Trois sous un même toit générations

Publié le 01/09/2009 à 00:00

Trois sous un même toit générations

Publié le 01/09/2009 à 00:00

Vivre avec son conjoint, ses enfants et ses parents est un mode de vie qu'ont adopté nombre de Québécois. La cohabitation intergénérationnelle en vaut-elle le coût ?

" Deux camions de 45 pieds remplis de planches, de clous et de vis ! " Les yeux de Thomas Gagnon, un mécanicien de 47 ans, brillent comme ceux d'un enfant lorsqu'il parle de sa maison préfabriquée, assemblée pièce par pièce en 2007 avec ses deux fils. Mary, sa mère, 77 ans, est tout aussi fière. Elle vit dans le loft annexé à la nouvelle résidence !

Les Gagnon cohabitent dans une maison intergénérationnelle à Sainte-Sophie, une municipalité de 11 000 habitants située près de Saint-Jérôme. Thomas Gagnon, sa femme et ses deux fils de 19 et 21 ans occupent la résidence principale, tandis que Mary loge dans un petit studio pourvu d'une cuisine et d'une chambre-salon - elle partage une salle de bains avec la famille, ce qui est contraire à la définition stricte de ce qu'est la résidence intergénérationnelle.

" Ma mère, veuve depuis quatre ans, n'était plus capable d'entretenir sa maison de Laval, dit Thomas Gagnon. Nous habitions à l'époque à deux coins de rue de chez elle. Ma femme et moi avons donc lancé l'idée d'une maison intergénérationnelle. "

Mary s'est laissé convaincre. Près de deux ans plus tard, elle ne regrette pas son choix. Elle souffre de douleurs aux jambes et se sent en sécurité dans sa nouvelle demeure. " Mes petits-fils viennent me voir chaque jour ", dit-elle.

À cause du vieillissement de la population et des enfants qui tardent de plus en plus à quitter le nid familial, les maisons intergénérationnelles se multiplieront dans l'avenir, prédit-on depuis une dizaine d'années. Cependant, le concept, aussi prometteur soit-il, ne s'est pas encore imposé.

Les avantages de la vie... à sept

Blainville, une municipalité de 50 000 habitants, est la capitale de la maison intergénérationnelle au Québec. Depuis 1998, elle offre un crédit de taxes foncières de trois ans aux propriétaires qui transforment leur résidence unifamiliale en résidence intergénérationnelle. La ville compte une centaine d'habitations de ce genre sur son territoire.

La demande existe, selon Brian Mitchell, agent immobilié affilié à Sotheby's International Realty, qui habite Blainville. En 2008, ce Torontois d'origine a lancé avec sa femme - elle suit un cours d'agente immobilière - un site Internet (montreal intergenerationalhomes.com) qui se consacre à la vente et à l'achat de maisons intergénérationnelles. " Nous recevons chaque semaine deux ou trois appels de gens que ce type d'habitation intéresse ", affirme Brian Mitchell, que nous avons rencontré dans sa luxueuse maison.

Nathalie Blanchette et son mari ont choisi ce mode de vie en 2002. Elle partage une maison intergénérationnelle dans un quartier huppé de Blainville, avec son père et la conjointe de celui-ci. Le couple, qui a trois enfants, occupe la résidence principale, et les grands-parents, qui travaillent toujours, vivent dans le logement secondaire, une véritable copropriété de deux étages. De l'extérieur, il est impossible de distinguer les deux demeures.

" Nous avons chacun notre intimité, dit Nathalie Blanchette, une infirmière de 42 ans. Mais nous nous rendons des services. " Mammy va chercher la petite dernière à la garderie, Nathalie fait ses courses, fiston joue avec le Playstation de grand-père, et chacun surveille la résidence de l'autre durant les vacances.

Une affaire de coeur et non d'argent

Outre ses avantages au quotidien, la maison intergénérationnelle peut permettre à de jeunes couples d'accéder à la propriété. Pour payer l'hypothèque ou rembourser les frais de rénovation, plusieurs ménages demandent un loyer - inférieur au prix du marché - au parent proche qui habite le logement secondaire, d'après Manon Boulianne, professeure au département d'anthropologie de l'Université Laval, qui a étudié le sujet en 2002.

Mais il ne faut pas se faire d'illusions quant à la rentabilité d'un tel projet, dit Karine Genest, directrice de programmes à la Fédération de l'âge d'or du Québec. Construire ou acheter une maison intergénérationnelle coûte entre 180 000 et 200 000 dollars, souligne la Société canadienne d'hypothèques et de logement (SCHL) dans une étude publiée en 2004. Évidemment, les prix ont augmenté depuis. Par ailleurs, il faut compter entre 22 000 et 85 000 dollars pour ajouter un logement à une résidence unifamiliale existante.

À cela s'ajoutent les inévitables dépenses pour soutenir l'aîné en perte d'autonomie ou pour adapter le logement à ses nouveaux besoins, ajoute Karine Genest.

