Oubliez les scénarios catastrophes: l'accord sur le nucléaire avec l'Iran ne fera pas chuter les prix du pétrole à 15 ou 20 $US le baril comme l'évoquent certains analystes, affirme la Financière Banque Nationale (FBN).
«Pour le moment, un choc qui ferait tomber les prix du pétrole et les empêcherait de remonter durablement paraît improbable», écrivent Pierre Fournier et Angelo Katsoras, respectivement analyse géopolitique et premier associé à la FBN.
Selon eux, il est en fait «plus probable» que la détérioration continue de la situation géopolitique au Moyen-Orient et en Afrique du Nord «fasse monter le prix du baril».
Depuis un an, le West Texas Intermediate a chuté de 53%, pour s'établir à 50,36 $US à la fermeture des marchés le mardi 21 juillet, selon Bloomberg.
À la suite de l'accord avec l'Iran, il faut s'attendre à ce que ce pays du Moyen-Orient augmente sa production et ses exportations de pétrole.
La production de l'Iran est aujourd'hui estimée à environ 2,7 millions de barils par jour, dont 1 million de barils sont exportés. À son apogée, en 1974, la production iranienne a atteint 6 millions de barils par jour, selon la FBN.
Au fil des ans, les sanctions économiques des États-Unis, de l'Europe et des Nations Unies ont toutefois miné l'industrie pétrolière du pays.
C'est pourquoi plusieurs analystes estiment que la levée graduelle des sanctions (sans doute à compter de 2016) devrait inonder le marché d'une nouvelle offre de pétrole, ce qui pourrait faire chuter les prix aussi bas que de 15 à 20 $US.
Mais selon Pierre Fournier et Angelo Katsoras, ces scénarios sont exagérés, car ils sous-estiment les difficultés qui attendent les producteurs iraniens.
Voici pourquoi.
Les défis de l'industrie iranienne
L'Iran possède 9% des réserves prouvées de pétrole dans le monde, ce qui classe le pays au 4e rang après le Venezuela, l'Arabie saoudite et le Canada, selon les estimations de la CIA, l'agence américaine du renseignement.
Par contre, sans des investissements majeurs des grandes pétrolières occidentales pour moderniser l'infrastructure et la technologie de l'Iran, «la production stagnera et finira par diminuer», affirment les deux analystes de la FBN.
Actuellement, la production de certains des plus grands gisements de l'Iran décline déjà de 15% par année, et des investissements d'au moins 30 milliards de dollars américains par année - et un temps considérable - seront nécessaires pour contrer la chute de la productivité, soulignait récemment The Economist.
«La mise en production de nouveaux gisements constituera aussi un défi», font remarquer Pierre Fournier et Angelo Katsoras.
Pourquoi?
- Premièrement, les pétrolières occidentales réduisent leurs investissements dans le monde, et les risques géopolitiques demeureront sans doute élevés en Iran pendant encore quelque temps, soulignent les deux analystes de la FBN.
«Les investisseurs étrangers opteront pour une approche graduelle et prudente, et exigeront des contrats avantageux.»
- Deuxièmement, les lois iraniennes interdisent actuellement la propriété étrangère d'actifs pétroliers et gaziers.
- Troisièmement, les technocrates de Téhéran, dont plusieurs sont près des Gardiens de la révolution (qui contrôlent une bonne partie de l'économie du pays), n'accueilleront «probablement pas à bras ouverts les nouveaux concurrents», affirment Pierre Fournier et Angelo Katsoras.
- Quatrièmement, l'OPEP et l'Arabie saoudite (grande rivale de Téhéran dans la région) pourraient mettre des bâtons dans les roues de l'Iran dans ses tentatives d'accroître sa production et ses exportations de pétrole.
Les prévisions du prix du baril de pétrole (la médiane) sont à la hausse, selon Bloomberg. Ainsi, au quatrième trimestre de 2015, les analystes voient le WTI à 62,50$. Et pour 2016 et 2017, ils tablent sur un baril de pétrole s'établissant respectivement à 67,80 et 71,00 $US.