Les FNB perdent leur simplicité

Publié le 12/10/2011 à 13:53, mis à jour le 12/10/2011 à 14:00

Les FNB perdent leur simplicité

Publié le 12/10/2011 à 13:53, mis à jour le 12/10/2011 à 14:00

Un FNB, c'est simple. Non, C'ÉTAIT simple. Depuis qu'il y a plus de concurrence dans ce marché, bonjour l'embrouille.

Avec les FNB, investir était du gâteau. Il n'y avait pas de méthode plus simple pour obtenir un portefeuille diversifié et facile à comprendre. Vous vouliez investir dans le marché américain ? Pas de problème ! Vous achetiez le titre XSP et vous aviez tout le S & P 500 dans votre portefeuille. Les obligations à rendement réel ? Facile : le XRB. Et la Chine ? Vous n'aviez qu'à cliquer sur XCH et vous aviez l'indice chinois. Magique... et pas cher ! Les frais de gestion des FNB sont connus pour être très peu élevés.

Maintenant, le " sceau FNB " n'est plus synonyme de simplicité. Depuis l'an 2000, où Barclays a lancé ses iUnits, rebaptisés iShares en 2006, Claymore, Horizon Beta Pro, PowerShares, BlackRock, Horizon AlphaPro et BMO sont apparus dans le paysage. Pour se démarquer, ils ont rivalisé d'imagination. Les FNB, qui étaient au départ de simples produits indiciels, sont donc devenus de plus en plus complexes. " Aujourd'hui, pour acheter des FNB, il faut comprendre comment ces produits sont construits et comment ils vont réagir aux différentes conditions de marché ", avertit Alfred Lee, vice-président et stratège en placement chez BMO FNB.

 

Comment se présente maintenant le marché des FNB ?

Parlons des simples, d'abord. Ces FNB vous conviennent si vous visez le long terme et cherchez des instruments de placement transparents. Ce groupe est dominé par les FNB indiciels à gestion " passive ", comme ceux mentionnés plus haut. Ces fonds calquent simplement un indice courant, en tentant de reproduire le plus exactement possible sa composition et son rendement.

Au Canada, BlackRock, qui a acheté iShares de Barclays en 2009, est chef de file dans cette catégorie. Son FNB S & P/TSX 60 (symbole : XIU) est le plus populaire de tous, et affiche plus de 11 milliards de dollars d'actif sous gestion, soit pratiquement 25 % du marché total.

" iShares a l'avantage d'être arrivé avant les autres et d'avoir lancé assez de produits pour bien pénétrer le marché, remarque Raymond Kerzhéro, directeur de recherche chez PWL Capital. C'est pourquoi il est numéro un aujourd'hui. "

Pour faire leur place, les concurrents offrent des produits indiciels " améliorés " en appliquant simplement un filtre différent sur les actions qui composent un indice courant. Claymore, deuxième joueur en importance au Canada, est chef de file en la matière.

 

Les FNB filtrés

Les stratégies les plus courantes sont celles qui utilisent comme filtre les données financières des entreprises : les versements de dividendes, les flux de trésorerie, le chiffre d'affaires et la valeur comptable. D'autres FNB accordent une pondération identique aux différents titres qui composent l'indice (équipondéré), quelle que soit leur taille, donnant ainsi plus de poids aux petites capitalisations. Dans le cas du S & P/TSX 60, par exemple, cela revient à accorder la même pondération à la Banque Royale, qui vaut 84 milliards de dollars, et au fabricant de fromages Saputo, qui vaut 8 milliards.

" En général, ces approches ont un rendement espéré plus élevé que l'indiciel pur, note Raymond Kerzérho. Par contre, comme ces FNB font davantage de transactions, leurs frais de gestion annuels peuvent être supérieurs d'environ 0,20 à 0,45 %, et leurs distributions de gain en capital sont plus fréquentes, ce qui est moins avantageux du point de vue fiscal. "

Élevons le niveau de complexité d'un cran avec les FNB avec couverture de change. BMO affectionne particulièrement cette niche. En fait, pour se démarquer, BMO cherche à se glisser dans toutes les brèches de l'offre existante. Et Claymore et iShares, qui ont quelques produits indiciels avec couverture de change, en avaient laissé une belle...

Il reste que la couverture de change ne s'est pas fait attendre sans raison. La protection contre les risques de devise compte beaucoup de détracteurs. " Cette couverture a un coût, qui n'apparaît pas dans les frais annuels, mais qui peut réduire le rendement annuel d'environ 0,75 % ", dit Richard Morin, gestionnaire de portefeuille chez Landry Morin.

Ce coût ne décourage pas tous les investisseurs. " Ça permet de ne pas perdre un rendement positif sur un marché étranger à cause de l'appréciation du dollar canadien ", explique Raymond Kerzérho.

