Le nouvel appareil de gamme CSeries, que s’apprête à lancer Bombardier d’ici trois mois, ne pourrait atterrir ou décoller de l’aéroport du centre-ville de Toronto.
C’est la précision qu’a apportée le président et chef de la direction de Bombardier, Pierre Beaudoin, en réponse aux questions de la presse à propos de la supposée commande par Porter Airlines de 30 nouveaux avions CSeries.
Porter Airlines est ce transporteur ontarien dont le gros des activités est concentré à l’aéroport Billy Bishop de Toronto. L’emplacement stratégique de cet aéroport, érigé sur une des îles du lac Ontario qui borde le centre-ville torontois, explique en grande partie le succès du transporteur.
Selon le Wall Street Journal de ce matin, Porter Airlines s’apprêterait à annoncer une commande à Bombardier de 30 avions CS100, de 110 sièges, d'une valeur de 2,1 G$US. Du nombre, 12 constitueraient des commandes fermes, et 18 seraient en option.
Fondée par l'homme d'affaires Robert Duluce, Porter Airlines n’a pas commenté la nouvelle, mais a annoncé préparer une conférence de presse pour demain, mercredi 10 avril, à Toronto. Inconfortable, le président de Bombardier a dit vouloir laisser à Porter le soin de communiquer elle-même ses projets, refusant du même souffle de préciser si Bombardier prévoyait, d’une façon ou d’une autre, participer à la conférence de presse du transporteur torontois.
«À ma connaissance, l’aéroport Billy Bishop est réservé aux turbopropolseurs, a tout de même déclaré Pierre Beaudoin. C’est ce qui explique, a-t-il ajouté, que le Q400, un appareil turbopropulsé fabriqué en banlieue de Toronto par Bombardier, a eu tant de succès à Billy Bishop.»
M. Beaudoin s’exprimait ainsi à la sortie d’une conférence qu'il prononçait ce midi devant les membres du Conseil des relations internationales de Montréal. Un peu plus de 600 personnes se sont déplacées pour l'entendre.
M. Beaudoin a également ajouté que les pistes d’atterrissage et de décollage de l’aéroport des îles de Toronto n’étaient probablement pas suffisamment longues pour accueillir un appareil de modèle CSeries. La plus longue jettée de Billy Bishop aurait une longueur de 4 000 pieds, ou un peu plus de 1 219 mètres. «Je pense, a confié M. Beaudoin, qu’on aurait besoin d’un peu plus long pour la CSeries».
Dans une note aux investisseurs, l’analyste Cameron Doerksen, de la Financière Banque Nationale (FBN), a écrit ce matin que Porter pourrait faire des représentations auprès des autorités municipales de Toronto pour faire d’abroger le règlement interdisant l’usage des avions à réaction à l’aéroport du centre-ville.
À défaut d’y parvenir, la FBN estime que Porter perdrait son principal avantage concurrentiel (la proximité de l'aéroport Bishop) sur Air Canada et WestJet, deux concurrents surtout présents à l’aéroport Pearson, en banlieue de Toronto. Un tel face-à-face à Pearson International Airport, prévient l'analyste, rappelant au passage l'expérience malheureuse de Jetsgo, risquerait d'entraîner une réplique de la concurrence qui pourrait être fatale à Porter.
Cela dit, la partie n'est pas perdue d'avance pour l'entreprise de la famille Deluce. Mais étant donné l'importance des enjeux et de la concurrence déjà féroce d'Air Canada et WestJet, conclut l'analyste, un tel projet d'expansion ne saurait se réaliser sans déboursés significatifs pour Porter Airlines, une entreprise privée dont nul ne connaît bien encore l'importance des moyens financiers.
Aujourd'hui, l'action de Bombardier a progressé de 0,08$, ou de 2%, pour clôturer à 4,08$ à la Bourse de Toronto. Pendant ce temps, l'action de Wetjet a faiiblement décliné, pour clôturer à 24,94$, en baisse de 0,01$, tandis que celle d'Air Canada a terminé la séance à 3,24$, en hausse de 0,07$ sur le cours de fermeture de la veille à la Bourse de Toronto.