Qu’ils retirent des fonds au guichet automatique ou qu’ils fassent sonner les tiroirs-caisses de leur commerce, les Canadiens veulent tous la même chose : de vrais billets. Pour s’assurer que c’est ce qu’ils reçoivent, la Banque du Canada veille au grain.
Le service de la monnaie, le plus volumineux avec ses 270 employés, est responsable de toutes les étapes du cycle de vie des billets de banque canadiens, de la conception à la destruction, en passant par la distribution et l’appui aux forces policières pour la lutte à la contrefaçon. Une lourde tâche, si on considère que 1,8 milliard de billets sont en circulation, pour une valeur totale de 53 milliards de dollars. Contrairement à ce qu’on pourrait croire en constatant la popularité croissance des paiements électroniques, le volume de billets en circulation augmente de 4 à 5 % chaque année.
Cap sur la nouvelle série
Dans les bureaux de la Banque, l’excitation est palpable : dès novembre prochain, les Canadiens découvriront la nouvelle série de billets. D’abord les 100 $, puis les 50 $ en mars 2012, suivis des 20 $, 10 $ et 5 $ d’ici la fin de 2013. En polymère plutôt qu’en papier de coton et dotés de nouveaux éléments de sécurité, ces nouveaux billets ont nécessité des années de préparation.
Immédiatement après avoir terminé la dernière série — L’épopée canadienne, émise de 2001 à 2004 — l’équipe de recherche et développement a commencé à plancher sur la suivante. Une douzaine de chimistes et d’ingénieurs travaillent en permanence sur ce qu’ils considèrent être un objet de haute technologie. La Banque ne conçoit pas elle-même les éléments de sécurité, mais ses spécialistes doivent comprendre les nouveautés et les tendances dans le marché, et juger de la fiabilité des éléments de sécurité proposés par les fournisseurs.
En parallèle, une équipe d’économistes étudie les tendances quant aux moyens de paiement utilisés au pays (argent comptant, débit ou crédit) et estime la demande future pour les différentes coupures, question de répondre le plus adéquatement possible aux besoins à venir.
Ne cherchez pas les presses d’imprimerie dans les sous-sols de la Banque. L’institution sous-traite l’impression à deux firmes externes établies à Ottawa. Elle gère toutefois la distribution des billets, en collaboration avec les institutions financières. Ces dernières viennent échanger leurs vieux billets contre des nouveaux dans des points centraux, un processus sous haute surveillance.
D’ici la mise en circulation des nouveaux billets, les employés du service des communications auront fort à faire. Répartis entre le siège social d’Ottawa et les cinq bureaux régionaux de la Banque, ce sont eux qui doivent familiariser commerçants, consommateurs, institutions financières et forces policières avec les particularités des nouveaux billets. Surtout, ils doivent s’assurer que tous distingueront les vrais des faux grâce aux multiples éléments de sécurité.
Combattre la contrefaçon
Pour que les Canadiens utilisent les billets de banque en toute confiance, ils doivent juger minimes les risques de se retrouver avec de faux billets dans leur portefeuille ou leurs tiroirs-caisses. Selon les objectifs de la Banque du Canada, cette probabilité doit être en deçà de 50 faux billets par million de billets authentiques.
Après une explosion soudaine de la contrefaçon en 2004, où le nombre de faux billets a subitement grimpé à 470 par million de billets authentiques, l’institution était bien heureuse de dépasser sa cible en 2009, avec 45 faux billets par million d’authentiques.
Pour multiplier les embûches rencontrées par les faussaires, la banque centrale inclut dans ses billets de nombreux éléments de sécurité, comme la bande métallique, l’image fantôme (qui doit être identique au portrait sur le billet) et l’encre en relief.
Des outils qui ne servent cependant à rien si les Canadiens ne les utilisent pas. D’où les nombreuses activités de formation mises sur pied par le service de la monnaie de la Banque au fil des ans. En plus des marchands, ces activités ciblent les étudiants du secondaire, qui deviendront à coup sûr des consommateurs et travailleront peut-être dans le domaine du commerce de détail.
Reste que, chaque année, des faussaires, souvent associés au crime organisé, réussissent à introduire de faux billets dans le marché. Il faut alors sortir le bâton. Or, jusqu’à il y a quelques années, la contrefaçon était bien loin dans les priorités du système judiciaire canadien. Pour changer la donne, la Banque du Canada a établi des relations avec les forces policières du pays et les procureurs de la Couronne afin d’encourager les enquêtes et les poursuites. Les spécialistes de la Banque fournissent par exemple des documents aux procureurs de la Couronne pour faciliter leur travail. Les efforts commencent à porter leurs fruits, se réjouissent les gens de la Banque. Certains faussaires ont écopé de peines de 10 ou 12 ans l’an dernier, du jamais vu.
Pas de pièces de monnaie
La présence du Musée de la monnaie au rez-de-chaussée du siège social de la Banque du Canada contribue probablement à entretenir la confusion, mais la banque centrale ne s’occupe pas du tout des pièces de monnaie. C’est plutôt la responsabilité de la Monnaie royale canadienne.