Quand l’impôt tient des parents à l’écart du marché du travail

Publié le 19/01/2018 à 14:04

Quand l’impôt tient des parents à l’écart du marché du travail

Publié le 19/01/2018 à 14:04

Alors que l’économie canadienne roule à plein régime et que les entreprises éprouvent des difficultés à recruter de la main-d’œuvre, l’économiste Alexandre Laurin de l’Institut C.D. Howe se penche sur l’effet que peut avoir l’impôt sur la motivation de jeunes parents à réintégrer le marché de l’emploi. Les résultats de son enquête sur le sujet ont été publiés la semaine dernière.

L’étude porte particulièrement sur ces parents, le plus souvent des femmes, qui décident de rester à la maison pour s’occuper des enfants en bas âge. Elle décortique l’exposition de ces contribuables à ce qu’on appelle en fiscalité le «taux effectif marginal d’imposition» (TEMI) et sa variante, le «Taux d’imposition au travail» (Traduction libre de participation tax rate, une mesure utilisé par l’OCDE).

En plus de l’impôt payé sur les derniers dollars gagnés, le TEMI tient compte de l’effet de chaque dollar supplémentaire sur l’accès aux programmes d’aide financière gouvernementaux. Cet accès est graduellement limité, jusqu’à être perdu, à mesure que le revenu d’un ménage augmente, ce qui constitue aux yeux des fiscalistes une forme d’impôt sur le revenu. Quant à sa variante, c’est l’addition de toutes les pertes, impôt et déductions déclenchés par à un revenu de travail.

L’étude de C.D. Howe observe que ce sont les familles à faible revenu qui sont frappées par le TEMI le plus élevé. C’est normal puisqu’il s’agit des ménages qui profitent le plus de ces programmes dits «sociofiscaux» dont l’accès est fonction du revenu familial. On pense notamment aux programmes d’aide financière destinés aux parents de jeunes enfants.

Une fois épuisés les congés parentaux, il est fréquent qu’un parent retarde le retour au travail pour rester à la maison s’occuper des enfants. «Le plus souvent, il s’agit de la mère», rappelle Alexandre Laurin. Quand vient le moment de songer à retourner travailler, certains parents constatent que les gains financiers d’un deuxième salaire, lourdement imposé, ne valent pas la peine. En effet, un deuxième revenu coupe l’accès, partiellement ou totalement, à divers programmes sociofiscaux.

L’étude de l’Institut C.D. Howe a exploré des scénarios dans lesquels un seul parent travaille. La firme de recherche a calculé les gains nets que procurerait au ménage un second salaire. Elle évalue une famille comptant deux jeunes enfants dont le revenu, basé sur un salaire unique, est de 30 000 dollars. Elle a calculé le «taux d’imposition au travail» sur le deuxième salaire, lui aussi établi à 30 000 dollars, pour chaque province. Dans huit provinces sur dix, ce taux se situe entre 42 et 50 %. Autrement dit, entre 42 et 50% de la contribution du deuxième parent s’évapore en impôt, en pertes de divers bénéfices et autres déductions. «Au-delà de 50%, le deuxième parent est beaucoup tenté de retourner sur le marché du travail», observe l’économiste à la base de l’étude.

La situation est plus corsée encore dans les deux autres provinces. En Ontario, ce taux s’élève à 53 % et grimpe à 62%... au Québec! Seulement 38 cents par chaque dollar générer par le parent qui retourne au travail aboutit dans le portefeuille du ménage québécois lorsque les deux conjoints gagnent 30 000 dollars.

L’auteur de l’étude a refait l’exercice, mais en supposant cette fois que le parent déjà au travail génère des revenus d’emploi de 90 000 dollars et l’autre, toujours de 30 000 dollars. Le taux d’imposition au travail de ce dernier diminue alors à 41% au Québec, un chiffre qui surpasse encore de loin toutes les autres provinces.

Comment expliquer cela? C’est l’effet pervers d’une politique généreuse envers les jeunes familles, note Alexandre Morin. Au Québec, les parents bénéficient d’un meilleur soutien de l’État. Comme cette aide est modulée en fonction du revenu du ménage, l’effet d’une hausse de revenu se fait sentir de manière plus marquée qu’ailleurs au pays.

«Il faut souligner qu’ailleurs au Canada, en plus de l’impôt supplémentaire à payer, les parents doivent assumer des frais de garde substantiels en comparaison du Québec», rappelle l’économiste Alexandre Laurin. Cette dépense apparaît lorsque le deuxième parent retourne au travail, un coût grandement atténué au Québec.

Malgré ce que sous-tendent les chiffres, les mères québécoises sont plus enclines à regagner le marché du travail qu’ailleurs au Canada grâce aux garderies subventionnées et au crédit d’impôt pour frais de garde.

«Pour inciter plus parents à intégrer le marché du travail, les autres provinces auraient intérêt à imiter le Québec et à instaurer un crédit d’impôt pour les frais de garderie», croit Alexandre Laurin.

 

 

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