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''Le temps, c'est de l'argent.'' N'est-ce pas une expression que nous avons souvent entendue? Bien qu'elle soit employée principalement par des gens d'affaires dont l'horaire est chargé, elle s'applique également à la majorité des travailleurs. Lorsque l'on rend des services quelconques à une entreprises en échange d'un salaire, on se retrouve à ''vendre'' son temps. Le taux horaire chargé variera en fonction de l'expérience et des connaissances, mais plus de temps consacré exigera presque toujours davantage d'argent en retour.
Qu'en est-il des investissements? Étant donné le caractère passif de ceux-ci, doit-on aussi considérer le temps qu'on leur consacre? Nous pensons que cela doit être tout à fait le cas. Un investissement bien étudié et soigneusement sélectionné devrait générer davantage de profits qu'une somme investie à la hâte.
Suivant ce raisonnement, l'évolution de la taille de son portefeuille mérite que l'on attache de l'importance non seulement à l'allocation du capital au sein de celui-ci, mais également à l'allocation du temps. Comme le nombre et la qualité des idées découlent directement du temps que nous consacrons à la recherche, nous pouvons estimer grossièrement le taux horaire marginal que génère cette dernière.
Procéder à ce genre de calcul peut sembler farfelu à première vue, mais n'oublions pas que les meilleures entreprises s'efforcent constamment de minimiser leurs coûts de production en optimisant l'utilisation de chaque pied carré de leurs usines ou en comptant le temps recquis pour chaque étape de leurs chaînes de production. Tous les détails importent afin d'obtenir le maximum avec le minimum de ressources possible, et l'investisseur individuel devrait s'inspirer des meilleurs gestionnaires d'entreprises.
Pour l'investisseur, les deux grandes ressources disponibles constituent son capital et son temps. Une fois que le capital a été pleinement optimisé par l'épargne, il doit estimer de quelle façon il peut augmenter ses rendements sans prendre plus de risques. La seule façon que nous connaissons réside dans une meilleure compréhension de ses placements ainsi qu'une recherche assidûe d'idées de titres ou de projets.
Utilisons l'exemple d'un individu qui dispose de 800 000$ à investir. Supposons qu'il obtient en moyenne 10% de rendements par année. Son profit s'élève donc à 80 000$, et augmente progressivement au fur et à mesure qu'il réinvestit ses gains. S'il détient une maison de taille moyenne et qu'il effectue lui-même le ménage, on pourrait estimer qu'il doit consacrer à cette tâche au moins six heures toutes les deux semaines. Au bout d'un an, nous obtenons plus de 300 heures. Si notre individu pense qu'il détient la capacité d'augmenter son rendement d'au moins 1% en dédiant ces 300 heures à la recherche financière, nous aboutissons à un taux horaire de 27$ de l'heure (8000$ / 300). Ainsi, s'il peut contracter une personne pour accomplir la tâche à un prix moindre, il en retire un avantage pécunier et intellectuel. En consacrant plus d'heures à la littérature financière, ses connaissances s'accumuleront, et ses chances de générer plus de rendements s'amélioreront.
Le montant total du capital investi influencera beaucoup ce genre de décision. Avec 3 000 000$, la décision s'avère facile à prendre. Le même calcul résulte en un rendement correspondant à 100$ de l'heure. Un investisseur qui ne détient que 200 000$ en portefeuille devra par contre obtenir bien plus que 1% de profits additionnels pour justifier ce genre de dépense.
Il serait bien inconvenable d'appliquer un tel raisonnement pour une tâche agréable à effectuer. Par exemple, si un investisseur adore jardiner, il gagnerait peu à embauche un jardinier. Une activité que l'on aime amène des bienfaits, et peut être considérée comme un repos pour l'esprit, ce qui améliore sûrement la performance une fois de retour au travail. Donc, les tâches visées correspondent avant tout à celles que l'on préfèrerait éviter d'accomplir dans un monde idéal.
Voici une erreur à laquelle nous assistons fréquemment chez les gens qui, avec de la patience, détiendraient probablement le potentiel de devenir riches. Avec un budget limité, on préfèrera acquérir une plus grande habitation, en compensant avec un plus grand investissement en termes de temps. D'une part, l'hypothèque est plus élevée. D'autre part, on doit tout faire soi-même si l'on se retrouve dans l'incapacité de payer pour des services. Une habitation plus grande requiert davantage d'entretien : plus grande pelouse et terrain à aménager, plus d'espace à nettoyer à l'intérieur et plus de rénovations à effectuer à travers les années.
Un des fils de Warren Buffett, Howie, avait appris l'importance du temps en observant son père, qui se consacrait intensément à la lecture financière. ''Je ne l'ai jamais vu couper le gazon, tailler une haie ou laver une voiture. Je me souviens que je trouvais cela irritant. C'est seulement en vieillissant et en comprenant la valeur du temps que j'ai réalisé pourquoi il agissait de cette façon.''
En conclusion, on ne doit pas s'empêcher de vivre sous prétexte que le temps constitue de l'argent. Toutefois, comme nous sommes tous limités à 168 heures par semaine, l'optimisation du temps s'avère tout aussi important qu'une bonne gestion des dépenses.
Au sujet des auteurs du blogue : Patrick Thénière et Rémy Morel sont propriétaires de Barrage investissement privé, une firme montréalaise de gestion d'actifs. www.barragecapital.com