Actif dans le milieu de la santé depuis 30 ans, ce professionnel agréé en ressources humaines a été confirmé dans ses fonctions de président et chef de la direction du CUSM le 6 mars par le gouvernement, dans la foulée de l’adoption de la loi 10. Normand Rinfret dirigeait déjà le CUSM officiellement depuis septembre 2012, après avoir assuré l’intérim pendant plusieurs mois. Dans le giron du CUSM ou de ses établissements depuis 1979, il a occupé de nombreux postes de direction avant d’atteindre le sommet du centre hospitalier. À la veille du déménagement de l’hôpital Royal Victoria au site Glen, Normand Rinfret évoque le présent et l’avenir du CUSM.
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Les Affaires – Que ressentez-vous tandis que le site Glen sera en activité réelle pour la première fois ce 26 avril ?
Normand Rinfret – Ce qui se produit est exceptionnel, fantastique. Un événement comme celui-ci survient peut-être une fois tous les 100 ans. Alors, d’en être témoin et de voir tout ce qu’on a fait pour en arriver là, c’est extraordinaire. On a eu la possibilité de repenser l’agencement des unités de soins. Par exemple, on a pu placer à côté des urgences des salles d’opération, des unités de soins intensifs, l’imagerie, puis, vers l’extérieur, les services ambulatoires. Dans les établissements construits depuis longtemps, ce n’est pas possible. Le site Glen, c’est un ensemble de haute technologie, bien développé pour assurer la fluidité. Et maintenant, la recherche est vraiment intégrée grâce à la présence de l’Institut de recherche sur le site Glen et au Centre de médecine innovatrice (CMI), en plein cœur du centre hospitalier.
L.A. – Tout cet équipement ultramoderne, ces locaux spacieux, pour un budget global de 2,355 milliards de dollars à l’heure de l’austérité… Cela vous semble-t-il pertinent ?
N.R. – C’est en effet un investissement majeur pour le Québec. Mais quand on a un patient gravement malade, on doit le soigner ici, on ne peut pas aller le faire soigner hors des frontières. C’est approprié d’avoir des centres universitaires.Avec le CUSM et le CHUM, avec lequel nous travaillons pour avoir une synergie, Montréal se positionne mondialement comme une ville dynamique sur le plan des sciences de la vie, de la recherche pharmaceutique, en biotechnologies. Un investissement de cette envergure est bénéfique aux Montréalais et aux Québécois en ce qu’il attirera des capitaux étrangers intéressés par la présence de plateaux techniques à jour. Par ailleurs, nous recevons 175 millions de dollars en bourses et en investissements pour la recherche. Or, on sait que chaque dollar investi rapporte de 3 à 4 $ dans l’ensemble de l’économie. Il est important que l’ensemble de la chaîne – recherche fondamentale ; application de la recherche [NDLR : ou essais cliniques] ; commercialisation – soit présente et puisse être réalisée rapidement. C’est attrayant pour un investisseur. Nous avons prévu que notre CMI puisse faire des essais cliniques sous contrat pour des entreprises privées. On va ainsi dynamiser la commercialisation de la recherche à Montréal.
En ce qui a trait au plateau technique clinique, c’est sûr qu’il faut l’utiliser à bon escient et que le Québec ne peut pas investir ainsi partout dans la province. Ce plateau doit servir à toute la population québécoise, et nous desservons un large territoire. Dans ce contexte, il est important de bien définir les rôles des établissements de première ligne (services de base), ceux des établissements de deuxième ligne (hôpitaux communautaires) et ceux des établissements de troisième et quatrième lignes (cas complexes), comme le CUSM. Avec cet investissement majeur qu’ont fait les Québécois, on doit s’assurer que le plateau technique sera utilisé à sa mesure, c’est-à-dire pour les troisième et quatrième lignes.
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L.A. – L’emménagement du CUSM au site Glen coïncide en effet avec une réorientation de sa vocation désormais consacrée aux cas pointus. Comment se passe cette transition ?
N.R. – Elle est dans le plan clinique depuis 2007. Cela fait longtemps qu’on s’y prépare. C’est un changement de culture au CUSM et dans le réseau, appuyé par la loi 10 qui est cohérente avec cette transformation, car elle pousse à l’intégration des réseaux pour le patient.
Aujourd’hui, les rôles sont bien définis. Maintenant, il faut coordonner le changement et inciter le patient à aller se faire soigner près de chez lui. Mais le choix du patient reste très important, et si, demain matin, un patient vient au CUSM parce qu’il veut y être soigné, on le soignera.
Il y a d’autres pistes à emprunter que celle qui consiste à transférer les patients dans le réseau. Nous avons, par exemple, encore beaucoup à améliorer sur le plan de la durée moyenne de séjour des patients hospitalisés [NDLR : 10,19 jours en 2012-2013, comparativement à 11,27 en 2008-2009]. La diminution des opérations invasives contribuera à cette amélioration. Aujourd’hui, 35 % des actes chirurgicaux sont faits à l’aide de techniques peu invasives. Dans deux ans, on devrait être à 50 %, ce qui nécessite un plateau technique de pointe. La réorganisation actuelle des soins au Québec est soutenue par le choix qui a été fait d’investir dans des équipements de cette envergure.
L.A. – Où en sont les relations avec votre partenaire privé, le Groupe immobilier santé McGill (GISM), qui réclame 150 M$ d’extras ? Que pensez-vous de cette expérience en PPP ?
N.R. – Malgré les réclamations, nous avons un très bon partenaire qui s’est donné beaucoup pour construire cette icône de santé moderne qu’est le site Glen. Quand on travaille sur des projets de cette envergure avec de gros budgets, c’est normal d’avoir de tels résultats. Nous avons bien géré nos équipes pour nous en tenir au contrat.
Quant au PPP, ça a été une bonne expérience. Qui aurait cru il y a quatre ans que la construction d’un ensemble de cette envergure se fasse en 40 mois ? Le résultat est là.
L.A. – L’implantation d’un centre comme le CUSM dans un quartier est source de bouleversement. Comment concevez-vous votre rôle dans la transformation de votre environnement ?
N.R. – L’implantation d’un centre hospitalier comme le nôtre, c’est valorisant pour un quartier, mais il faut bien sûr veiller à ce que le développement soit équilibré. Le CUSM aimerait occuper le rôle de grand partenaire dans la définition d’un développement coordonné. Nous collaborons déjà beaucoup avec les arrondissements et les associations de proximité.
Avec le déménagement, nous allons nous concentrer sur la prise de possession des lieux. Par ailleurs, notre rôle est de gérer un centre universitaire pour donner des soins aux patients, favoriser l’innovation et l’enseignement. Nous ne pouvons pas investir dans le développement économique du secteur où nous sommes situés. Nous resterons dans notre rôle, mais nous agirons comme un bon voisin, un bon partenaire, notamment pour mettre en place un plan particulier d’urbanisme.
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