Bien qu'avoir des frais de gestion faibles rende les fonds indiciels attirants, les indices peuvent encourir des frais transactionnels importants dont on oublie souvent de tenir compte. Les changements dans les titres détenus par un indice forcent les fonds qui les pistent à acheter et vendre les titres concernés au même moment. Ces transactions concentrées peuvent créer une situation où les prix échappent aux gestionnaires de fonds indiciels et tirent le rendement vers le bas. Ces coûts d'impact boursier ont tendance à être plus élevés parmi les actions à petite capitalisation. Ici, les différences dans la construction de portefeuille et la popularité de l'indice en question peuvent avoir un impact important sur le rendement. Les coûts d'impact boursier ont spécialement nui à l'Indice Russell 2000 et continueront sans doute à lui donner un handicap par rapport à ses pairs.
L'Indice Russell 2000 a été à la traîne des indices S&P SmallCap 600, MSCI USA Small Cap et CRSP U.S. Small Cap d'un total annualisé de plus de 1,4 % depuis la fin juin 2001 (la date la plus éloignée qui soit commune à tous ces indices) jusqu'en janvier 2015. Les différences de sensibilité au marché (bêta) et les penchants liés à la taille et la valeur peuvent souvent expliquer les différences de rendement. Mais même en contrôlant ces effets, l'Indice Russell 2000 s'est tout de même sous-classé de 1,51 % annualisé (son alpha). En fait, ce fut le seul des quatre indices à avoir affiché un alpha négatif statistiquement important. La raison en est que l'Indice Russell 2000 est l'un des indices américains à petite capitalisation les plus populaires, et qu'il se reconstitue en un seul jour chaque année. Le volume de transactions qui en résulte pour les actions affectées par la reconstitution de l'indice pourrait occasionner des coûts d'impact boursier plus importants que ceux de ses pairs.
Si la plupart des changements apportés à l'Indice entrent en vigueur vers la fin juin, les investisseurs savent à quels changements s'attendre à la fin mai, date utilisée par Russell pour affecter les 1 000 plus grosses actions à l'Indice Russell 1000, et les 2 000 suivantes à l'Indice Russell 2000. Il existe une petite marge de manœuvre permettant de limiter la rotation inutile entre les deux indices. Parce que les fonds indexés sur le Russell 1000 représentent la contrepartie des transactions du Russell 2000 lorsque les actions traversent le seuil entre les deux indices, ces ajouts et suppressions peuvent avoir un impact plus faible que les fluctuations de la limite inférieure de l'Indice Russell 2000. Toutefois, les actions proches de la limite reçoivent une pondération bien plus importante dans le Russell 2000 que dans le Russell 1000.
Nous nous attendrions à ce que les investisseurs prévoyant les remaniements des fonds indexés sur le Russell 2000 fassent augmenter les prix des nouveaux ajouts et fassent diminuer ceux des titres supprimés entre la fin du mois de mai et la date effective des changements en juin. Cela nuirait au rendement de l'indice parce que celui-ci ne peut pas ajouter ces actions avant qu'elles soient devenues plus chères ou s'en débarrasser avant qu'elles aient piqué du nez.
Le coût de la rotation
Le coût de la rotation
Antti Patajisto, ancien professeur invité à l'Université de New York, a examiné les effets du prix de ces changements dans l'Indice Russell 2000 en utilisant des données de 1990 à 2005. Il n'a pas trouvé de schéma clair parmi les actions qui ont traversé la limite supérieure des capitalisations du Russell 2000, ce qui peut être causé par les transactions compensatoires des fonds indexés sur le Russell 1000. Une étude séparée à laquelle s'est livré Yen-Cheng Chang a trouvé une augmentation de 5 % du prix des actions du Russell 1000 devant être ajoutées au Russell 2000 en juin en se servant de données de 1996 à 2012. Elle a également trouvé une diminution de 5,4 % du prix des actions devant être déplacées de l'Indice Russell 2000 à l'Indice Russell 1000.
À la limite inférieure des capitalisations du Russell 2000, M. Petajisto a trouvé que les actions qui devaient y être ajoutées s'étaient surclassées de 4,7 % en moyenne entre la fin du mois de mai et du mois de juin, alors que les suppressions au-delà de ce seuil s'étaient sous-classées de 4,6 %. Les nouveaux ajouts, au cours des deux mois suivants, se sont sous-classés. Ces nouvelles fluctuations de prix ont tiré le rendement de l'indice vers le bas, d'un chiffre que M. Petajisto a évalué entre 38 et 77 points de base par an.
Les arbitragistes indiciels peuvent faire fluctuer les prix par rapport à l'indice en réalisant des opérations à l'avance sur le marché. De ce point de vue-là, on pourrait croire que ce serait dans l'intérêt des investisseurs de rendre la prévision de ces changements difficile, mais M. Petajisto avance de façon convaincante que la transparence peut en fait contribuer à réduire les coûts de transactions. Si les arbitragistes n'étaient pas là, les transactions des gestionnaires indiciels feraient tout de même fluctuer les prix, mais ces fluctuations apparaîtraient à la date effective et pourraient être plus importantes que si elles étaient espacées sur une longue période. Avec un délai un peu plus long, les arbitragistes indiciels peuvent construire leurs positions (soit longues, soit courtes) et les inverser de manière à répondre aux exigences des négociateurs de l'indice à la date effective.
