Le président et chef de la direction du Groupe Canam presse le gouvernement Marois de mettre fin rapidement à l’incertitude fiscale qui met en péril l’économie québécoise. Marc Dutil se désole de ce que le PQ ait créé un climat de peur qui paralyse les décisions des entrepreneurs et risque de faire fuir les investisseurs.
«Je trouve dommage qu’on ait créé la peur de l’effet fiscal sans les revenus. Tout ce qu’on a fait jusqu’ici, c’est de la peur», a réagi l’homme d’affaires, après une allocution organisée par la Chambre de Commerce et d’industrie de Québec à l’occasion du Salon industriel de Québec.
L’entrepreneur beauceron n’a pas hésité à dire que l’alourdissement de la charge fiscale au Québec l’inciterait à déplacer ses investissements.
«Il y a des investissements qu’on fait sur une base annuelle et ils sont dirigés vers les endroits où ils rapportent le plus. On a des bons travailleurs au Québec, en Ontario, aux États-Unis. L’investissement va où il rapporte le plus. Vos fonds de pension l’exigent, ils veulent qu’on performe», a-t-il justifié.
Sans se prononcer sur l’idée que Pauline Marois devrait reculer dans son intention d’augmenter la charge fiscale des mieux nantis (paliers d’imposition, gains en capital, dividendes), M. Dutil a fait valoir l’importance du sens de la communauté. Si chacun payait sa juste part au lieu de payer et travailler au noir, la pression fiscale diminuerait.
«En tolérant la petite offense, on sème les graines de problèmes beaucoup plus importants», a-t-il plaidé.
Dans ce qui ressemblait à un cri du cœur, Marc Dutil s’est désolé de voir l’image de l’industrie de la construction ternie par les cas de corruption et de collusion. Il a rappelé que la tricherie n’avait pas de métier, ni de frontières.
«Il y a quatre ans, on démonisait les agences de publicité, c’étaient les cyclistes il y a huit mois, ce sera autre chose dans un an, mais c’est dommage que le message ne soit pas axé sur la tricherie dans toutes ses versions plutôt que sur le métier», s’est-il désolé, demandant aux médias d’user de leur influence aussi pour faire les nuances et montrer que tous ne sont pas corrompus dans l’industrie de la construction.
M. Dutil considère que les nouveaux règlements dans la restauration ont permis de lutter efficacement contre l’évasion fiscale, aussi espère-t-il que les règlements qui encadrent les appels d’offres dans l’industrie de la construction seronnt modulés pour mieux protéger les fonds publics. Il suggère notamment qu’il y ait automatiquement deux rondes de soumissions; la première pour trier les entreprises face à leurs compétences techniques, la seconde pour évaluer les coûts. À ce chapitre, il dénonce la politique d’octroi des contrats au plus bas soumissionnaire.
«Si vous refaites votre cuisine et que tous vos voisins l’ont refait pour 10 000$ et que vous avez un soumissionnaire à 8 000$, posez-vous des questions», a-t-il soumis en exemple, laissant entendre que la meilleure expertise n’est pas forcément celle qui coûte le moins cher.
D’autre part, il considère que les donneurs d’ordres dans les instances gouvernementales doivent investir pour mieux comprendre leurs coûts, comme le font les entreprises privées.
Amphithéâtre de Québec (page suivante)
Amphithéâtre de Québec
Quant aux contrats qui seront bientôt octroyés pour la construction de l’Amphithéâtre de Québec, Marc Dutil, qui souhaite en réaliser la structure, craint que le Parti québécois cède au lobby du bois pour les mauvaises raisons. Il espère que le gouvernement s’en remettra aux avis des architectes et ingénieurs qualifiés plutôt que de prendre une décision politique pour favoriser une industrie qui vit des années difficiles.
«Allons en soumission et que le meilleur gagne, a-t-il réagi. Ma job est d’aider Canam à grandir et je pense que 63 stades plus tard, si d’autres matériaux (que l’acier) avaient mieux performé, des gens économes et intelligents les auraient peut-être considérés, mais ça n’a jamais été considéré. Quand on a autant d’argent des contribuables à investir, est-ce qu’on prend un risque aussi important? Si quelqu’un qui est au pouvoir veut bâtir son hangar en bois, il le fera, c’est son argent, mais avec l’argent des autres, on n’a pas le droit de faire ça.»