Pour réussir en Bourse, sachez éviter les écueils


Édition du 07 Mai 2016

Pour réussir en Bourse, sachez éviter les écueils


Édition du 07 Mai 2016

Par Philippe Leblanc

[Photo : Shutterstock]

La réussite en Bourse ne dépend pas tant de la capacité d'un investisseur à dénicher des titres qui deviendront de grands succès, ceux que Peter Lynch qualifie de ten-baggers (des titres dont la valeur a été multipliée par 10), mais de sa capacité à éviter les écueils. L'investisseur veut surtout éviter les titres de sociétés qui pourraient, d'une part, lui causer des pertes permanentes de capital et, d'autre part, ne pas l'enrichir pendant des périodes de 10, 15, voire 20 ans.

Comme Charlie Munger et Warren Buffett le disent souvent : «Tout ce que je veux savoir est où je vais mourir, et je m'assurerai de ne jamais y mettre les pieds !» Pour l'investisseur, cela se traduit par : «Tout ce que je veux savoir est où sont les écueils, et je m'assurerai de m'en tenir loin».

En ce sens, l'étude de titres qui ont fait subir des pertes substantielles aux investisseurs ou dont la performance a été absolument nulle pendant de nombreuses années offre souvent de précieux enseignements. Notre philosophie d'investissement nous impose généralement de rester loin de trois types d'écueils boursiers potentiels :

1. La dette. De tous les facteurs qui peuvent mener à une perte permanente de capital, l'endettement très élevé d'une entreprise est probablement le plus important. L'entreprise très endettée qui connaît un quelconque revers, que ce soit la perte d'un important client, la perte d'une usine causée par un accident naturel, etc., peut très bien ne pas survivre. Comme le monde des affaires est imprévisible, de tels accidents font partie du parcours de toute entreprise.

2. Les situations trop complexes. Si le modèle d'une entreprise est trop complexe, nous fermons son dossier et passons à un autre. Nous évitons par exemple la grande majorité des entreprises qui oeuvrent dans des secteurs à la fine pointe de la technologie. Nous ne sommes pas des experts en techno et ne prétendons pas être en mesure de prévoir ce qui surviendra dans cet univers au cours des six prochains mois, encore moins au cours des 5 ou 10 prochaines années. Une comptabilité complexe ou qui nous semble trop agressive est une autre bonne raison d'ignorer un titre.

3. Les modèles d'entreprise dont les barrières à l'entrée sont peu élevées. Règle générale, on peut déceler de telles sociétés par leur rendement du capital médiocre sur une longue période. Si, par exemple, une entreprise réalise un rendement annuel du capital moyen de 6 % depuis plusieurs années, deux raisons peuvent être en cause : 1) elle n'est pas très efficace; ou 2) son secteur d'activité est trop concurrentiel. Pourquoi un investisseur voudrait-il investir dans une telle société ?

Trois exemples concrets

Je vous propose trois exemples de sociétés canadiennes dont les titres ont soit fortement chuté au cours des derniers mois ou ont dégagé des rendements anémiques pour leurs actionnaires au cours des 10 à 15 dernières années. Chacun de ces exemples illustre à mon avis un des trois écueils cités plus haut.

1. Performance Sports Group. Le titre de ce fabricant d'articles de sport, dont deux des marques de commerce sont Bauer et Easton, a connu une excellente performance boursière au cours des dernières années à la faveur d'une forte croissance alimentée par des acquisitions. Cette performance a toutefois été effacée au cours des dernières semaines après que la société eut annoncé que ses bénéfices seraient touchés par la mise sous la protection de la loi sur la faillite de son plus important client, Sports Authority. Le titre de la société, qui a chuté de 80 % depuis son sommet historique atteint en mai 2015, aurait mieux résisté à ce revers si celle-ci n'avait pas eu une dette aussi élevée. Au 30 novembre 2015, le bilan de l'entreprise faisait état d'une dette nette de près de 471,3 M$. Sachant que la société a dégagé des bénéfices d'exploitation (BAIIA) de 39,7 M$ au cours de la période de 12 mois terminée le 30 novembre 2015, son ratio dette nette/BAIIA est de 11,9, un niveau plutôt alarmant. Les dirigeants d'entreprise oublient souvent les risques associés à la dette : cette dernière peut être un atout lorsque tout va bien, mais elle peut rapidement devenir fatale lorsque survient un accident.

2. Industries Dorel. La société Dorel a connu un beau succès dans les années 1990, la valeur de son titre passant d'environ 3,50 $ au début de 1992 à 26,50 $ au début de 2000. Par contre, ce dernier n'a absolument rien fait qui vaille au cours des 15 dernières années. De fait, il vaut aujourd'hui exactement le même prix que le 1er janvier 2000. Nous avons été longtemps actionnaires de Dorel et sommes donc en terrain connu. Notre décision de vendre nos actions il y a déjà plusieurs années reposait sur deux raisons : 1) les résultats financiers étaient décevants depuis plusieurs années ; et 2) nous n'étions pas d'accord avec la décision de la direction d'investir massivement dans le segment des vélos. Nous estimions que ce créneau était peu attrayant à long terme en raison des barrières à l'entrée peu élevées qui le caractérisent - à notre avis, à peu près n'importe qui peut fabriquer des vélos, et le haut de gamme est tributaire des modes et des fluctuations incessantes des goûts des cyclistes. En outre, le fait de fournir de très grands détaillants tels que Costco et Wal-Mart limite les occasions d'augmenter les prix. Au cours de son dernier exercice, le rendement du capital moyen ajusté de Dorel a été d'un maigre 2,2 %.

3. Valeant Pharmaceuticals. Cette société présente au moins deux des écueils cités plus haut : une dette très élevée et, bien que ses activités soient assez simples (pharmaceutiques), son modèle d'entreprise fondé sur les acquisitions en série est complexe. Au 30 septembre 2015, la société affichait une dette nette de près de 29,5 G$, soit 4,7 fois son avoir des actionnaires de 6,3 G$. En outre, son modèle d'entreprise est basé sur des hausses musclées du prix de ses produits et sur l'élimination des dépenses de R-D des entreprises acquises.

Voilà le genre d'écueils qu'un investisseur doit éviter pour obtenir du succès en Bourse à long terme. Aucun investisseur n'est à l'abri d'erreurs, mais en évitant le plus possible les trois écueils précités, il devrait les minimiser.

Philippe Le Blanc est président et gestionnaire de portefeuille chez COTE 100, une boutique de gestion de portefeuille. Il est également éditeur de la Lettre financière COTE 100, publiée depuis 1988.

 

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