Portraits de firmes de génie-conseil qui ont choisi de développer leurs marchés en région. Et cela leur réussit.
Cegertec connaît une croissance tous azimuts
En un an, Cegertec a fait grimper son chiffre d'affaires de 25 % dans une dizaine de bureaux presque tous situés à l'extérieur des grands centres.
Cegertec est présente à Alma, Sept-Îles, Chibougamau, Trois-Rivières et Farnham, entre autres. La firme réalise autant de projets en énergie qu'en transport ou en bâtiments. Elle travaille notamment pour Rio Tinto Alcan et le ministère des Transports du Québec. Elle vient aussi de se voir confier, pour les trois prochaines années, la gestion des petits et moyens investissements dans deux des trois installations québécoises d'ArcelorMittal.
"Quatre-vingt-dix pour cent de nos activités se font sur la Côte-Nord, au Saguenay, à Québec et dans le Nord-du-Québec", dit Stéphane Leduc, vice-président directeur général de cette société qui réalise un chiffre d'affaires annuel de 45 millions de dollars.
Se diversifier pour grandir
Il y a une dizaine d'années, Alcan représentait jusqu'à 80 % du chiffre d'affaires de cette entreprise fondée au Saguenay en 1953. "Cegertec était en bonne santé, mais cette dépendance la fragilisait", dit M. Leduc. En 2006, l'entreprise décide d'ouvrir une dizaine de bureaux au Québec afin de diversifier sa clientèle. "Nous n'avions pas le choix de sortir du Saguenay pour trouver la main-d'oeuvre dont nous avions besoin et continuer à grandir", se rappelle le vice-président.
La stratégie a fonctionné : le chiffre d'affaires de la firme a crû de 25 % entre 2009 et 2010 "et devrait augmenter encore de 30 % de 2010 à 2011", prévoit M. Leduc. Le nombre d'employés a quasiment doublé depuis le début des années 2000, passant de 250 à 475.
Les défis des régions
Être en région complique toutefois la donne lorsqu'il s'agit de soumissionner sur un gros projet comme la construction d'une usine. "Cela demande un grand nombre de travailleurs pendant un court laps de temps, ce qui est difficile à assurer hors des grands centres", regrette M. Leduc. Les expertises très pointues dont la firme pourrait avoir besoin sont aussi plus rares au Saguenay.
Cela dit, on répond bien plus rapidement aux entreprises de Chibougamau ou d'Alma lorsqu'on a un bureau sur place. "Bien des gens d'affaires préfèrent travailler avec des firmes locales, ajoute M. Leduc, parce qu'elles s'investissent comme eux dans la région." Et font croître le PIB local.
Pluritec prend son envol dans le Centre-du-Québec
Au cours des cinq dernières années, Pluritec a doublé le nombre de ses employés et triplé son chiffre d'affaires. La firme, qui emploie 105 personnes, réalise 90 % de ses revenus de 13 millions de dollars en Mauricie et dans le Centre-du-Québec.
"La plus grande partie de notre activité provient du gouvernement du Québec et des municipalités", dit Jonathan Duguay, président de cette firme fondée en 1972. "C'est triste que nos ponts tombent en morceaux, mais cela nous donne du travail."
Experts en surfaces synthétiques
Depuis 2004, Pluritec se spécialise aussi dans les terrains de sport synthétiques. "Nous avons installé le premier de manière quasiment bénévole pour l'équipe de football du cégep de Trois-Rivières", raconte M. Duguay, en poste depuis 2006. "Depuis, nous avons conçu environ 350 surfaces synthétiques, que ce soit pour l'équipe professionnelle de football de Cincinnati ou pour le gouvernement des îles Caïmans", précise le président.
Bref, les affaires vont bien. À tel point que, depuis 2005, Pluritec a inauguré un bureau à Victoriaville et un à Drummondville. La firme a aussi déménagé son siège social dans un immeuble plus moderne, en face du fleuve et muni d'une salle d'exercices.
En comptant le bureau de Shawinigan, Pluritec possède maintenant quatre bureaux en Mauricie. "Cela nous permet de concevoir des solutions qui collent à la réalité de chaque milieu", dit M. Duguay. Par exemple, une firme de l'extérieur pourrait suggérer un carrefour giratoire à une ville qui veut améliorer sa circulation. "En étant sur place, nous saurons tout de suite si les équipements de déneigement de la municipalité pourront y circuler !" lance-t-il.
Hormis les difficultés qu'il éprouve à attirer des ingénieurs étrangers dans son coin de pays, Jonathan Duguay ne voit aucun désavantage à être installé à l'écart des grands centres. "La vie y est meilleur marché. Et les jeunes ingénieurs y développent plus facilement leur polyvalence."
