Nous avons déjà donné par le passé quelques exemples de titres ou de situations où nous avons tiré profit de la réaction des marchés face à un événement négatif.
En 2012, le titre de JP Morgan (NY., JPM, 67.52$) avait été pénalisé injustement suite à une histoire de perte reliée à sa «baleine de Londres». En 2009, les actions privilégiées des banques étaient fuies par les investisseurs, face à la crainte de faillite de tout le secteur. Les titres de certaines institutions les plus solides offraient des aubaines que nous ne reverrons probablement pas avant 30 ou 40 ans.
Présentement, le titre de Best Buy (NY., BBY, 33.50$) nous semble injustement puni par ceux qui prédisent la fin des détaillants tels qu’on les connaît: les ventes en ligne menaceraient leur existence. En outre, le secteur de l’électronique afficherait une pente descendante selon le Groupe NPD. La nervosité des investisseurs face à une industrie amène certains titres en territoire d’aubaines. Nous devons cependant souligner que porter attention aux nouvelles médiatiques négatives constitue un point de départ pour dénicher une occasion, et non un critère essentiel garantissant le succès.
Dans bien des cas, la baisse d’un titre ou d’un secteur sera bel et bien justifiée. Donc, chercher des situations où ça va mal, oui. Mais comprendre la raison permet de déterminer si ce n’est que le début. Toute la thèse de l’investissement repose sur l’excès de réaction de la part des investisseurs. Dans le cas de l’Europe, nous pensons souvent que ceux-ci ne réagissent pas assez!
On nous demande souvent si nous investissons en Europe, comme s’il était devenu une nécessité d’y être. Certes, nous découvrons parfois des occasions alléchantes. Toutefois, nous trouvons encore bien des titres dans notre pays favori, soit les États-Unis. En ce qui concerne la deuxième raison: nous pensons qu’en Europe, rien n’est résolu, et rien n’est mis en place pour un règlement à court ou moyen terme.
Suivre la Grèce pour sonder l'avenir de l'Europe
Suivre la Grèce pour sonder l'avenir de l'Europe
Actuellement, la Grèce fait les manchettes un peu partout, et les gens attendent avec grand intérêt l’issue du référendum qui sera tenu demain. Un «oui» se traduirait par l’acceptation des mesures d’austérité proposées par l’Union Européenne. Un «non» signifierait le refus du peuple d’acquiescer à leurs conditions, et conduirait soit à une modification de celles-ci, soit à l’abandon de l’euro par la Grèce. Le premier ministre grec, Aléxis Tsipras, réclame une réduction de 30% de la dette, ainsi qu’une période de grâce de 20 ans pour la dette restante.
Peu importe l’issue de ce référendum et des concessions qui pourraient s’ensuivre, nous ne voyons pas pourquoi la prospérité économique reviendrait à long terme. Si vous semez des graines de radis, vous attendrez-vous à voir pousser des citrouilles? En attendant d’assister à la sortie des premières pousses, on peut imaginer toute sorte de choses. Il semble que l’on souhaite un résultat différent de ce qui est semé. Lorsque la récolte bat son plein, on s’indigne de ne pas obtenir ce que l’on espérait. Alors, on recommence à nouveau en plantant une graine légèrement différente, mais de même nature que la précédente, en se croisant les doigts pour assister à une récolte totalement différente.
En Grèce, un problème fondamental réside dans la perception des taxes. Beaucoup de citoyens considéreraient les impôts comme étant du vol. Le gouvernement est perçu comme étant corrompu et inefficace. Par conséquent, éviter les impôts et les taxes est devenu légion en Grèce. Par exemple, il serait courant pour les petites entreprises de payer le salaire minimum aux employés, et de payer les surplus au noir. Parfois, ils remettent des coupons spéciaux à dépenser plutôt que du salaire.
La Grèce est réputée pour avoir un nombre impressionnant de fonctionnaires par rapport à sa taille. Or, si la population est réticente à payer ses impôts et que le gouvernement ferme les yeux parce qu’il s’agit de son électorat, comment peut-on arriver à payer tous ces fonctionnaires?
Nous nous retrouvons donc avec un état trop gros, avec des citoyens qui ne souhaitent pas le supporter. Comment un programme d’austérité peut-il fonctionner dans un tel contexte? Même si la dette grecque était tronquée de 30%, le pays bénéficierait simplement de plus de temps avant de faire défaut à nouveau. Le pays doit résoudre un problème structurel, et non temporel.
L'austérité seule: pas la solution
L'austérité seule: pas la solution
Bien des citoyens se sont prononcés contre l’austérité. Cette dernière à elle seule ne règle rien. Nous pensons plutôt qu’elle doit être accompagnée de mesures draconiennes visant à stimuler le secteur privé. Si l’état se retire peu à peu, l’économie doit être prise en main par la population, c’est-à-dire, le travail autonome et l’entreprenariat. Il s’agit d’un pénible et long processus. On ne devient pas créateur d’emplois du jour au lendemain! Mais comme rien n’est fait de ce côté, et qu’en plus, à peu près tout le monde tente d’éviter les impôts (autant la classe moyenne que les plus riches), nous ne voyons pas d’aboutissement positif à ce marasme économique. À long terme, le problème demeure tout entier.
En Europe, cette culture se retrouve un peu partout, à divers degré. Si la Grèce obtient des concessions, le Portugal, l’Espagne, l’Italie et éventuellement la France vont peut-être avoir droit à leur tour. Dans un tel contexte, nous sommes beaucoup plus gourmands en tant qu’investisseurs. Nous ne souhaitons pas obtenir de simples aubaines, nous exigeons plutôt des escomptes extraordinaires. Par exemple, si vous achetez un titre grec avec des euros, et que l’entreprise adopte soudainement le drachme, vous vivrez peut-être beaucoup d’émotions avec le taux de change. Il ne s’agit ici que d’un élément, mais l’idée demeure la même. Nous sommes d’avis qu’il y a de l’action en Europe, mais un bas prix de garantit pas un bon résultat. Un bon investisseur doit savoir départager les réactions exagérées des investisseurs des risques réels.
Tout est plus tranquille aux États-Unis. Mentionnons également que le marché boursier dans son ensemble est pleinement évalué. Malgré cela, nous y dénichons encore des aubaines intéressantes. Observer les situations où tout va mal constitue un point de départ pour des idées. Par la suite, vous devez déterminer si c’est temporaire ou non. Pour l’Europe, nous avons écarté pour le moment la possibilité du «temporaire». Ceci étant dit, vous pouvez certes trouver de vrais petits bijoux de temps à autres. Il faut simplement s’assurer d’obtenir suffisamment de marge de sécurité.
Au sujet des auteurs du blogue: Patrick Thénière et Rémy Morel sont analystes financiers et propriétaires de Barrage Capital, une firme montréalaise de gestion d'actifs. www.barragecapital.com