Immobilier, créativité et collectivité


Édition de Octobre 2018

Immobilier, créativité et collectivité


Édition de Octobre 2018

La montée des prix freine les jeunes acheteurs, croyez-vous ? Au contraire !

Pas facile pour les jeunes d'accéder à la propriété. Deux obstacles majeurs se dressent devant eux : les prix atteignent des sommets historiques et l'obtention d'un prêt se complique de plus en plus en raison du durcissement des règles hypothécaires. De quoi décourager les milléniaux ? Oh que non ! Plus optimistes que jamais, les jeunes achètent. Plusieurs raisons expliquent ce phénomène.

D'abord, selon Dominic St-Pierre, directeur principal de Royal LePage pour la région du Québec, les jeunes seraient fondamentalement plus pressés d'acheter que les membres de la génération précédente, les X (de 40 à 50 ans). «Ils n'attendent pas d'être en couple, d'avoir un emploi stable ou de fonder une famille pour acquérir une propriété, remarque-t-il. Ils perçoivent l'immobilier comme un bon investissement, à faire le plus rapidement possible.»

À preuve, selon un sondage Léger réalisé en 2016 pour le compte de la Fédération des chambres immobilières du Québec (FCIQ), de l'Association des professionnels de la construction et de l'habitation du Québec (APCHQ) et du Fonds immobilier de solidarité FTQ, 50 % des 18 à 34 ans qui voulaient acquérir une propriété dans les cinq prochaines années considéraient cet achat comme un investissement à long terme, tandis que seulement 31 % des 35 à 49 ans et 18 % des 50 ans et plus partageaient la même opinion.

Cet empressement à payer des taxes foncières s'explique également par la hausse continuelle des prix. «Les milléniaux ont conscience que s'ils retardent leur achat à l'an prochain, ils devront payer encore plus cher pour la même propriété», précise Dominic St-Pierre, un «X» de 42 ans. Avec raison, car dans un marché immobilier en pleine effervescence - en juillet 2018, la province de Québec connaissait un 16e trimestre consécutif de croissance, selon la FCIQ -, le temps joue contre les milléniaux.

Selon une étude de Royal LePage, la hausse des prix des maisons au Canada, de mars 2017 à mars 2018, a fait chuter de 15 % le pouvoir d'achat d'un couple de milléniaux âgés de 25 à 31 ans gagnant un salaire combiné de 76 296 dollars (en se basant sur le salaire médian moyen de Statistique Canada en 2015, ajusté en prenant compte de l'inflation). «Résultat : pour payer le même prix qu'en 2017, les acheteurs doivent sacrifier 120 pieds carrés de leur propriété de rêve», indique Dominic St-Pierre.

Ce qui ajoute à la complexité de l'achat, ce sont les nouvelles règles en matière d'hypothèque qui obligent les emprunteurs, depuis janvier 2018, à se qualifier soit sur le taux du terme de 5 ans fixe de la Banque du Canada, soit sur le taux de leur contrat majoré de 2 %, le plus élevé des deux étant celui qui prime. Ce test de résistance vise à préparer les propriétaires à une remontée probable des taux. La conséquence : un couple au salaire combiné de 76 292 dollars a vu son pouvoir d'achat chuter de 64 157 dollars depuis ce durcissement des règles, passant d'une hypothèque maximale de 389 340 dollars à 325 183 dollars (source : Royal LePage). De quoi réduire les attentes !

Oui, ils ont la vie dure en immobilier. En revanche, les milléniaux profitent d'une économie qui roule à plein régime. «Le marché de l'emploi leur est très favorable. Pénurie de main-d'oeuvre et taux de chômage au plancher leur procurent des emplois payants», constate Mélanie Robitaille, vice-présidente directrice générale de Rachel Julien, un promoteur qui pilote les projets U31 dans Rosemont et Laurent & Clark dans le centre-ville de Montréal. Ils sont donc forcément optimistes. Selon l'Enquête annuelle RBC sur les tendances du marché résidentiel, 50 % des milléniaux se disent très susceptibles ou plutôt susceptibles d'acheter une maison d'ici deux ans, soit une hausse de 7 % par rapport à 2017.

Dans ce contexte de prix élevés, les milléniaux doivent user de créativité pour parvenir à leurs fins. «Ils sont prêts à couper dans la superficie de leur condo pour devenir propriétaires, mais veulent en échange une cuisine hyperfonctionnelle au design raffiné», affirme Nancy Shoiry, directrice générale de la Société d'habitation et de développement de Montréal (SHDM), promoteur d'Accès Condos, un programme de projets immobiliers visant les premiers acheteurs. En banlieue, ils acceptent de s'éloigner davantage des centres. Ainsi, des villes rurales comme Mirabel connaissent un boom immobilier.

