Construction F. Catania se retire du controversé Faubourg Contrecœur. Devlor, un constructeur habitué des projets du programme municipal Accès-Condo, a racheté la phase 4 du projet et l’entente du promoteur sur la sellette avec la Société d’habitation et de développement de Montréal.
Selon la SHDM, la compagnie de Paolo Catania et André Fortin avait déjà accumulé un retard dans la construction des 128 unités de la dernière phase du Faubourg. «Ils nous ont signifié qu’ils avaient de la difficulté à poursuivre le projet», explique Leslie Molko, porte-parole de la société paramunicipale.
Catania n'a pas rappelé LesAffaires.com, mais nous a fait parvenir un communiqué pour expliquer son retrait. «Il est connu que des procédures judiciaires sont présentement en cours relativement au Faubourg Contrecoeur. C’est pourquoi Construction F. Catania a choisi, afin d’assurer la continuité de ce projet dans les meilleures conditions, de céder la réalisation de la phase IV du projet, la seule présentement active, à un autre promoteur constructeur, déclare le pdg André Fortin, accusé de fraude et complot dans le scandale de corruption entourant ce projet. Construction F. Catania collabore avec l’ensemble des partenaires du projet pour faciliter cette transition. La Phase IV comprend 128 unités d’habitation abordables, dont 50 ont déjà été acquises.»
Les actifs transférés chez Devlor comprennent non seulement la détention des terrains, la propriété intellectuelle et les fondations déjà coulées pour les huit immeubles de la phase 4, mais aussi l’entente du promoteur controversé avec la SHDM.
Pour reprendre la phase 4, Devlor a mis sur pied Développement Faubourg Contrecœur. La nouvelle entité s’engage à respecter toutes les clauses de l’entente signée par Catania et la SHDM en 2006, sauf les délais. Il y aura des retards d’au moins un mois pour la livraison des unités du projet. «Les premières unités seront prêtes en septembre, et les dernières, en avril ou mai 2014», dit Benoît Laurin, pdg de Devlor.
Les acheteurs ayant déjà fait un dépôt pourront se faire rembourser s'ils désirent annuler leur offre. La SHDM précise aussi qu'elle fera de son mieux pour accomoder les acheteurs éprouvant des problèmes à cause des délais. Elle pourra par exemple fournir de l'espace d'entreposage pour ceux qui auront déjà vendu leur maison et qui devront se loger ailleurs en attendant la livraison, ou même les aider à trouver de l'hébergement. «Ce sera au cas par cas», dit Leslie Molko.
En vertu de son programme Accès-Condo, la SHDM s’engage à racheter toutes les unités d'un promoteur si elles ne trouvent pas preneurs une fois le projet terminé. Elle avance aussi un crédit d’achat de 10 % sur la mise de fonds des acheteurs, ce qui facilite la vente des habitations. La société paramunicipale a signé une telle entente avec Catania après la revente des terrains du Faubourg Contrecœur en 2006.
Ailleurs, Devlor construit notamment en sous-traitance le projet Bank, dans l’ancien siège social de la Banque Royale, rue Saint-Jacques dans le Vieux-Montréal. Il est également promoteur du projet Luz avec le Fonds de solidarité FTQ, dans le quartier Côte-des-Neiges.
Prix inconnu
Prix inconnu
Impossible de connaître le prix de la transaction réalisée entre Catania et Devlor, qui a refusé de le dévoiler. L’acte de vente des n’est pas encore notarié.
La transaction sera officialisée «mardi ou mercredi» selon Leslie Molko, porte-parole de la SHDM, soit le 12 ou le 13 mars.
En abandonnant le Faubourg Contrecœur, Catania se déleste aussi d’une partie de ses obligations financières liées au projet. Chez Devlor, Benoît Laurin confirme qu’il prend en charge les dettes contractées pour sa réalisation. «Il y a des transferts de créances avec différentes institutions», dit-il.
La Banque Nationale est le plus important créancier de Catania. Depuis 2009, l’institution financière a pris des garanties totalisant 91,25 M$ sur les terrains du Faubourg, selon le registre foncier. La Banque a refusé de répondre à nos questions.
Par ailleurs, les hypothèques légales de sous-traitants contre Catania s’accumulent depuis quatre ans. Pas moins de 18 entreprises ont notarié 45 de ces documents, émis pour garantir le paiement de créances.
Fraude et complot
Fraude et complot
En mai 2012, l’Unité permanente anticorruption a arrêté les dirigeants du Groupe Catania, Paolo Catania et André Fortin, dans la foulée de son enquête sur des malversations entourant la vente des terrains du Faubourg Contrecœur. La police a aussi arrêté le président du comité exécutif de la Ville de Montréal au moment de la transaction, Frank Zampino, l’ancien directeur général de la Société d’habitation et de développement de Montréal, Martial Fillion, et l’organisateur politique Bernard Trépanier. Ils sont accusés de fraude et de complot. Marital Fillion est mort d'une crise cardiaque début février.
Selon le Vérificateur général de la Ville de Montréal, Catania a acheté les terrains du Faubourg pour 4,4 M$, alors qu’ils en valaient 19 M$. L’ancienne direction de la SHDM disait avoir accordé cet escompte à cause des coûts de décontamination des lots, «évalués» à 14,6 M$, mais le chien de garde des comptes municipaux a jugé la somme largement excessive.
La SHDM a d’ailleurs entamé des poursuites contre le promoteur pour des «différends sur les coûts de décontamination du terrain». Le procès doit commencer en 2014.
Malgré cela, Catania continuait jusqu’ici les travaux au Faubourg. «C’est certain qu’il y a un certain malaise», convenait la directrice générale de la SHDM, Johanne Goulet, en entrevue avec Les Affaires en octobre 2012.