Ce n'est donc pas nécessairement la prévisibilité du Russell 2000 qui est problématique, mais plutôt le montant des actifs qui y sont liés, auquel s'ajoute sa rotation concentrée sur une seule partie de l'année. À la fin de décembre, près de 41 milliards $US étaient investis dans les fonds communs et les FNB de l'Indice Russell 2000 cotés aux États-Unis. Ce chiffre ne comprend pas les actifs investis dans des comptes séparés, des fonds à effet de levier ou des contrats à terme sur indices boursiers, et il sous-estime donc probablement la quantité réelle d'argent qui piste l'indice. À ce moment-là, la capitalisation boursière globale des avoirs de l'indice était d'environ 2,15 billions $US, ce qui implique que les fonds indiciels avaient une participation de 1,9 % à l'ensemble de l'indice. Le tableau ci-dessous montre les chiffres correspondants pour les indices S&P SmallCap 600 et CRSP U.S. Small Cap.
Les participations représentent l'ampleur des changements qui se produiraient dans la demande si une action est ajoutée à chaque indice ou en est retirée. Ces chiffres peuvent paraître faibles, mais même de faibles changements dans la demande peuvent avoir un impact important sur le prix des actions à petite capitalisation. Bien qu'il y ait plus d'argent dans l'indice CRSP, celui-ci a une capacité plus grande que le Russell 2000 parce que ses avoirs ont une capitalisation boursière globale plus importante. Sa reconstitution trimestrielle favorise des changements de portefeuille plus graduels, ce qui peut aussi aider. L'indice S&P SmallCap 600 n'a pas de calendrier de reconstitution fixe, le comité d'entretien des indices S&P préférant opérer des changements au gré des besoins. Cette souplesse permet au comité d'espacer les changements apportés à l'indice, ce qui pourrait réduire les coûts de transactions et accroître la capacité.
Les indices peuvent aussi réduire les coûts transactionnels pour les fonds qui les pistent en appliquant une marge de manœuvre pour atténuer la rotation. Alors que l'Indice Russell 2000 met en place une marge étroite de capitalisation boursière pour limiter la rotation des actions qui avoisinent l'Indice Russell 1000, elle n'en a pas actuellement à la limite inférieure de ses capitalisations. Par conséquent, les actions qui ne se situent plus parmi les premières 3 000 sociétés selon leur capitalisation à la fin de mai sont ôtées de l'indice, même si elles sont très comparables par leur taille aux actions appelées à les remplacer.
L'indice CRSP U.S. Small Cap donne aux actions une plus grande latitude. Il cible les actions qui tombent parmi les 85 % à 98 % plus importantes sur le marché américain selon leur capitalisation boursière. Mais il n'ajoutera pas une action d'un indice proche jusqu'à ce qu'elle devienne plus petite que 89 % des actions du marché ou accède aux 96 % les plus grandes. Lorsque les actions traversent effectivement ces seuils, CRSP ne transfère que la moitié de la position. Si l'action demeure fermement au-dessus du seuil à l'examen trimestriel suivant, CRSP transfère la moitié qui reste. Cela réduit la rotation lorsqu'elle n'a pas d'incidence importante sur les caractéristiques de capitalisation boursière de l'indice. L'approche en comité de l'indice S&P SmallCap 600 lui permet de prendre des mesures plus subjectives en considération avant de faire des changements, ce qui pourrait aussi aider à réduire la rotation non nécessaire.
Options de placement
Options de placement
Malheureusement, les investisseurs canadiens qui n'ont pas accès à un compte en dollars américains sont coincés avec le Russell 2000 s'ils veulent adopter une stratégie passive, car le seul FNB de la catégorie Actions de PME américaines est le iShares U.S. Small Cap (couvert en dollars canadiens) (XSU), qui détient des parts du fonds négocié aux États-Unis, iShares Russell 2000 (IWM). Mais pour les Canadiens qui peuvent accéder aux marchés américains sans encourir de gros frais de conversion de devise, il existe plusieurs solutions intéressantes.
Les indices à petite capitalisation qui sont moins largement pistés par rapport aux actifs qu'ils détiennent, qui adoptent une marge de sécurité généreuse afin de limiter la rotation, et qui sont reconstitués plus fréquemment encourront certainement des frais de transaction plus faibles. Ces caractéristiques sont encore meilleures lorsqu'elles sont offertes par un fonds à faible coût. Avec ces considérations en tête, le fonds Schwab US Small-Cap ETF (SCHA) (ratio de dépenses de 0,08 %) pourrait être le candidat idéal pour une participation aux actions américaines à petite capitalisation. C'est le seul fonds qui piste l'indice Dow Jones U.S. Small-Cap Total Stock Market Index. Et le montant de 2,60 milliards $US qui y est investi actuellement est faible par rapport à la capitalisation boursière totale de ses avoirs (3,12 billions $US) et de celle de ses pairs plus connus. Il a lui aussi une marge de sécurité généreuse afin de limiter la rotation du portefeuille. Alors que ce fonds n'est reconstitué qu'une fois par an, sa base d'actifs restreinte devrait permettre d'atténuer l'impact boursier lié à ces transactions concentrées. Il ne descend pas aussi bas dans l'échelle des capitalisations que l'Indice Russell 2000 Index, ce qui peut aussi permettre d'augmenter sa capacité.
Malgré sa plus grande popularité, l'indice CRSP U.S. Small Cap peut également représenter une bonne option dans le secteur des petites capitalisations. Les investisseurs peuvent y accéder par le biais du FNB Vanguard Small-Cap ETF (VB) (ratio de dépenses de 0,09 %). Tout comme SCHA, ce fonds n'investit pas aussi bas dans l'échelle des petites capitalisations que ne le fait l'Indice Russell 2000.