C’est l’équivalent de Nokia en Finlande (avant ses récents déboires).
De GM, dans ses belles années, à Detroit et les environs.
Ou de Renault, en France.
Ici, Bombardier(Tor., BBD.B) occupe une immense place, et pas juste en fonction du nombre de gens qui y travaillent et de sa galaxie de sous traitants.
L’entreprise est devenue un symbole de notre capacité à nous faire valoir sur la scène mondiale.
Bref, une fierté et un imaginaire. Oui, nous sommes capables.
Il ne faudrait donc surtout pas qu’il lui arrive malheur.
L’entreprise a pris une si grande place au Québec qu’on ne peut imaginer ce qu’il adviendrait si elle finissait par flancher. Mais les derniers mois ne lui ont pas été favorables.
En Bourse, son action a tout juste évité d’être reléguée au triste rang des penny stocks (moins de 1 $) cet été, avant de légèrement rebondir. Mais plein de questions l’assaillent et beaucoup se demandent combien de temps Bombardier pourra tenir avant de succomber face aux carnivores qui tournent autour.
Arrive la Caisse de dépôt.
Compte tenu de la dernière ronde de financement, l’hiver dernier, elle détient environ 3 % de son capital, ce qui en fait un des plus importants actionnaires. C’est à la fois inquiétant et rassurant.
Inquiétant, parce que la Caisse doit veiller à la bonne santé de près d’une trentaine régimes de retraite dont elle a la charge, y compris le Régime de rentes du Québec. Or, l’action de Bombardier a perdu quelque 70 % de sa valeur depuis deux ans. Aux livres de la Caisse, ce ne doit pas être réjouissant.
Mais rassurant, parce qu’elle vient d’en rajouter une couche, selon l’agence Reuters, en investissant de nouveau dans l’entreprise. Si c’est le cas, la Caisse augmentera son influence à venir sur les orientations de cette entreprise si chère aux yeux des Québécois.
En fait, il s’agit maintenant d’une course contre la montre. À tort ou à raison, Bombardier s’est lancée dans le marché des avions moyen courrier, de plus de 100 places, et en a fait l’annonce en 2008. Mais il y a eu des retards dans le développement de la CSeries, ce qui a entraîné des dépassements de coûts. Le refrain est connu.
Pour se maintenir à flot, Bombardier a besoin de regarnir ses coffres. Des investisseurs internationaux, certains plus prédateurs que d’autres, seraient certainement intéressés à lui avancer des fonds en attendant de pouvoir mettre la main dessus. D’autres verront un avantage à cheminer à ses côtés en attendant que sa situation s’améliore.
L’intervention récente de la Caisse se situe dans la deuxième catégorie. Elle remplit ainsi une partie de son mandat, celui qui concerne la participation au développement économique du Québec. Quant à l’autre, qui est de gérer efficacement les fonds que lui confient ses grands déposants, c’est moins certain.
On pourra dire que c’est un pari plus ou moins dangereux puisque la saga de le CSeries arrive à terme avec une mise en service prévue dans quelques mois, mais quand même. Il reste que peu de Québécois vont reprocher à la Caisse d’épauler la plus grande industrie qui ait vu le jour ici, tout en amenuisant le risque qu’elle ne finisse par partir vers d’autres cieux.