CAPE TOWN - N’espérant que peu d’aide de l’État pour accroître ses ventes hors de ses frontières, l’industrie vinicole d’Afrique du Sud croit qu’une part de sa croissance pourrait passer par le développement du tourisme vinicole.
L’Afrique du Sud attire chaque année des dizaines de milliers de touristes venus du monde entier, notamment du Royaume-Uni, d’Australie et du Japon. Nombre de ces touristes s’adonnent à des safaris offerts dans toutes les variations possibles.
Siobhan Thompson, chef de la direction de Wines of South Africa (WOSA), association qui représente les producteurs de vin d’Afrique du Sud, estime que plusieurs de ses membres pourraient profiter d’une plus grande fréquentation de cette multitude de visiteurs fortunés à la recherche de découvertes et expériences nouvelles.
Mais le pays part de loin, reconnaît-elle. « Il faut d’abord les convaincre de s’intéresser à l’Afrique du Sud comme producteur de vin, un fait qui n’est pas encore suffisamment connu. Ensuite, il faut leur vendre l’idée que nous faisons du bon vin. Enfin, on doit les convaincre de venir nous voir, ce qui n’est pas une mince affaire lorsqu’on connaît notre éloignement géographique de plusieurs marchés-sources d’importance. »
Loin de s’opposer à l’idée, la sommelière Nicola Tipping est convaincue qu’un marché existe bel et bien pour ce genre de produit touristique. Mme Tipping représente le vignoble de la jeune famille Mullineux, situé à Riebeek Kasteel, dans le Swartland, en Afrique du Sud. Près de 65 % du vin produit par ce vignoble est exporté à l’étranger, principalement au Royaume-Uni, en Allemagne et aux États-Unis.
« La demande est là, dit-elle. Il suffit de les faire venir [les touristes] et de permettre aux amateurs de vin de partout de goûter à ce que l’on a à leur offrir. Et d’expérience, je peux vous dire que parmi ceux qui viennent jusqu’à nous, nous obtenons presque 100 % de satisfaction. C’est un succès à tout coup. »
Une activité profitable
Une activité profitable
Matthew Cooke, directeur du marketing de M.A.N. Wines, un vignoble situé non loin de Stellenbosch, est du même avis. Également directeur de l’exportation de Three Pines Trading, une agence responsable de la distribution, principalement en Asie, des vins Man, Stark-Condé et Joostenberg, M. Cooke croit que le tourisme pourrait effectivement devenir un bon moyen d’accroître la notoriété des vins sud-africains à l’étranger.
« Souvent, les infrastructures d’accueil sont déjà construites. Des vignobles tiennent déjà des auberges et des restaurants comme le nôtre attenants à leurs cultures, explique M. Cooke. Nous pourrions en quelque sorte profiter de notre bonne réputation d’accueil pour amener les visiteurs à découvrir nos différents vins. »
Perché à près de 500 mètres au-dessus du niveau de la mer, le Postcard Café, le restaurant exploité par le vignoble montagneux de M.A.N., est un bon exemple de ce que le tourisme vinicole pourrait apporter aux producteurs. En plus de faire connaître leurs produits à des initiés venus d’ailleurs, les viticulteurs auraient toutes les chances d’accroître leurs ventes.
Le Postcard Café, par exemple, est responsable à lui seul de 30 % des revenus totaux et de 35 % des bénéfices du producteur. L’affluence est telle que les bouteilles de sauvignon blanc et de chenin blanc doivent être mises de côté simplement pour répondre aux besoins des restaurants et des clients de passage.
Le vigneron y trouve son compte. Une bouteille vendue en magasin rapporte au producteur une marge bénéficiaire de 7 %, nous dit-on, par rapport à un profit d’environ 50 % lorsqu’elle est vendue au même prix directement au vignoble.
Route des vins à faire connaître
Évidemment, le nerf de la guerre reste le marketing et la mise en marché internationale d’un tel produit touristique. Et les coûts pour rejoindre chacun des marchés visés sont élevés, reconnaît Mme Thompson, de l'association des producteurs de vin d'Afrique du Sud.
Il n’empêche, maintient Nicola Tipping, que si la stratégie est déployée de la bonne façon, en prenant soin d’investir d’abord les marchés les plus importants, le jeu en vaudrait probablement le coût.
« Je suis allée en Argentine, au Chili, en Hongrie, dans la vallée de Napa [Californie], en Toscane, en France et dans d’autres endroits dans le monde. Et je peux vous assurer que nous avons ici, en Afrique du Sud, probablement une des meilleures routes des vins de la planète », affirme avec conviction la représentante de Mullineux.
« Les deux seuls éléments qui jouent contre nous, poursuit-elle, sont notre éloignement de plusieurs marchés et le fait que nous ne sommes pas encore suffisamment connus. Mais trouvons le moyen de les faire venir, et je vous l’assure : ils aimeront ! »
Notre journaliste s’est rendu en Afrique du Sud à l’invitation de la WOSA, l’association des producteurs de vin d’Afrique du Sud.
L'Afrique du Sud à l'honneur à la Grande Dégusation de Montréal 2014
Difficile percée canadienne des vins sud-africains
Mal-aimée chez elle, l'industrie sud-africaine attire des investisseurs étrangers
L'Afrique du Sud veut se tailler une place aux côtés de la Loire