Sociofinancer sa mise de fonds pour une maison?

Publié le 31/01/2015 à 08:00

Sociofinancer sa mise de fonds pour une maison?

Publié le 31/01/2015 à 08:00

Par Nafi Alibert

Down Payment Dreams aux États-Unis, WiSEED immobilier en France, Realty Mogul en Grande-Bretagne; les plateformes de financement participatif spécialisées en immobilier aident les aspirants propriétaires à accumuler le capital nécessaire pour acheter la maison de leurs rêves. Une pratique qui n’a pas encore vu le jour au Québec et au Canada. Pourquoi ?

Le dilemme que soulève le financement participatif d’un projet immobilier au Canada se trouve dans la nature de la récompense qui sera proposée aux investisseurs. Encore aujourd’hui, aucun profit financier ne peut être reversé en remerciement du soutien reçu. « Dans certains pays, les gens deviennent en partie actionnaires de la maison en échange de leur contribution à la mise de fonds, c’est ce qui n’est pas légal au Canada », dit Thomas Duperré, cofondateur de haricot.ca, une plateforme québécoise de sociofinancement.

Les termes de l’échange

Une place au premier rang d’un concert, une invitation au lancement d’un album ou une copie dédicacée d’un roman… Voilà le type de récompenses qui entrent dans le cadre prévu par la réglementation québécoise entourant les pratiques de sociofinancement qui se résument à un échange de bons procédés.

« Là où ça se complique, c’est lorsqu’en retour de votre participation, on vous promet un rendement ou une plus-value sur votre investissement », prévient Sylvain Théberge, directeur des relations médias à l’Autorité des marchés financiers (AMF).

Au Québec, ce qu’on appelle le financement participatif en capital est tout simplement prohibé. Des plateformes comme le portail français WiSEED Immobilier, qui affirme être en mesure d’offrir un rendement annuel de 10 % à certains investisseurs, ne pourraient donc pas voir le jour à l’heure actuelle, car leurs méthodes de financement impliquent l’émission de valeurs mobilières (action, part…).

« Dès que l’on propose un actif, on tombe dans ce qu’on appelle une activité qui est encadrée par la loi sur les valeurs mobilières. À ce moment-là, vous devez au préalable être inscrit comme courtier en valeurs mobilières, ou au moins comme courtier restreint en valeurs mobilières », précise M. Théberge.

Internet, un espace public

Dans un souci de protection du consommateur, l’AMF interdit à quiconque de vendre des titres au grand public sans remettre de prospectus, un document qui décrit très précisément la nature et les conditions de l’investissement. D’où la nécessité d’un courtier accrédité à préparer « tout ce qui entoure la paperasse de cet investissement ».

« En tant que passerelle, nous n’avons pas le droit de faciliter la communication de valeurs mobilières entre les contributeurs et le porteur de projet sur des réseaux ouverts », ajoute M. Duperré, qui s’est vu contraint de refuser l’accès à haricot.ca à des personnes qui voulaient « carrément » acheter une maison. « On a insisté sur le fait que ça prend quand même un retour de récompense, en échange de la contribution. On a dit non, car ils voulaient que les gens deviennent des sortes d’actionnaires de la maison. »

Au même titre qu’un saxophoniste a le droit de s’installer dans le métro pour récolter de l’argent avec son instrument, il est tout à fait légal de solliciter l’appui financier auprès d’inconnus pour amasser sa mise de fonds en vue d’acheter une maison… à condition qu’il s’agisse d’un don ou qu'on redouble d’imagination pour proposer une récompense non monétaire à ses investisseurs.

Pour emboîter le pas sur d’autres pays, l’AMF travaille actuellement avec les autres régulateurs canadiens pour être en mesure de proposer d’ici l’été prochain deux nouvelles dispositions visant à réactualiser les réglementions qui encadrent la collecte de fonds sur des portails de sociofinancement. Dossier à suivre, donc.

 

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