Un droit de passage oscillant entre 2,60 $ et 3,90 $ par traversée sur le nouveau pont Champlain permettrait de rentabiliser la structure et d'en couvrir le coût d'exploitation et d'entretien, conclut le Directeur parlementaire du budget (DPB).
Dans ces deux scénarios, il semble que l'hécatombe redoutée au chapitre de la congestion routière ne s'avérerait pas, si l'on en croit les données fournies par l'organisme indépendant.
Car si la facture du chantier atteint 3 milliards $ et qu'un péage de 2,60 $ est imposé, environ 5800 des quelque 171 000 véhicules qui devraient circuler sur la nouvelle traverse en l'an 2026 opteraient pour un trajet alternatif, ce qui représente une proportion de 3,4 pour cent.
Et dans l'éventualité où les coûts du mégaprojet grimperaient à 5 milliards, ce sont quelque 18 100 véhicules _ soit environ un sur 10 _ qui traverseraient le fleuve Saint-Laurent sur un autre pont.
On estime par ailleurs que pour maximiser les revenus, les droits de péage devraient être de 9,10 $ par passage.
Mais au-delà de ce montant, les revenus totaux diminueraient.
« À 9,10 $, tu maximises les revenus, mais il n'y a plus grand monde sur le pont », a fait valoir le directeur parlementaire du budget, Jean-Denis Fréchette.
Et à ce tarif, environ 38 pour cent de toute la circulation sur le pont _ quelque 64 700 véhicules par jour _ serait détournés vers d'autres axes, ce qui créerait une congestion importante sur le réseau routier montréalais, prévient le DPB.
Par ailleurs, ce montant semble excéder la limite que les Montréalais sont prêts à débourser pour emprunter le futur pont, a indiqué M. Fréchette.
« Selon ce qu'on a vu, 3,30 $ semble être un point important en terme de déviation, alors ça devient quelque chose qu'il faut prendre en considération », a-t-il signalé.
Les deux derniers scénarios mis de l'avant par le DPB évoquent des droits de passage de 0,80 $ et 1,40 $ par traversée.
Dans le premier cas, seuls les frais d'entretien et d'opération _ déneigement, infrastructures de péage _ seraient couverts, tandis que le second est basé sur un coût de 1,12 milliard $ et ne comprend pas, par exemple, le prix de démolition de l'ancienne structure.
Le rapport du DPB, qui a été rendu public mercredi matin, a été commandé par le Nouveau Parti démocratique (NPD), qui s'oppose bec et ongles à l'imposition d'un péage.
Les trouvailles de l'organisme n'ont pas ébranlé la conviction du chef néo-démocrate Thomas Mulcair.
« Avec le NPD, il n'y aura pas de péage sur le pont, un point c'est tout », a tranché le leader lors d'un point de presse, précisant qu'il s'agissait d'une question d'« équité ».
Le chef libéral Justin Trudeau, qui s'est prononcé en défaveur de l'idée dans le passé, s'est quant à lui montré évasif.
« Quand on aura un niveau de clarté, on pourra en parler », a-t-il laissé tomber lorsqu'on lui a demandé s'il était à l'aise avec l'imposition d'un péage sur la traverse.
Il a dit ne pas pouvoir se prononcer sur la question avant que le gouvernement ne dévoile le montant qu'il compte exiger des usagers de la route.
De son côté, le ministre de l'Infrastructure Denis Lebel garde visiblement le cap.
Dans une déclaration transmise par son attaché de presse, il a dit avoir pris connaissance « avec intérêt » du rapport.
Sans se prononcer sur les montants avancés par le DPB, M. Lebel a précisé que le coût final du projet serait déterminé une fois le processus d'acquisition terminé et le partenaire privé responsable du projet dévoilé, ce qui est prévu pour la fin du mois d'avril 2015.