CANADIEN PACIFIQUE
La bataille pour déloger le président se corse
Bill Ackman, 45 ans, l'investisseur activiste à la tête de Pershing Square Capital Management, qui a accumulé 14,2 % des actions du Canadien Pacifique (Tor., CP, 70,99 $), se prépare à livrer une bagarre de procurations pour remplacer cinq des quinze membres du conseil du CP, en vue de l'assemblée du 17 mai qui se tiendra à Calgary.
Le 6 février, M. Ackman tiendra une séance d'information à Toronto, selon Reuters, à laquelle participera Hunter Harrison, 67 ans. Il s'agit de l'ex-président de la grande rivale du CP, Canadien National (Tor., CNR,76,37 $), que M. Ackman compte installer à la tête du CP pour qu'il y implante son modèle.
«Canadien Pacifique a besoin d'un changement de culture radical. Il y a une culture d'excuses. L'actuel président travaille pour CP depuis 32 ans. C'est un conglomérat d'un autre temps», a-t-il déclaré aux médias, le lendemain d'une poursuite intentée par le Canadien National pour empêcher M. Harrison d'aller au Canadien Pacifique.
M. Ackman se bute à la résistance du conseil du Canadien Pacifique, dirigé par John Cleghorn, l'ex-président de la Banque Royale. Ce dernier affirme en effet que l'amélioration du ratio d'exploitation (une mesure d'efficacité qui exprime les coûts en pourcentage des revenus) que vise M. Ackman, de 77 % à 65 %, ne pourra pas être réalisée dans le court délai de trois ans qu'il veut imposer au CP.
Au Canadien National, le ratio d'exploitation est passé de 76 %, à la fin de 2006, à 67,3 %, à la retraite de M. Harrison en 2009. Canadien Pacifique veut diminuer ce ratio de 78,5 % (au quatrième trimestre de 2011) à 70-72 %, d'ici 2015.
Selon Fred Green, le président du Canadien Pacifique, la configuration du réseau de la société, qui traverse les Rocheuses, lui offre moins de souplesse que sa rivale pour améliorer sa productivité. Son affirmation s'appuie sur des arguments fournis par l'administrateur du CP, Edmond L. Harris - qui a travaillé à l'Illinois Central et au CN, avec M. Harrison, ainsi qu'au Canadien Pacifique en 2010.
Le réseau du CN compte en outre presque deux fois plus de voies d'évitement, qui lui permettent d'accélérer la vitesse et la fréquence des trains.
Après l'intervention de M. Ackman, au moins quatre analystes ont haussé leur cours cible du CP.
«Canadien Pacifique produira des résultats nettement supérieurs à partir de 2012, grâce à des efforts pour améliorer son efficacité. D'autres gains sont possibles si Pershing réussit à installer M. Harrison», note David Tyerman, analyste chez Canaccord Genuity, qui établit un cours cible d'un an de 80 $.
Fadi Chamoun, de BMO Marchés des capitaux, a augmenté son cours cible de 75 à 76 $. «Le titre du CP a explosé, puisque CP et Pershing s'affrontent pour savoir qui peut créer rapidement le plus de valeur pour les actionnaires. Toutefois, le parcours visant à atteindre un ratio de 70 % sera long et laborieux», indique-t-il.
Néanmoins, la plupart des analystes jouent de prudence ; 19 sur un total de 24 recommandent de conserver le titre. Quatre seulement en recommandent l'achat.
Le seul analyste qui suggère de vendre le titre du Canadien Pacifique, avec un cours cible de 66,50 $, Cameron Doerksen, de la Financière Banque Nationale, estime que «l'évaluation du titre en Bourse, de 16 fois les bénéfices de 2012, reflète trop d'optimisme et d'enthousiasme envers la capacité du CP d'améliorer son ratio d'exploitation».
M. Ackman profite déjà de son intervention, puisqu'il a accumulé la majorité de ses actions en septembre 2011, lorsqu'elles valaient 46 $, pour un gain de 54 % depuis.
