Entre antihistaminiques et immunothérapie, la guerre au pollen de l’herbe à poux exige rigueur et investissement. Exercice de comparaison.

Ambrosia : un si joli nom pour une plante qui fait vivre deux mois d’enfer à 13% des Québécois. Mieux connue sous le nom d’herbe à poux, son pollen irrite les muqueuses de ses victimes à chaque fin d’été au point d’en perturber sérieusement le quotidien.

«Certaines personnes deviennent profondément misérables pendant la saison», résume l’allergologue Jacques Hébert, de la Clinique spécialisée en allergie de la Capitale.

À la pharmacie

Premier remède à la misère : l’antihistaminique, vendu sans ordonnance, qui contribue à soulager les symptômes de la rhinite allergique, comme les éternuements, l’écoulement nasal ainsi que les picotements aux yeux et à la gorge. «Les antihistaminiques diminuent les symptômes chez environ 9 personnes sur 10», dit le pharmacien-propriétaire Pierre-Marc Gervais. «Mais comme l’efficacité varie selon l’individu, il faut en essayer quelques-uns avant de déterminer celui qui convient.»

Allez savoir pourquoi, les antihistaminiques figurent parmi les produits en vente libre les plus chers sur le marché, remarque le pharmacien Olivier Bernard, auteur du blogue Le Pharmachien. «Ils coûtent davantage que les produits contre le rhume, par exemple. Alors qu’en réalité, il n’y a que trois molécules différentes dans les antihistaminiques disponibles, dont deux sont très similaires!»

De fait, les antihistaminiques de deuxième génération (commercialisés sous les marques Reactine, Claritin et Aerius) coûtent environ 1$ le comprimé pour un effet de 24 heures. Si le budget coince, préférez-leur les marques maisons des détaillants, environ 33% moins chères que celles des fabricants pharmaceutiques – et tout aussi efficaces, conseillent Pierre-Marc Gervais et Olivier Bernard. Évitez aussi de tomber dans les pièges du marketing : bien qu’elles soient plus chères, les gélules ne sont pas plus efficaces que les bons vieux comprimés. Prudence également avec les médicaments combinant un décongestionnant, dont les effets secondaires peuvent être importants, disent-ils.

«L’antihistaminique doit être pris de façon préventive et non pas comme traitement, explique Olivier Bernard. Il faut le prendre le matin, au moins 30 minutes avant de sortir. Une fois que la réaction allergique est déclenchée, c’est trop tard.»

Un vaporisateur nasal à base de cortisone –sans prescription mais situé derrière le comptoir du pharmacien – peut aider à soulager certains symptômes comme la congestion. On peut l’utiliser seul ou en combinaison avec les antihistaminiques, précise Olivier Bernard. Mais là aussi, il faut y mettre le prix : un flacon de Nasacort, par exemple, coûte environ 18$ pour 60 doses. On l’utilise à raison d’une ou deux vaporisations dans chaque narine, une à deux fois par jour. Enfin, si votre allergie s’attaque davantage aux yeux, pensez à vous procurer des gouttes antihistaminiques prescrites par le médecin ou l’optométriste (prix variables).

Chez l’allergologue

Au-delà du soulagement des symptômes, l’immunothérapie vise à désensibiliser le patient en lui administrant l’agent allergène de façon récurrente. Deux méthodes de traitement sont disponibles au Québec: par injection ou par comprimés sublinguaux. Aucun n’est remboursable par le régime public d’assurance médicaments.

Le traditionnel traitement par injection coûte de 200$ à 300$ par année mais demande une discipline de fer, précise l’allergologue Simon Hotte, de Gatineau. Vous devrez vous déplacer chez l’allergologue une fois par semaine pendant 4 à 6 mois, puis une fois par mois pendant 3 à 5 ans. Un budget d’au moins 1000$ sur le long terme, en plus des déplacements. «C’est un traitement efficace chez envion 85% des patients qui souffrent de rhinite allergique de modérée à sévère, mais qui peut entraîner des effets secondaires comme des réactions cutanées.»

À la maison

Depuis près de deux ans, un autre traitement est disponible pour les victimes de l’herbe à poux : Ragwitek, un comprimé fabriqué par Merck. Plus pratique que l’immunothérapie par injection, il se prend à la maison et comporte moins de risques d’effets secondaires. Mais le traitement coûte bonbon: environ 800$ par année pendant trois ans.

Est-il efficace ? Jugeant que des études sur plusieurs années étaient nécessaires pour le déterminer, l’Institut national d’excellence en santé et en services sociaux a recommandé au ministre de la Santé de ne pas inscrire Ragwitek sur la liste des médicaments remboursés. Le Dr Jacques Hébert, qui a participé aux études cliniques précédant la mise en marché du produit, n’est pas d’accord avec cette interprétation. D’ailleurs, le Ragwitek est remboursé par le gouvernement ontarien, remarque-t-il.

«C’est un médicament prometteur qui vient moduler la réponse immunologique à l’herbe à poux pour rendre les patients tolérants. Si on se base sur les autres traitements de rhinites allergiques par comprimés sublinguaux, on peut s’attendre à une efficacité d’entre 5 et 10 ans après la fin du traitement.»

À défaut de vous désensibiliser à vie, faites vos calculs.

EN RÉSUMÉ

Antihistaminiques (soulagement) :

Environ 60$ par saison – plus frais pour vaporisateurs nasaux et/ou gouttes pour les yeux, si pertinent – à recommencer tous les ans. 

Immunothérapie – injections sous-cutanées :

Environ 300$ par an pendant 5 ans. Durabilité : entre 5 et 10 ans.

Immunothérapie – comprimés sublinguaux (Ragwitek) :

Environ 800$ par an pendant 3 ans. Durabilité inconnue mais estimée à 5 à 10 ans.