On commence à parler de plus en plus de la hausse des taux d'intérêt aux États-Unis. La semaine dernière, Janet Yellen, la dirigeante de la Fed, donna un discours lors de la réunion du FOMC (Federal Open Market Committee), dans lequel elle annonça la diminution de l'assouplissement quantitatif. Quant aux taux d'intérêt, Mme Yellen laissa sous-entendre que ceux-ci pourraient être relevés à partir de 2015.
Ironiquement, la hausse des taux d'intérêt augure bien pour les financières, tout particulièrement les sociétés d'assurance. Normalement, on assiste à la réaction contraire. On préfèrera la fonte des taux, car ceux-ci créent des gains sur les actifs à long terme qu'elles détiennent. On peut facilement constater l'effet de ces baisses en jetant un coup d'oeil aux bilans de ces sociétés. Beaucoup d'entre elles affichent des gains non réalisés sur leur portefeuille d'investissement. Est-ce vraiment une bonne nouvelle?
Nous devons garder à l'esprit que les institutions financières tentent d'apparier leurs actifs et leurs passifs. Ainsi, si on veut s'assurer de pouvoir débourser un certain montant à ses bénéficiaires sur une période de 10 ans, on privilégiera des investissements comportant une échéance similaire. Lorsque les taux baissent, un gain non réalisé est créé, mais ce dernier ne peut pas servir à mousser les profits de la société. En effet, si l'actif est vendu à profit, on devra le remplacer par un actif générant moins de rendement. Par conséquent, ce gain ne fait que compenser pour le manque à gagner dans les revenus futurs. C'est pourquoi nous devons parfois porter une attention particulière à la valeur au livre des sociétés financières. Dans bien des cas, il vaut mieux ne pas tenir compte de ces gains non réalisés pour calculer la valeur nette.
Une baisse pouvant devenir un problème
Une baisse des taux prolongée peut même créer des maux de tête, particulièrement pour les sociétés ayant vendu des produits comportant des rendements minimums garantis. Lorsque les actifs du portefeuille viennent à échéance, la société doit remplacer ses investissements à des taux beaucoup plus bas. Si elle doit supporter des passifs et payer des taux minimums, on assiste à une diminution des profits prévus sur ces produits et voire même un déficit. Le cas échéant, une hausse des taux est fortement souhaitable. La société d'assurance American International Group (AIG-N) supporte des dizaines de milliards de dollars de produits dont le taux minimum est atteint ou surpassé. Cela engendre une réduction des marges nettes prévues. Dans les cas les plus extrêmes, la marge peut être négative. Heureusement, grâce notamment à la diversification, cette situation n'empêche pas la société d'engendrer des profits, mais on peut comprendre pourquoi une hausse des taux à moyen terme serait bienvenue. Notons qu'un grand nombre de compagnies d'assurance se retrouvent dans une situation similaire, et c'est pourquoi nous estimons qu'une hausse des taux à moyen et long terme leur sera favorable, à condition bien sûr que celle-ci ne soit pas exagérée.
Pour les intéressés, nous avons produit une analyse sur la société AIG. Ce document est disponible sur cette page (cliquer ici pour y accéder).
Au sujet des auteurs du blogue : Patrick Thénière et Rémy Morel sont propriétaires de Barrage investissement privé, une firme montréalaise de gestion d'actifs. www.barragecapital.com