C'est la dernière tendance en marketing, et ce n'est pas de la publicité. C'est toutefois, selon plusieurs experts, une excellente façon de faire valoir votre marque. Un outil incontournable, insistent-ils. Voici comment vous dépêtrer dans l'univers du marketing de contenu.
1. Qu'est-ce que c'est ?
Le marketing de contenu consiste à fournir des informations de qualité, bien documentées, pertinentes et utiles à vos clients et vos prospects dans le but d'avoir des interactions rentables avec eux. Ces informations ne concernent pas directement votre marque - c'est pourquoi ce n'est pas de la pub traditionnelle -, mais elles y seront associées d'une façon ou d'une autre.
Le précurseur en la matière est le fabricant de pneus Michelin, avec son fameux guide Michelin. L'objectif ? Que les automobilistes aillent à la découverte des restaurants et des hôtels recensés dans le guide (et usent les pneus de leur véhicule chemin faisant) !
Le contenu que vous offrez doit servir à : divertir, inspirer, informer ou convaincre. Aujourd'hui, ce type de «contenu» est diffusé principalement sur des plateformes numériques : sur votre site Web, Facebook, Twitter, YouTube, mais aussi dans la presse écrite (version Web ou papier), à la télévision, dans des conférences... Il prend la forme d'articles, de blogues, de fichiers balados (podcasts), de vidéos, etc.
La forme la plus répandue est le blogue, indique Stéphane Lagrange, associé chez Revsquare, qui participait en compagnie d'autres responsables du marketing de contenu en entreprise à une conférence sur le sujet, organisée par le Groupe Les Affaires, à Montréal, le mois dernier.
2. Quel impact le marketing de contenu a-t-il sur votre marque et vos ventes ?
Le marketing de contenu peut augmenter votre notoriété et attirer des clients éventuels. Fidéliser vos clients et partenaires. Développer votre base de données client. Et augmenter vos transactions. M. Lagrange énumère deux grandes réussites de marketing de contenu aux États-Unis. Le premier exemple est l'installateur de piscines River Pools, établi en Virginie. En 2009, à la suite de la récession, ses ventes chutent. Il réduit de 90 % son budget publicitaire de 250 000 $ et se met à écrire un blogue sur l'entretien des piscines. Sur son site, le trafic augmente de 150 %, et quand survient la reprise, ses ventes excèdent le niveau d'avant 2007.
Autre exemple, le logiciel de marketing américain HubSpot, dont le trafic et les ventes ont progressé en parallèle, grâce aussi à un blogue. «Chez Bombardier, à Montréal, le marketing de contenu a servi à tripler le nombre de candidats dans la banque de candidatures», a relaté Jean-François Deschênes, directeur de la stratégie Web.
3. D'où vient ce contenu qu'il faut offrir ?
En partie de sujets que vous aurez ciblés à l'interne, en discutant non seulement avec l'équipe de marketing et de communication, mais avec vos employés. Et il provient aussi de l'extérieur de l'entreprise, de sujets liés à votre produit et que vous aurez trouvés grâce à une veille. Par exemple, chez Gaz Métro, 30 % de ce qui est diffusé est généré par les différents services internes, tandis que 70 % du contenu est agrégé [pris ailleurs], signale Valérie Sapin, directrice du marketing. Chez Tourisme Montréal, c'est 50-50. L'organisme a même fait appel au public dans le cadre de l'initiative «MTL Moments», selon laquelle il s'agit d'envoyer des photos originales prises dans la ville. «L'important, c'est de bien déterminer la cible pour connaître le genre d'informations qui les intéressent», indique Mme Sapin.
4. Qui produit ce contenu à l'interne ?
Il faut nommer un responsable de l'équipe marketing pour gérer ce contenu et pas votre stagiaire, insiste Frédéric Ranger, directeur des communications et médias interactifs chez Tourisme Montréal. Chez BBA, une firme d'ingénieurs, on a recours à un rédacteur pigiste pour interviewer les experts de l'entreprise et ensuite rédiger des articles. «Les directeurs de produits et les employés du marketing n'ont pas le temps ni les compétences pour faire ce travail», ajoute pour sa part Jean Éthier, pdg d'IMS Identification Multi Solutions, une PME qui offre des services d'emballage, d'étiquetage et d'imprimerie pour les fabricants.