Et une grande question demeure : que feront les propriétaires quand la personne âgée mourra ? Le gouvernement du Québec a modifié en 1998 la Loi de l'aménagement et de l'urbanisme afin de permettre aux municipalités d'accorder des permis pour la construction de maisons intergénérationnelles ou pour l'ajout d'un logement aux maisons unifamiliales existantes. Depuis, au moins 65 % des municipalités québécoises ont adopté un règlement de zonage qui permet ce type de maisons, selon la Société d'habitation du Québec. Toutefois, les municipalités obligent souvent les propriétaires à n'avoir qu'une seule adresse civique et postale, ainsi qu'une seule porte principale. Elles interdisent en outre aux propriétaires de louer l'appartement secondaire à un étranger.

Difficile, dans ce contexte, de vendre sa maison intergénérationnelle. " Cela réduit considérablement le bassin d'acheteurs ", dit Louise St-Georges, agente immobilière indépendante qui oeuvre depuis 26 ans dans les Cantons-de-l'Est.

Qu'à cela ne tienne : il suffit de transformer la maison de nouveau ! " Un travailleur autonome peut utiliser le logement comme bureau ", dit Carole Després, professeure à l'École d'architecture de l'Université Laval, qui a étudié le concept de maison intergénérationnelle. Les enfants adultes peuvent aussi l'habiter, avant d'emménager dans la résidence principale avec leur propre famille, souligne Brian Mitchell. " Les grands-parents déménagent alors dans l'appartement ! " dit-il. La maison n'est plus seulement intergénérationnelle. Elle se transmet de génération en génération !

Il ne faut pas confondre la maison intergénérationnelle...

Près de 20 % des parents de 60 à 79 ans vivent encore avec un ou plusieurs de leurs enfants, selon un sondage mené en 2006 et commandé par le Conseil des aînés du Québec et la Chambre des notaires du Québec. Ce pourcentage grimpe à 29 % pour les parents de 80 ans et plus.

...avec les Tanguy

Au Canada, 26 % des jeunes adultes de 25 à 29 ans habitaient au domicile parental en 2006, par rapport à 22,2 % en 1996 et 15,6 % en 1986.

Source : Statistique Canada

DE L'AIDE FINANCIÈRE

Il n'existe pas de programme de subventions propre aux maisons intergénérationnelles. On peut toutefois bénéficier des crédits d'impôt et des programmes d'aide à la rénovation ou à la construction suivants :

Crédits d'impôt remboursables pour la rénovation domiciliaire

Les gouvernements du Québec et du Canada offrent un crédit d'impôt aux propriétaires de maison individuelle qui effectuent des rénovations en 2009. Le coût des travaux doit s'élever à 20 000 dollars pour que vous puissiez profiter du crédit provincial maximal de 2 500 dollars et du crédit maximal du fédéral de 1 350 dollars.

Remboursement de la TPS et de la TVQHabitation neuve et rénovations majeures :

La personne qui achète une maison intergénérationnelle d'un constructeur ou qui la construit peut avoir droit, à certaines conditions, à un remboursement partiel de la TPS et de la TVQ. Toutefois, si le prix d'achat ou la valeur marchande de la maison dépasse 225 000 dollars, le remboursement de TVQ sera nul. Pour la TPS, le plafond est fixé à 450 000 dollars.

Crédits d'impôt pour l'hébergement d'un parent ou à titre d'aidant naturel

Le gouvernement du Québec offre un crédit d'impôt remboursable de 581 dollars aux enfants qui hébergent un parent âgé de 70 ans et plus (60 ans et plus si la personne est handicapée). Un autre crédit de 476 dollars s'ajoute si la personne âgée a un revenu annuel de 21 135 dollars ou moins.

Le gouvernement fédéral offre aussi un crédit d'impôt non remboursable maximal de 4 198 dollars au contribuable qui a une personne âgée à charge. Pour que celle-ci soit admissible, son revenu doit être inférieur à 18 534 dollars.

Rénovation Québec

Certaines municipalités participent à Rénovation Québec, un programme-cadre du gouvernement provincial. Les résidents des villes participantes pourraient obtenir une subvention pour l'ajout d'un logement, par exemple. Informez-vous auprès de votre municipalité.

Sources : Claude Laferrière, professeur de fiscalité à l'UQAM ; SHQ et SCHL.

EST-CE POUR VOUS ?

Il faut bien réfléchir avant de se lancer dans l'aventure intergénérationnelle. Voici des questions à vous poser :

Êtes-vous proche de vos parents ? Aimez-vous leur compagnie ? Avez-vous déjà cohabité ? Comment cela s'est-il passé ?

Êtes-vous tolérant et souple ? Connaissez-vous vos limites ?

Vos parents risquent-ils de s'ingérer dans votre vie privée ?

Qu'attendez-vous de ce projet ? Quelles sont les attentes de vos parents ?

Pouvez-vous discuter ouvertement avec vos parents lorsque des problèmes surgissent ?

L'état de santé de vos parents exige-t-il des soins actuellement ? Quels pourrait être leur situation plus tard ?

Quels seront vos arrangements financiers ?

Source : Manon Boulianne, Carole Després et Karine Genest.

aplus@transcontinental.ca

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