Si les salaires des milléniaux permettent souvent d'honorer les paiements mensuels d'une hypothèque, disent les experts, là où le bât blesse, c'est au chapitre de la mise de fonds, qui prend de l'ampleur avec la hausse générale des prix. La solution créative des milléniaux : ils lancent un appel à l'aide auprès de leurs proches. «Les parents fournissent de plus en plus souvent une partie ou la totalité de la mise de fonds», remarque Sylvie Rousson, courtière en prêts hypothécaires chez Multi-Prêts Hypothèques. La bonne santé financière de leurs parents facilite ce transfert de richesse.

Les milléniaux sont des gens de communauté, non seulement sur les réseaux sociaux, mais aussi dans le vrai monde. L'un des plus importants critères lorsqu'ils partent en quête d'une propriété, c'est de vivre près de leurs amis. «C'est presque un entêtement pour eux. Ils ne voient pas leur milieu de vie autrement. Auparavant, le coût et la proximité des services étaient des facteurs plus importants», remarque Dominic St-Pierre, de Royal LePage.

Si la majorité rêve toujours d'une unifamiliale, les autres craquent pour les complexes multirésidentiels avec des espaces communs de qualité. «Ils ne veulent pas une piscine, un gym et un espace de travail partagé juste pour épater la galerie. Ils les utilisent vraiment. Ce sont des gens qui recherchent la simplicité au quotidien», dit Mélanie Robitaille, 37 ans, une «vieille» milléniale.

L'esprit d'entraide est également fort entre voisins milléniaux. Besoin d'une échelle ? Le millénial publie un statut sur Facebook. Les réponses positives suivent instantanément. «Beaucoup d'amitiés se forment dans nos complexes», ajoute Mélanie Robitaille, qui vit elle-même entourée de milléniaux. Le voisin n'est plus considéré comme un être suspect à éviter. Ce même état esprit se voit dans les ruelles de Montréal, où de véritables communautés se tissent.

D'où l'émergence de milieux de vie résidentiels entièrement voués aux désirs des milléniaux, comme le complexe Yimby, dans le quartier Rosemont, qui a été conçu pour et par des milléniaux. Dans ce projet d'appartements locatifs, le promoteur Réseau Sélection, qui a fait sa marque dans les complexes de résidences pour aînés, veut créer une communauté où les locataires - lire les milléniaux - échangent dans de vastes espaces communs comprenant lounge, cuisine communautaire, espace de travail partagé et salle de jeux. Sur place, un gestionnaire de communauté organise même des activités, comme dans un immeuble pour personnes âgées, en vue de maximiser les liens sociaux. Est-ce qu'on joue au bridge ce soir ?

Vive le locatif

Si l'appel de la propriété résonne encore dans la tête de la majorité des milléniaux, l'attrait du locatif, comme l'illustrent les complexes Yimby (un deuxième est dans les cartons à Terrebonne), se fait de plus en plus ressentir. Les prix stratosphériques en rebutent plusieurs, mais généralement, les milléniaux qui signent des baux désirent surtout conserver une plus grande autonomie. «Les jeunes locataires se tiennent toujours prêts pour un nouveau départ, comme un long voyage en Asie ou un emploi à l'autre bout du Canada», constate le planificateur financier Ian Sénéchal, coauteur du livre D'endetté à millionnaire, un guide des finances personnelles qui vise les milléniaux.

Cet engouement pour le locatif s'observe sur montrealguidecondo.ca, un site de mise en marché de projets immobiliers partout au Québec. Alors qu'en mai 2017, seulement 1,7 % des visiteurs de 25 à 34 ans y magasinaient les projets neufs en location, ils étaient 7 % un an plus tard, soit une hausse de 411 %.

Infidélité hypothécaire

En matière de prêt hypothécaire, la démarche des milléniaux a radicalement changé. Si les baby-boomers accordaient une confiance aveugle à leur banquier, quitte à ne jamais changer d'institution financière jusqu'à leur trépas, les milléniaux se caractérisent par leur infidélité en matière de finances personnelles. Ils n'attendent aucune faveur de leur propre institution bancaire. «Ils ont parfaitement compris les règles du marché. À savoir que tout se négocie dans la vie, y compris son taux d'intérêt», dit Sylvie Rousson, de Multi-Prêts Hypothèques. Autre différence : les jeunes ne craignent pas de s'engager auprès des banques virtuelles, ce qui n'est pas encore le cas chez les baby-boomers et les X, qui s'en méfient, préférant les institutions bancaires établies.

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