«On ne peut pas s'improviser rédacteur d'articles du jour au lendemain, renchérit Philippe Regnoux, de l'agence de communication Galaxie Presse International. Stéphane Lagrange abonde dans ce sens. «Il faut que les articles répondent à des critères journalistiques, car, rappelons-le, ce n'est pas de la publicité. De plus, «la plupart des gens préfèrent découvrir une entreprise par des articles plutôt que de la publicité».
M. Lagrange signale le cas récent d'un article publié dans le prestigieux New York Times, sur des soutiens-gorge munis de puces électroniques. Cet article était «propulsé» par la firme Intel. Il mentionne aussi la non moins prestigieuse revue The Economist, qui publie du contenu commandité par General Electric dans une section Web appelée gelookahead.economist.com. À la Banque de développement du Canada (BDC), le responsable du marketing de contenu est d'ailleurs un ancien journaliste.
5. Est-ce que le marketing de contenu vaut la peine pour une PME ?
«Certainement, répond Jean Éthier, d'IMS Identification Multi Solutions. Cela a augmenté ma notoriété et raccourci mon cycle de vente, dit-il. Au début, je devais courir après mes directeurs de produits. Maintenant, nous publions deux blogues par semaine et trois infolettres par année.» IMS travaille avec l'agence Exo B2B marketing. Les sujets sont discutés avec les experts d'IMS et rédigés par un blogueur, sous le nom des experts. Les blogues sont tweetés et on peut les lire sur le site Web. L'agence Exo achète aussi des mots-clés sur le Web et effectue la veille qui fournit les deux tiers des sujets diffusés aux abonnés. Résultat : le nombre de visites sur son site a presque doublé depuis 2009.
6. Est-ce que le marketing de contenu se limite au B2C ?
Non. IMS Identification Multi Solutions fait du B2B. Mais les méthodes sont différentes. Chez le fabricant de chocolats Hershey, le contenu est surtout divertissant. «Nous nous inspirons d'une liste de 20 types de contenu, relate Martin Baker, directeur de la stratégie de contenu numérique chez Hershey : du contenu qui nous rappelle que la vie est courte ; que l'on peut réaliser ses rêves ; qui révèle des secrets ; qui nous pousse à agir ; qui nous surprend ; qui nous faire rire ou sourire...»
7. Pourquoi faut-il, plus que jamais, que ce contenu soit référencé par un moteur de recherche sur le Web ?
Stéphane Lagrange cite une récente étude de la firme américaine de recherche Forrester, selon laquelle 80 % des acheteurs utilisent un moteur de recherche pour trouver de l'information sur un produit avant de passer à l'achat.
Plus important, encore, dans 57 % des cas, la décision des consommateurs est prise avant de communiquer avec un conseiller aux ventes.
8. Comment s'assurer de bien rejoindre vos clients ou prospects sur le Web, où est diffusée une foule d'informations ?
Il s'agit de préciser les mots-clés les plus porteurs pour votre domaine d'activité et de vous en inspirer pour produire un contenu que vos prospects pourront trouver. Stéphane Lagrange livre sa recette : «Faites une liste de toutes les questions que vos prospects pourraient avoir, et utilisez tous les moyens à votre disposition pour y répondre. Il y a fort à parier que vos questions contiendront tous les bons mots-clés». Il faut que votre contenu soit facilement partageable et donne un lien direct à vos médias sociaux d'entreprise, signale de son côté Yan Desjardins, vice-président au marketing de Ludis Media, une agence de marketing numérique.
9. Qui sont les champions du marketing de contenu au Québec ?
La Banque Nationale est en un, notamment avec son portail Jecomprends.ca, dans lequel elle fournit de l'information financière aux gens afin qu'ils viennent frapper à sa porte. La Banque raconte aussi plusieurs histoires d'entrepreneurs qui ont réussi et qui sont, bien entendu, clients chez elle. Telus en est un autre avec son magazine télé Génération INC., également déployé sur le Web et dans la presse écrite.
10. Comment mesurer le rendement de l'investissement ?
Pas facile. Telus n'y est pas encore arrivée et elle a investi des sommes importantes en télévision. Les experts disent qu'il ne faut pas s'attendre à un lien direct entre le marketing de contenu et une hausse des ventes. «C'est moins direct qu'un blitz publicitaire, mais, contrairement au blitz qui est éphémère, le contenu a une durée éternelle», dit Stéphane Lagrange. Selon Martin Baker, de Hershey, ce qu'on peut mesurer plus facilement, c'est le rendement par rapport aux objectifs (notoriété, trafic, etc.), la portée et l'engagement.