ANALYSE – Bien que très attendue, la décision d’Ottawa de donner le feu vert à l’achat de la pétrolière albertaine par la société d’État chinoise CNOOC n’est pas surprenante. À vrai dire, le Canada pouvait difficilement s’opposer à cette transaction compte tenu des enjeux économiques en cause.
La Chine est le deuxième partenaire commercial du Canada. Bien que les États-Unis sont et demeureront notre principal partenaire pour des raisons géographiques et économiques évidentes (un marché riche, populeux, partageant une frontière commune), nos échanges avec la Chine s’accroissent à un rythme très rapide.
De décembre 2006 à décembre 2011, les exportations canadiennes dans l’empire du Milieu ont bondi de 171,8%, selon le National Bureau of Statistics of China. C’est le rythme de croissance le plus élevé des pays du G7. À titre comparatif, les expéditions de marchandises des États-Unis y ont augmenté de 125,7% sur la même période.
La Chine est donc devenue un marché incontournable pour les entreprises canadiennes, en premier lieu dans le secteur des ressources naturelles, mais aussi dans les biens, les services, le commerce de détail, sans parler de l’immobilier.
Les investissements canadiens en Chine sont également importants (8,3 milliards de dollars américains en 2011) ; ceux des Chinois au pays s’élèvent à 10,7 G$US.
Ottawa et Beijing ont d’ailleurs récemment signé un accord bilatéral pour promouvoir et protéger leurs investissements. Il aurait été illogique que le Canada rejette l’offre d’achat de Nexen par CNOOC après avoir conclu cet accord.
Comme le Canada veut accroître sa présence en Chine, Ottawa avait aussi intérêt à donner son feu vert, car un refus aurait jeté un froid sur la relation économique et politique entre les deux pays. L’acceptation de l’offre d’achat renforcera cette relation.
Les autorités chinoises verront d’un bon œil les futurs investissements canadiens en Chine. Avec cette décision favorable, le Canada s’est aussi positionné pour l’ouverture de futures négociations de libre-échange avec la Chine – Beijing le souhaite, le Canada est toujours hésitant, pour l’instant.
Aussi, même si beaucoup de Canadiens voyaient d’un mauvais œil cette transaction, le gouvernement Harper a jugé qu’il était dans l’intérêt économique du pays de l’approuver.
Le feu vert d’Ottawa survient aussi dans un contexte où le pays aura besoin d’investir 630 milliards de dollars d’ici 2020 pour développer ses ressources énergétiques. Le Canada - un pays de 34 millions d’habitants – ne peut tout simplement pas allonger tout cet argent à lui seul, représentant un peu plus du tiers de son PIB.
Le pays a donc besoin de l’apport des investisseurs internationaux. Les 15 G$ que paie CNOOC pour Nexen s’inscrivent dans cette politique d’attraction de capitaux étrangers pour développer nos ressources.
Aussi, pour toutes ces raisons, il aurait été surprenant que le Canada rejette l’offre d’achat de la société d’État chinoise.