Afin d'inciter au travail tous les contribuables, les gouvernements fédéral et québécois devraient mieux moduler leurs programmes sociaux destinés aux personne dont les revenus sont faibles et moyens, selon les auteurs d’une étude sur l’imposition implicite des Québécois.
Lire aussi un article paru dans le magazine A+: Un taux d'imposition à 80 % au Québec
Ainsi, les familles à revenu modestes peuvent être « imposées » à un taux implicite supérieur à 75 %, en raison de la modulation des programmes sociaux en fonction du revenu.
Si elle fait l'effort d'aller chercher un revenu additionnel de 1000 $, une famille ayant un revenu annuel autour de 40 000 $ subit une ponction fiscale beaucoup plus élevée qu'une famille gagnant 150 000 $ effectuant ce même effort, apprend-on dans l'étude L'imposition implicite des revenus additionnels : comment se compare le Québec ?, des auteurs Luc Godbout et Michaël Robert-Angers.
Cette situation, déjà exposée dans un rapport en 1984 ainsi qu'avec les courbes de Claude Laferrière, s'explique principalement par le fait que la première famille perdra en partie ses prestations fiscales au fur et à mesure que ses revenus augmentent. La deuxième famille n'ayant pas droit à ces prestations verra la ponction fiscale d'une hausse de ses revenus additionnels de 1000 $ moindre.
Le risque de cette situation est de favoriser l'inactivité chez les gens qui sont touchés par des taux implicites élevés. Ce problème est aussi appelé la « trappe à la pauvreté ».
Prenons le cas d'une famille québécoise monoparentale avec deux enfants dont le revenu imposable s'établit à 32 552 $. Elle paie 5713 $ en impôts et cotisations sociales, mais reçoit des prestations de 10 891 $. Sa charge fiscale nette est donc négative, et se chiffre à 5178 $, calculent Luc Godbout et Michaël Robert-Angers. Si cette famille augmente son revenu de 397 $, elle verra ses prestations fiscales diminuer si bien qu'il ne lui restera que seulement 86 $ de plus dans ses poches. Cet exemple illustre bien cette « trappe à l'inactivité ».
En 2009, les auteurs de l'étude observent que, pour une famille monoparentale, le taux implicite d'imposition, qui inclut l'effet du remboursement des prestations d'impôt, le plus élevé atteint 79 %. Du côté des familles avec enfants, le taux implicite le plus élevé se chiffre à 75 % alors que le revenu familial n'excède pas encore le salaire moyen au Québec de 39 700 $. Dans le cas d'une personne seule, le taux implicite maximum atteint 47 % alors que celui des couples sans enfants, de 49 %.
Évolution depuis 2009
De manière générale, les taux implicites sont plus faibles en 2009 qu'en 2000 pour les familles sans enfants au Québec, révèle le rapport. Pour les familles avec enfants, les taux implicites ont chuté pour un revenu supérieur au salaire moyen entre 2000 et 2009.
« Cependant, la majoration de prestations existantes et la mise en place de nouvelles mesures ont eu pour résultat de hausser les taux implicites observés pour les familles monoparentales pour des revenus situés entre 70 et 77 % du salaire moyen [de 39 700 $ en 2009]. Des hausses de taux implicite sont également présentes pour les familles biparentales entre 81 et 97 % du salaire moyen », lit-on dans l'étude.
Par ailleurs, les taux d'imposition implicites du Québec sont plus élevés que ceux de l'Ontario de manière générale.
De plus, en raison des généreuses prestations aux familles, dans certaines situations, les taux implicites du Québec dépassent même ceux des pays du G7 (Allemagne, États-Unis, France, Japon, Italie et Royaume-Uni), et que dans les pays scandinaves (Danemark, Finlande, Norvège et Suède).
Ne pas jeter le bébé avec l'eau du bain
« Toutefois, ce n'est pas nécessairement la générosité des prestations qu'il faut remettre en cause, mais la manière dont elles diminuent au fur et à mesure que le revenu des ménages s'accroît. En effet, la réduction simultanée de plusieurs prestations lorsque le revenu s'accroît constitue une composante importante du taux implicite québécois », indiquent les auteurs du rapport.
Malgré la bonification des prestations au cours des dix dernières années au Québec, de manière générale, les taux imposition au Québec sont moins élevés en 2009 qu'en 2000, d'après le rapport.