En 2009 est apparu un drôle de produit : le FNB à gestion active. Contradiction ? Sans doute, mais ça n'a pas empêché Horizons AlphaPro de mettre ce produit hybride sur le marché. Ces produits sont gérés comme des fonds communs de placement, mais sont négociés comme des FNB, c'est- à-dire comme une action. Jusqu'à présent, investisseurs et conseillers ont réagi assez timidement à ces fonds. Charles P. Whaley, qui écrit pour le site etf.profittrend.com, s'étonne même de voir que les FNB, dont le marché s'est d'abord développé du fait que 80 à 85 % des gestionnaires de fonds communs ne battent pas l'indice, aient pris ce virage.

Toutefois, la commercialisation de ces FNB ne repose pas sur le fait d'être ou non dans les 15 à 20 % qui performeront mieux que l'indice de référence. Le message d'AlphaPro est plutôt le suivant : notre gestion active est moins onéreuse que celle des fonds communs de placement.

Un exemple ? Le FNB S & P/TSX à gestion active (HAX), qui surpondère les secteurs de l'indice S & P/TSX 60 pressentis comme " porteurs " et sous-pondère ceux qui semblent avoir moins de potentiel, a des frais de gestion annuels de 0,70 %. À cela s'ajoute un boni à la performance lorsque le gestionnaire dépasse de 20 % le rendement de l'indice de référence.

 

Les FNB complexes

Jusque-là, nous sommes restés en terrain relativement connu. Nous abordons maintenant des produits qui, entre de mauvaises mains, peuvent faire des dégâts. On qualifie de " complexe " les FNB utilisés pour parier sur les tendances haussières ou baissières du marché, ou pour protéger un portefeuille contre les mouvements erratiques du marché. Ces fonds recourent à des produits dérivés et à l'effet de levier. Ils s'adressent aux investisseurs aguerris, voire même aux spéculateurs, qui cherchent à anticiper les tendances du marché.

On distingue ces FNB par le fait qu'ils sont structurés à partir de contrats à terme : un engagement ferme d'acheter ou de vendre une quantité convenue d'un actif à un prix et à une date prédéterminés. Ces fonds font plusieurs choses : ils calquent des marchés non traditionnels, comme les devises ou les produits de base, donnent l'inverse du rendement d'un indice courant ou donnent le double ou le triple du rendement d'un indice donné. PowerShares et Horizon BetaPro ont fait de ces produits leur marque de commerce.

" Ces produits ont un certain succès ", remarque Charles P. Whaley. Par exemple, dans la semaine qui s'est terminée le 18 février 2011, soit en pleine crise libyenne, 19,9 millions de parts d'Horizon BetaPro Nymex Natural Gas Bull+ (HNU) et 16 millions de parts d'Horizon BetaPro Nymex Crude Oil Bull + (HOU) ont été négociées. Seul le XIU d'iShares l'a été davantage (36,1 millions de parts).

Il n'empêche que ces produits ont mauvaise réputation. Aux États-Unis, la Securities and Exchange Commission a lancé une vaste enquête en vue de mieux évaluer le risque qu'ils représentent. Au Canada, Fair Canada, un organisme qui a pour but de protéger les intérêts des investisseurs, veut obliger les fournisseurs de FNB avec effet de levier à prévenir le public du danger. Car, en marché volatil, ces produits sont particulièrement dévastateurs... Par exemple, imaginez qu'un indice évolue quotidiennement comme suit : 100, 110, 90, 100. Ses rendements quotidiens seront de 10 %, - 18 %, 11,11 %. Un FNB qui réussit à offrir le double de ce rendement donnera 20 %, - 36 %, 22,22 %. Si la valeur de ce FNB est de 100 $ au début de la période, nous obtenons 120 $, 76,80 $, 93,86 $. L'investisseur a donc perdu plus de 6 $ en quelques jours, pendant que l'indice, lui, faisait du surplace.

Il y a pire. Ces FNB ne donneront pas nécessairement le rendement de l'actif auquel ils sont liés. " La valeur d'un contrat à terme est influencée par d'autres facteurs, comme l'humeur des intervenants du marché et les taux d'intérêt, explique Richard Morin. Au point qu'il est difficile d'anticiper le comportement de ces contrats. "

" De plus, le roulement des contrats à terme, qui arrivent à échéance mensuellement, trimestriellement ou semi-annuellement, est une autre source de distorsion, note Raymond Kerzérho, de PWL Capital. Cela crée une érosion du capital à cause des frais et des écarts de prix. "

Ce phénomène fait couler beaucoup d'encre. Par exemple, un article de Bloomberg publié en juillet 2010 soulignait qu'USO (United State Oil Fund), un FNB conçu pour donner le rendement du pétrole, a reculé de 7,4 % en février 2009, alors que le prix du pétrole, lui, était en hausse.

Le hic, c'est que si vous utilisez mal ces FNB, vous pourriez perdre gros. À moins d'être kamikaze ou d'être un véritable pro du placement, il vaut mieux rester en terrain connu avec les FNB classiques.

Lire aussi: Trois FNB semblables, sauf que...

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