BLOGUE. Les politiciens américains auront finalement réglé leur différend fiscal quelques jours avant que le hockey professionnel ne règle le sien – encore que, dans le cas des Américains, on est encore loin d’une entente définitive. Au moins, pour ce qui est du hockey, la paix devrait quand même durer quelques années, si les joueurs acceptent le projet de contrat qui mettrait fin au lock-out.
Au centre-ville de Montréal, et chez les amateurs frustrés de cet interminable accrochage, les soupirs de soulagement seront nombreux. Je suis de ceux qui pensent que ce conflit va faire mal au hockey, dont le statut était déjà fragile dans bien des villes du sud. En tout cas, les propriétaires et les joueurs mériteraient bien de perdre des plumes. Ils ont couru après.
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De façon générale, l’économie va-t-elle connaître le regain sur lequel bien des gens comptent ?
Peut-être, mais l’impact de ce retour au travail sur la santé des affaires sera limité.
Les restaurants et les bars des alentours du Centre Bell à Montréal, du Air Canada Centre à Toronto et ailleurs, là où le hockey est vraiment populaire, vont en profiter. Des hôtels aussi, dans la mesure où les équipes locales ont suffisamment de pouvoir d’attraction. Mais un principe demeure : l’argent que les gens ne dépensent pas pour un loisir donné finit par l’être ailleurs. Rien ne se perd et bien des activités se créent.
Quelques études sérieuses l’ont démontré. Une étude américaine de 2006 (Holy Cross College et Lake Forest College) a montré qu’un conflit de travail dans le sport professionnel, quel qu’il soit, a peu de conséquences globales sur l’économie d’une ville. On assiste plutôt à un déplacement des dépenses.
Plus près de nous, c’est aussi la thèse d’un professeur des HEC que j’ai eu l’occasion d’interviewer il y a plusieurs années lorsque les Expos, au baseball, étaient en train de quitter Montréal. Si mes souvenirs sont bons, il s’agissait du professeur François Colbert, titulaire de la Chaire de gestion des arts Carmelle et Rémi Marcoux. Son point de vue était à peu près le même : ce que certains perdent, d’autres le gagnent. Le budget de loisir n’étant pas élastique, il est simplement affecté à d’autres activités.
Évidemment, tout est relatif. Les purs et durs du hockey ne vont pas au ballet, mais ils fréquentent peut-être davantage les cinémas. Dans l’ensemble, l’économie se réajuste.
L’impact psychologique sera probablement plus fort. Le hockey est rassembleur, chez nous. On aime ou on n’aime pas, mais il fait oublier bien des tourments. Les smattes diront que ce n’est qu’une nouvelle forme de la vieille stratégie romaine du Pain et des jeux, et ce n’est pas faux.
Se chicaner quant aux performances du Canadien sur la glace a moins de conséquences que se déchirer sur le sort des universités ou de la politique municipale. Ça ne règle rien mais on oublie pendant quelques heures les vicissitudes de la vie courante. Toute la planète réagit de la même façon, quel que soit le sport, que l’on soit en France, au Honduras ou en Côte d’Ivoire. Le Québec ne fait pas exception.
D’autant plus que notre moral a été mis à rude épreuve en 2012 avec tous les scandales qui ont ébranlé le monde politique municipal et la gestion des fonds publics en général. Le Québec a patiné de reculons pendant plusieurs mois. La reprise des travaux de la Commission Charbonneau va certainement entraîner de nouvelles révélations déplaisantes.
Si le Canadien peut ne pas jouer avec des bottines de ciment… Le temps de quelques heures, il pourra aider à s'évader, tout au moins en pensée. En attendant le retour des Nordiques !