La reprise américaine n'affaiblit pas le protectionnisme aux États-Unis. Un nombre grandissant d'États ont adopté ou sont en voie d'adopter des mesures inspirées du Buy American pour protéger leurs industries locales et stimuler l'emploi dans les projets d'infrastructures.
«Il est question en ce moment de 19 États qui ont des mesures Buy American dans le secteur de l'acier et des infrastructures», déplore Martin Lavoie, directeur, politiques, productivité et innovation, chez les Manufacturiers et exportateurs du Canada (MEC).
Par exemple, l'État de New York est sur le point d'adopter un projet de loi afin que l'acier utilisé dans certains projets d'infrastructures soit fabriqué localement. «Ce projet fera en sorte d'exclure l'acier qui vient du Canada», explique Martin Lavoie.
L'enjeu est de taille pour le Québec, car l'État de New York est notre principal marché d'exportation aux États-Unis. L'an dernier, nos entreprises y ont expédié pour 5,7 milliards de dollars canadiens de marchandises.
L'État de New York n'est pas la seule juridiction à protéger son secteur de l'acier aux États-Unis.
Sept États, dont l'Alabama, l'Ohio et le New Jersey, ont adopté des mesures inspirées du Buy American pour les produits de l'acier. Dans le cas du New Jersey, ces lois devaient bloquer les exportations d'acier canadiennes dans cet État. Cependant, le gouverneur du New Jersey, Chris Christie, vient d'apposer son veto à cette loi.
Ces sept États font partie des 13 États américains qui ne sont pas couverts par l'Accord plurilatéral sur les marchés publics de l'Organisation mondiale du commerce (OMC). Cet accord donne un meilleur accès aux achats de biens et services des gouvernements - le Canada l'a signé en 1994.
Mais comme ces 13 États ne sont pas assujettis à l'accord, ils peuvent adopter des mesures protectionnistes sans se soucier des représailles de l'OMC.
Cela dit, même les 37 États américains qui ont signé l'accord de l'OMC peuvent adopter des lois protégeant les aciéristes locaux, fait remarquer Martin Lavoie.
«Douze d'entre eux ont spécifiquement exempté les secteurs de l'acier de construction de leurs engagements» de réciprocité au sein de l'accord de l'OMC, souligne-t-il.
Il s'agit du Delaware, de la Floride, de l'Illinois, de l'Iowa, du Maine, du Maryland, du Michigan, du New Hampshire, de l'Oklahoma, de la Pennsylvanie, du Wyoming et de... l'État de New York. L'augmentation du nombre d'États américains imposant des clauses du Buy American inquiète les aciéristes québécois, qui se sentent de plus en plus pris au piège.
«Le Canada ouvre totalement son marché, tandis que d'autres pays ferment le leur», dit Hellen Christodoulou, directrice générale pour le Québec de l'Institut canadien de la construction en acier.
Autre tendance inquiétante pour les entreprises canadiennes : l'assemblage local. Dans un récent contrat pour la construction de 284 voitures pour le métro de Boston, les autorités locales ont exigé que les voitures soient assemblées au Massachusetts. Cela peut être problématique pour les entreprises comme Bombardier, qui n'ont pas d'usine au Massachusetts, mais ailleurs aux États-Unis.
19: Nombre d'États américains qui ont des mesures Buy American. Source : Manufacturiers et exportateurs du Canada