BLOGUE. Dans les milieux académiques, on nous enseigne plusieurs façons de protéger son portefeuille. Parmi les plus populaires, nous retrouvons l'allocation d'actifs, les valeurs défensives et l'utilisation de couvertures.
L'allocation d'actifs suggère de simplement diversifier le portefeuille dans des instruments financiers moins volatils, comme les obligations. L'inconvénient réside dans la dilution des rendements potentiels. Afin de contrer la volatilité des titres boursiers, on alloue une part du portefeuille dans des instruments à revenu fixe qui génèrent peu d'intérêts.
Les valeurs défensives constituent des titres de sociétés qui devraient résister aux récessions ou qui s'avèrent peu cycliques. L'ennui, c'est que trop souvent, leur réputation à cet effet se reflète dans leur cours. Donc, en payant plus cher, on réduit le rendement potentiel qu'ils auraient procuré autrement.
Quant aux stratégies de couverture, elles s'avèrent souvent coûteuses. Le recours aux produits dérivés constitue un transfert du risque vers une tierce partie. Cette dernière acceptera normalement le risque en échange d'une certaine rémunération. Par conséquent, se protéger avec les produits dérivés grugera un pourcentage non négligeable des rendements.
Nous avons vu dans blogue précédent (cliquer ici) qu'en misant sur des titres se négociant à escompte, on obtient généralement de meilleurs rendements. Toutefois, l'avantage que nous en retirons ne s'arrête pas aux rendements: nous diminuons sensiblement notre risque.
Dans le marché immobilier actuel, la plupart des gens seront d'accord pour reconnaître que les évaluations ont grimpé depuis le dernier cycle baissier. Ainsi, un immeuble à six logements se transigeait peut-être à 6 ou 7 fois les loyers au début des années 1990. Aujourd'hui, il s'échange plutôt à 10 ou 12 fois. Comme les taux d'intérêt ont atteint des niveaux ridicules, certains acheteurs demeurent intéressés à de telles évaluations.
Quelques experts estiment que les taux pourraient monter, d'autres disent le contraire ou déclarent que les évaluations pourraient s'effondrer même en l'absence d'une hausse des taux. Étant confronté à un avenir incertain, nous comprendrions les craintes d'un acheteur en ce moment.
Toutefois, s'il trouvait un immeuble à 6 fois les loyers, aurait-il raison d'acheter avec l'esprit en paix? Si son immeuble mérite réellement un multiple de 12, et qu'il se transige temporairement à 6, il rafle un rendement potentiel instantané de 100%. En outre, il bénéficie d'une grande sécurité sur l'évaluation de son bien. Si le marché immobilier s'effondre, passant de 12 fois les loyers à 8 fois, il engendrera un gain appréciable. Pendant que ses voisins souffriront d'une correction de 33%, il jouira d'un gain de 33%!
Dans le monde de l'immobilier, dénicher une telle disparité d'évaluation sans justification précise s'avèrera fort rare. À la bourse toutefois, ces occasions existent. Comme l'escompte correspond à notre marge de sécurité, nous avons le luxe d'avoir le droit à l'erreur.
Lorsque nous achetons le titre d'une société, nous ne pouvons pas obtenir la certification absolue que les profits seront maintenus ou qu'un certain élément négatif n'aurait pas été mal estimé. Investir dans une société comporte des risques à la base. La meilleure façon pour nous de réduire l'impact des impondérables réside dans le prix payé. Parfois, nous payons un prix si bas que nous avons l'impression de détenir une assurance contre le risque sur le titre.
Pour mieux comprendre l'effet de l'escompte sur le risque, imaginez que vous achetez un titre à 30$ qui vaut au moins 50$. Il s'agit d'une société que vous aimez, et pour laquelle vous étiez prêt à payer de toute façon 50$ par action. Vous aviez prévu d'obtenir 1000 actions pour un total de 50 000$. Or, comme le titre se transige seulement à 30$, vous optez pour suivre votre plan à la lettre : vous achetez 1000 actions seulement.
Quel est le résultat? Vous détenez 1000 actions pour 30 000$, ainsi qu'une somme en argent comptant de 20 000$ non déboursée. Quels sont les risques de tout perdre? Elles s'avèrent évidemment nulles, puisque peu importe ce qu'il adviendra de vos actions, les 20 000$ en encaisse seront épargnés. Quant au rendement potentiel, vous l'aurez deviné, il suit le chemin inverse en augmentant de façon significative, et ce, malgré les 20 000$ non investis.
P.S.: pour en savoir plus sur le sujet, vous pouvez consulter notre document ''démystifier la marge de sécurité'', au chapitre 6 (http://www.barragecapital.com/html/publications.htm).
Au sujet des auteurs du blogue : Patrick Thénière et Rémy Morel sont propriétaires de Barrage investissement privé, une firme montréalaise de gestion d'actifs. www.barragecapital.com