TECHNOLOGIES MIRANDA
JEC Capital prépare sa circulaire pour déloger quatre administrateurs
Devant le refus le 22 décembre de Technologies Miranda (Tor., MT, 9,50 $) de tenir l'assemblée extraordinaire qu'il réclame depuis le 14 décembre, JEC Capital Partners compte émettre en mars sa propre circulaire d'information. Celle-ci lui permettra de présenter directement aux actionnaires ses arguments pour remplacer quatre des membres du conseil d'administration du fournisseur de systèmes d'infrastructure et de mise en ondes destinés au marché de la télédiffusion.
«Publier notre propre circulaire est très coûteux, mais nous y sommes contraints devant l'intransigeance de la société à l'égard de nos demandes de revitalisation de son conseil et devant les manoeuvres des dirigeants pour nous discréditer», a déclaré en entrevue aux Affaires Michael Torok, directeur général de JEC Capital Partners, qui se décrit comme un investisseur de Boston, spécialisé dans les titres de technologie.
«Nous sommes convaincus que le titre de la société est sous-évalué et que son conseil a failli à sa tâche de maximiser la valeur de la société», a indiqué JEC, par voie de communiqué, le 23 décembre 2011.
M. Torok signale que les membres du conseil de Miranda possèdent collectivement 0,3 % des actions de Miranda, alors que lui-même détient, avec un partenaire, un bloc de 10,2 % des actions de la société.
Autre reproche : la stratégie d'acquisitions coûteuses de Miranda Technologies n'a pas donné de bons résultats. «Depuis janvier 2006, sa valeur boursière a fondu de 136 millions de dollars. Pendant cette période, la société a dégagé des flux de trésorerie libres de 112 millions de dollars», ajoute M. Torok.
Miranda a répliqué : «JEC a rejeté nos propositions [pour faire avancer la valeur de la société] et a choisi de présenter une requête officielle en vue de tenter de prendre le contrôle de la société en nommant une majorité de membres au conseil. Il s'agit d'un opportunisme flagrant», déplore dans un communiqué Brian Edwards, président du conseil de Miranda.
M. Edwards fait aussi valoir que l'action de Miranda a bondi de 80 % entre le 21 décembre 2010 et le 21 décembre 2011. De plus, au troisième trimestre clos le 30 septembre 2011, ses revenus ont crû de 29 %, et son bénéfice d'exploitation a bondi de 94 %.
Le conseil et les dirigeants de Miranda estiment disposer d'un nombre suffisant d'actionnaires opposés à la requête pour faire en sorte que la proposition échoue.
Le Fonds de solidarité FTQ a acquis, en 2011, 11,07 % des actions de Miranda. «Le Fonds de solidarité FTQ n'est aucunement lié aux propositions faites par JEC et JMB», s'est contenté de dire le porte-parole Patrick McQuilken.
Miranda et JEC Capital croiseront le fer à l'assemblée annuelle, qui a été devancée au 17 avril prochain.
20-20 TECHNOLOGIES
Le dossier est clos pour la société, mais l'actionnaire dissident Crescendo veille toujours
20-20 Technologies (Tor., TWT, 3 $) est un cas d'activisme qui a échoué, mais l'un des actionnaires dissidents, Eric Rosenfeld, de Crescendo Partners, veille toujours au grain.
Après des négociations en coulisse pendant cinq mois avec les dirigeants de 20-20 Technologies pour obtenir un siège à son conseil d'administration en 2010, M. Rosenfeld a formellement demandé le 18 octobre 2010 la tenue d'une assemblée pour remplacer trois des dix membres de son conseil, en partenariat avec Montrusco Bolton et Constellation Software.
Ces trois activistes, qui détenaient ensemble 23 % des actions du fournisseur lavallois de logiciels 3D de design d'intérieur, ont été déboutés lors d'un vote le 21 décembre 2010 : 70 % des actionnaires ont rejeté la résolution de Crescendo. Gestion Mignault, le Mouvement Desjardins, la Caisse de dépôt et placement du Québec ainsi que la Société financière Bourgie avaient voté leurs actions communes (58 % des actions) contre la proposition.
