise. Cette démarche permet de saisir des occasions lorsque l'incertitude incite le marché à accorder aux entreprises une valeur qui repose sur les moins bons résultats anticipés à court terme.

À l'inverse, un tel exercice nous force à analyser les soi-disant gagnants de la COVID 19 avec un regard plus critique. Zoom Video Communications (ZM, 149,59 $ US) est devenue une des coqueluches de ceux qui veulent profiter des contraintes imposées par la distanciation sociale.

La société qui fournit la populaire plateforme de vidéoconférence va en effet croître rapidement à court terme. Mais bénéficie-t-elle d'avantages concurrentiels qui se traduiront par une rentabilité durable ?

Voilà le genre de questions essentielles à se poser lorsqu'on analyse un titre qui profite d'une tendance, comme Zoom, d'autant que celui-ci se négocie à une évaluation parmi les plus élevées de son secteur et que la concurrence s'intensifie.

Chaque crise amène de nombreux observateurs à affirmer que celle-ci est différente des autres et qu'elle aura pour effet de transformer les comportements à tout jamais.

Mieux vaut éviter les extrapolations et se concentrer sur les éléments fondamentaux pour évaluer le mieux possible les entreprises. C'est la meilleure façon de se préparer à la prochaine crise.

 

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