Johnston-Vermette prospère en Mauricie
Lorsqu'on demande à Luc Vermette quels sont les atouts de Trois-Rivières, il répond spontanément... des routes dégagées. "Il n'y a jamais d'embouteillages ici !", dit le pdg de Johnston-Vermette avec un large sourire. N'empêche que cela se traduit par des gains de temps et d'argent pour cette entreprise de 70 employés au chiffre d'affaires de 8 millions de dollars.
L'autre avantage ? Une université et un cégep qui facilitent le recrutement. Le troisième atout de la grande région de Trois-Rivières est son secteur industriel dynamique, comme en témoigne la trentaine d'entreprises installées dans le parc industriel et aéroportuaire de Bécancour.
Certes, Johnston-Vermette a un bureau à Montréal, mais tout le travail d'ingénierie se fait à Trois-Rivières. "Nous réalisons environ 70 % de nos projets entre Québec et Montréal", ajoute Luc Vermette. "Il s'agit surtout de soutien à l'exploitation, c'est-à-dire que nous améliorons les procédés ou la sécurité des installations."
Le spécialiste des pipelines
Depuis 1999, tous les clients de la firme viennent du secteur industriel. Johnston-Vermette, qui compte Hydro-Québec, Alcoa, Enbridge et Gaz Métro parmi ses clients, se spécialise dans la métallurgie et les hydrocarbures. "Tous les pipelines construits au Québec depuis 15 ans l'ont été sous notre supervision, y compris celui d'Ultramar entre Montréal et Lévis, en cours de réalisation", note Luc Vermette.
L'entreprise fondée en 1994 est aussi responsable de la maintenance de Gentilly-2, la centrale nucléaire d'Hydro-Québec située à Bécancour. "Je la vois de la fenêtre de mon bureau !" s'exclame Luc Vermette.
Enfin, la société vient de décrocher un contrat au Libéria. "Nous accompagnons un client dans la construction d'un terminal pétrolier, dit Luc Vermettte. Nous avons notamment rédigé le cahier de charge et analysé les soumissions reçues." Les contrats à l'international, confiés à la filiale Optec Énergie-Services, représentent pour l'instant moins de 5 % du chiffre d'affaires de la société.
Groupe-conseil TDA a le coeur au Nord
La Côte-Nord est le marché du Groupe TDA . Près de 95 % des contrats sont issus de cette région. "Nous sommes avantagés parce que, au fil des années, nous avons appris à connaître les installations des entreprises locales", dit Jacques Parent, vice-président directeur général de cette entreprise dont le chiffre d'affaires s'élève à 10 millions de dollars et qui emploie une centaine de personnes. Sans compter que les contacts professionnels se font plus facilement hors de Montréal. "On croise parfois trois clients en allant conduire nos enfants au hockey !" donne pour exemple M. Parent.
Le Groupe, fondé en 1959, a son siège social à Baie-Comeau, en plus d'un bureau d'ingénierie à Havre-Saint-Pierre et d'un bureau de vente à La Malbaie.
Expertise industrielle
Depuis les années 1980, l'entreprise développe son expertise dans le milieu industriel. Ce secteur représente désormais de 60 à 70 % des activités de la firme, qui réalise notamment des contrats pour Alcoa et AbitibiBowater et qui a récemment travaillé avec Hydro-Québec sur les centrales hydroélectriques Romaine-1 et Romaine-2.
M. Parent perçoit deux désavantages majeurs dans l'éloignement de Montréal. D'abord, les projets de grande envergure, comme la construction d'une usine, sont pilotés par les sièges sociaux situés dans la métropole. Or, "les gestionnaires qui y travaillent font typiquement appel à des ingénieurs de leur région, c'est-à-dire de Montréal", dit-il.
L'autre grand désavantage d'une région éloignée est l'absence d'une université. Cela complique drôlement le recrutement. "L'Université du Québec à Rimouski est seulement à 75 kilomètres, mais elle se trouve de l'autre côté du fleuve !" lance Jacques Parent avec un sourire. L'autre université la plus proche, l'Université du Québec à Chicoutimi, est à 300 kilomètres.Il y a un établissement d'enseignement post-secondaire situé à proximité des bureaux de la firme d'ingénierie Groupe-Conseil TDA : le Cégep de Baie-Comeau.
Pour trouver tout de même des ingénieurs à embaucher, le Groupe TDA participe aux activités de recrutement des universités et accueille des stagiaires. Son premier choix ? Un étudiant originaire de la région qui compte revenir s'y installer. Apparemment, cela existe : pas moins de 70 % des employés de la firme viennent de la Côte-Nord.