Depuis, l'action de 20-20 a perdu 17 % de sa valeur.
«Nos administrateurs auraient examiné des moyens de revaloriser la société. L'action recule toujours et les résultats sont toujours décevants. Notre intervention a tout de même mené à la nomination de deux nouveaux administrateurs, en mars 2011, même si ce ne sont pas nos candidats. Nous demeurons d'importants actionnaires», a expliqué aux Affaires Eric Rosenfeld.
«Nous n'avons eu aucun contact avec ces investisseurs depuis. Pour nous, le dossier est clos. Ils participent simplement à la divulgation de nos résultats par téléconférence», a confié Jean-François Grou, chef de la direction de 20-20 Technologies.
La société n'a pas modifié sa stratégie, mais elle a intensifié ses efforts de vente de licences, notamment aux États-Unis et en Russie, explique-t-il.
En 2011, 20-20 a vendu ses logiciels à trois fabricants de meubles et de cuisine en Russie et en Ukraine.
Malgré la chute de 43 % du bénéfice ajusté de 20-20 au quatrième trimestre de 2011, quatre analystes se montrent plus confiants envers la capacité de 20-20 de faire croître ses revenus et d'améliorer sa rentabilité, et ce, grâce à la timide reprise américaine, à ses ventes à l'étranger et au lancement de nouveaux produits pour les salles de bains, les placards et les locaux pour bureaux.
Scott Penner, de TD Valeurs mobilières, place aussi 20-20 parmi ses cibles d'acquisitions potentielles.
TRANSAT A.T.
Un vote pour scinder la haute direction du voyagiste en mars
Ce n'est plus un secret pour personne que le voyagiste Transat A.T. (TRZ.B, 6,93 $) a du mal à s'adapter à la hausse du prix du carburant, à des concurrents plus nombreux et plus féroces et à des voyageurs plus exigeants.
Pour faire face à la musique, le voyagiste abolit 143 postes, réduit ses coûts d'exploitation, change son système de gestion des sièges et des prix, et remanie sa grille de tarifs, avec l'objectif de gonfler son bénéfice d'exploitation de 50 millions de dollars d'ici 2014.
Pour déclencher un véritable «changement dans la culture d'exploitation de l'entreprise», Christian Godin, gestionnaire chez Placements Montrusco Bolton, demande au conseil d'administration de scinder le poste de chef de la direction et de président du conseil qu'occupe Jean-Marc Eustache, 63 ans, et d'adopter un vote consultatif sur la rémunération.
Ces deux propositions d'actionnaires seront incluses dans la circulaire d'information en vue de la prochaine assemblée annuelle de Transat, qui se tiendra le 15 mars 2012.
«J'ai bon espoir que la proposition concernant la rémunération sera approuvée. Je suis moins certain au sujet de la deuxième. Pourtant, un président du conseil différent du président constitue une règle saine et reconnue de bonne gouvernance», dit M. Godin.
Le gestionnaire chez Placements Montrusco Bolton juge qu'il faut un coup de barre au conseil et à la haute direction pour mieux aiguiller la stratégie de la société, qui a été très changeante depuis quelques années et qui ne donne pas les résultats attendus.
Procuration La sollicitation de procurations consiste à demander l'appui des actionnaires à une proposition présentée dans une circulaire d'information. Un formulaire permet aux actionnaires d'apporter leur appui à la proposition en donnant le mandat au solliciteur d'exprimer leur vote.
62 % des interventions d'activistes génèrent des gains
42 % Le gain brut moyen du titre à la suite d'une intervention.
1,5% Hausse de 0,9 à 1,5 % de la marge BAIIA¹ deux ans après l'intervention ; Seulement 30 % des cas sont hostiles ;
2/3 Les activistes atteignent leur but dans les deux tiers des cas.
¹ Bénéfice avant intérêts, impôts et amortissement. Données tirées d'une étude de 1 059 cas, menée de 2001 à 2006 par la Duke University, la Vanderbilt University, l'University of San Diego et la Columbia Business School, mai 2008.